« Arnaque au président » : les entreprises françaises prises au piège en mode multi-canal

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Depuis trois ans, des PME et des grands comptes sont victimes d’escroquerie aux faux ordres de virement internationaux. Un fléau qui s’appuie en partie sur la veille d’info et les services numériques.

« L’arnaque au président » continue de faire des ravages parmi les entreprises françaises : de la PME aux grands comptes. Par cette expression, on parle d’escroquerie aux faux ordres de virement internationaux.

Et c’est devenu un phénomène underground : on recense 1200 plaintes d’escroquerie aux faux ordres de virement déposées en trois ans, représentant un montant de 350 millions d’euros.

400 grands groupes et 800 PME sont tombés dans le piège de filous ayant recours à des techniques multi-canaux (téléphone, fax, messagerie mail, Web) pour tromper des collaborateurs d’entreprises qui croient rendre service à leur patron et à des variations dans les modes opératoires.

Le préjudice global dépasserait les 350 millions d’euros. Et ça dure depuis au moins 2010…

Le Parisien vient de dénicher la dernière cible : l’enseigne de grande distribution Intermarché.

Des arnaqueurs se sont fait passer pour le P-DG de cette entreprise pour pousser un salarié de l’enseigne à procéder à des virements bancaires.

Plus de 15 millions d’euros ont été détournés…Une enquête est ouverte par le parquet de Paris avec l’appui de la direction centrale de la police judiciaire (DCPJ).

Le menace est prise au sérieuse par les autorités et les entreprises

A tel point que le MEDEF et la DCPJ ont signé en janvier un partenariat spécifique afin de renforcer la lutte contre « toutes les formes de fraudes et d’escroqueries d’importance au détriment du tissu économique ».

Il s’appuie sur un « échange régulier d’informations en matière de fraudes et d’escroqueries » (dans le respect des impératifs liés à la préservation du secret des affaires). Cela passe par la prévention, la sensibilisation et la mobilisation des entreprises membres du MEDEF et de ses relais dans les régions.

Dans le même acabit et à la même période, l’EPITA et l’Office central pour la répression de la grande délinquance financière (OCRGDF) ont signé un partenariat pour faire face à l’escroquerie aux faux virements.

À travers son Institut d’innovation informatique (3IE), l’école d’ingénieurs en informatique du groupe Ionis apportera son concours technique pour améliorer le suivi des infractions liées à la criminalité professionnelle ou organisée (voir photo en bas de l’article).

Un minutieux travail pour préparer le terrain

Quel est le schéma classique de « l’arnaque au Président » ? « Se faire passer pour un très haut responsable, voire le P-DG d’une entreprise, et se faire verser par les personnes habilitées, des sommes allant jusqu’à plus de 2 millions d’euros sur des comptes à l’étranger ».

Le tout sous couvert de discrétion en vue d’une opération financière ou fiscale stratégique, résume Le Figaro dans un article de novembre 2014.

L’argent ex-filtré se retrouve sur des comptes en Chine ou en Israël. Et les montant détournés peuvent donner le tournis. On parle d’1,6 million d’euros pour le cas de Michelin signalé dans le courant de l’automne dernier.

Pour y parvenir, les escrocs effectuent un minutieux travail pour préparer le terrain. De la veille d’information à travers des sources officielles comme les portails Infogreffe.fr ou le service Société.com pour récupérer des éléments précieux sur l’entreprise visée : statuts, procès-verbaux d’assemblée générale, organigrammes, comptes annuels des entreprises…

Des documents corporate qui serviront notamment à identifier les réels donneurs d’ordre en entreprise. Les réseaux sociaux comme LinkedIn serviront également à repérer les managers influents.

Du côté des escrocs, il faut ensuite bien ficeler sa requête de transfert de fonds par téléphone pour qu’elle soit crédible par la personne visée en entreprise. Un responsable d’une division d’un grand groupe ou une assistante de direction peut tomber dans le panneau par ignorance, négligence voire par peur de représailles si « l’ordre venu d’en haut » n’est pas exécuté.

« Les escrocs adressent ensuite des fax ou des mails à en-tête de l’entreprise ciblée, présentant les signatures contrefaites du P-DG et de son numéro 2 afin de valider l’ordre de virement. Et le tour est joué », synthétise Le Figaro.

Des déclinaisons sont apparues avec la migration SEPA survenue en 2014 qui a concerné toutes les entreprises (prélèvements et les virements en euro).

La police et la justice avancent parfois. Fin mars, un procès s’est ouvert par contumace à Paris, relate Le Parisien. Il concerne Gilbert Chikli, présenté comme le pionnier de « l’arnaque au président » et poursuivi par 33 banques.

Alors que le procureur a requis contre lui une peine de dix ans de prison ferme et un million d’euros d’amende, il est actuellement en fuite en Israël.

Pays dans lequel il s’est réfugié depuis 2009 après avoir été mis en examen et avoir passé quelques mois en détention provisoire…

 (Crédit photo : Shutterstock.com – Droit d’auteur : wavebreakmedia)

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