Air France intègre les chatbots dans son bagage de relation client

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Greffés notamment à Facebook Messenger, les agents conversationnels sont l’un des marqueurs de la transformation numérique d’Air France. Pour quels résultats ?

« Il y a quelques années, on ne parlait pas de digital, mais de e-commerce. Internet était le nouveau canal de distribution. Désormais, l’objectif n’est plus seulement d’être là au moment de l’achat, mais d’accompagner et d’enrichir le service à chaque étape du parcours ».

Les propos de Stéphanie Charlaix Meyer, responsable du développement digital d’Air France, illustrent l’un des objectifs que la compagnie s’est fixés dans le cadre de son plan stratégique lancé fin 2016 sous la bannière « Trust Together » : améliorer la relation client par l’investissement dans les outils numériques.

En façade, il y a le site et l’application mobile, mais aussi les médias sociaux ; une douzaine, en l’occurrence, de YouTube à Snapchat en passant par… Facebook, où la marque a réuni 6,8 millions de fans* sur sa page officielle.

Ils sont 150 conseillers à se relayer en 24/7 pour gérer, en 9 langues, cet ensemble qui inclut également des messageries instantanées comme WeChat (utilisé essentiellement en Chine) et Kakao Talk (Corée).

Un chatbot pour les bagages

Avec un volume d’interactions estimé à 5 000 messages par jour, s’est posée la question de l’automatisation.

D’une collaboration avec The Chatbot Factory, qui se présente comme une agence spécialisée en applications conversationnelles, est né le dénommé Louis.

Son rôle, apporter des réponses à la deuxième problématique la plus abordée par les clients d’Air France sur les réseaux sociaux (20 % des sollicitations) : les bagages.

Plusieurs semaines d’entraînement ponctuées de tests auprès de clients en escale ont abouti au lancement de ce chatbot connecté à l’ensemble du système d’information de la compagnie aérienne afin de contextualiser ses réponses.

L’exploitation se fait au travers de Facebook Messenger, ainsi que sur les pages « Bagages » du site d’Air France… via un widget développé par Facebook.

Voyage sur Messenger

Quant à une déclinaison sur d’autres canaux, Stéphanie Charlaix Meyer reste évasive, s’en tenant à évoquer une volonté de « déployer l’information sur tous les points de contact ».

Le contexte de son intervention n’y est pas étranger : rendez-vous avait été donné… dans les locaux parisiens de Facebook.

L’occasion, pour Air France, de mettre en avant d’autres briques développées sur Messenger. En tête de liste, une fonctionnalité que la Royal Dutch Airlines, filiale d’Air France-KLM, avait été la première compagnie aérienne à mettre en place, au printemps 2016 : la possibilité de récupérer ses documents de vol.

Un pic journalier à 1 400 cartes d’embarquement a été recensé, à en croire Florence Estra.

La responsable du marketing digital d’Air France n’a pas manqué de mentionner un autre service intégré plus récemment à la plate-forme de messagerie instantanée : la communication d’informations en temps réel sur des vols (changement de porte d’embarquement, localisation du tapis bagages, etc.).

Florence Estra l’assure : les chatbots ne sont qu’un « premier niveau d’assistance qui permet de concentrer les conseillers sur des cas plus complexes ou sur des moments décisifs dans la relation client ». Elle ne s’exprime toutefois pas plus en détail sur la réalité de cet équilibre.

Louis & Cie.

D’après Stéphanie Charlaix Meyer, Louis n’évoluera pas seul bien longtemps. Un cousin devrait émerger pour la gestion des aléas de dernière minute, typiquement les conditions météo. Avec un objectif : absorber les afflux de clients « qui ont à peu près tous la même demande ».

Point commun entre ces produits : ils se fondent sur les travaux menés par une équipe interne sous le prisme de l’intelligence artificielle, dans la lignée de la mise en place, en 2015, d’une infrastructure big data.

Si des pistes sont explorées entre autres dans la maintenance prédictive et le « revenue management » (optimisation des recettes par la gestion des remplissages et des tarifications), les avancées les plus concrètes se manifestent dans le domaine de la relation client.

« On ne s’adresse pas de la même façon à un client Flying Blue qu’à un internaute qui n’a jamais voyagé avec Air France », confie, à cet égard, Florence Estra, en ajoutant : « On sait mesurer qu’un e-mail personnalisé génère 30 % de conversions en plus et que sur mobile, une push notification personnalisée génère deux fois plus de clics. »

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Laurent Solly (directeur général de Facebook France) et Jean-Marc Janaillac (au micro).

Un bot pour les orchestrer tous

Président d’Air-France KLM, Jean-Marc Janaillac résume l’objectif à terme : être capable d’apporter aux clients fréquents le même niveau de personnalisation qu’un hôtel, en composant avec une difficulté : alors qu’on retrouve souvent la même personne à la réception, on voyage rarement deux fois avec le même équipage.

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Icelandair propose d’acheter des billets sur Facebook Messenger.

Dans cet esprit, les agents des escales ont été dotés de tablettes, tout comme le personnel à bord. Et Jean-Marc Janaillac de donner l’exemple d’une hôtesse qui a pu, pas ce biais, solliciter une collègue fille de négociant de vins de Bordeaux pour aller discuter avec un passager passionné par le sujet.

« S’il n’y avait pas eu une hôtesse de l’air […] capable de réagir, les datas n’auraient servi à rien », explique le dirigeant, soucieux de souligner l’importance de lier le traitement de données – directement ou par le biais de l’IA – et les collaborateurs « qui savent transformer cette information dans un meilleur service au client ».

Air France cherche à transposer tous ces outils sur les canaux d’interaction par la voix.

Quant à les exploiter pour finaliser les achats, à l’image de ce que propose Icelandair, ce n’est pas encore à l’ordre du jour, bien que le paiement soit expérimenté sur WeChat. La réflexion se porte plutôt sur la mise en place d’un « metabot » qui puisse orchestrer les différents points de contact avec le client, dans une logique de transparence.

* À comparer aux 1,6 million d’abonnés de Cathay Pacific (qui a fait le choix, pour la gestion des bagages, d’un assistant virtuel interne nommé Vera), aux 1,7 million d’Iberia, aux 2,3 millions d’American Airlines, aux 3 millions de British Airways, aux 5,5 millions de Southwest Airlines, aux 8,7 millions d’Emirates… et aux 10,8 millions d’Air Asia.

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Cathay Pacific a son propre agent conversationnel.

Photo d’illustration : de gauche à droite, Florence Estra, Alexandre Croiseaux (responsable partenariats Facebook France) et Stéphanie Charlaix Meyer.

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