Atelier Google – Protection des données : le droit à l’oubli, sujet intarissable

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Table ronde Google – France Digitale : le droit à l’oubli s’est imposé dans un débat sur l’évolution des règles européennes sur la protection des données.

Rien qu’à l’énoncé de la table ronde, on sentait que c’était trop ambitieux. « S’unir ? L’Europe va-t-elle se doter d’un réel « Digital Single Market » ? La réglementation européenne sur la protection des données : un équilibre à trouver entre privacy et innovation. »

Dans le cadre d’un atelier organisé par France Digitale dans les locaux de Google à Paris, ces professionnels du numérique ont planché sur ce sujet mais le débat s’est très vite concentré sur « ce droit à l’oubli » qui émerge dans le droit européen après la décision de la CJUE portant sur Google Spain*. Ou plus précisément d’un droit au déférencement.

Le panel était composé d’Anton’ Maria Battesti (Policy Manager Facebook), Christiane Feral-Schul (avocat associé, ancien bâtonnier de Paris), Bertrand Girin (CEO de Reputation VIP), Marine Pouyat (responsable juridique FEVAD) et Killian Bazin (CEO de la start-up Toucan Toco).

Les intervenants sont ravis que la révision de la directive sur la protection des données personnelles datant de 1995 soit effectuée sous l’angle d’un règlement européen (a priori ce sera donc une législation unique pour l’ensemble des Etats membres sans adaptation locale).

« Il faut penser à l’Union européenne d’abord. C’est une bonne nouvelle pour les entreprises (…) La clé de l’équilibre, c’est la confiance des consommateurs et des utilisateurs », considère Marine Pouyat au nom du plus grand club français de l’e-commerce. Mais, très vite, on glisse vers le droit à l’oubli qui fait couler beaucoup d’encre.

Christiane Feral-Schul pose le débat. « Faut-il protéger l’internaute contre la tentation de se déshabiller numériquement ? » En faisant disparaître une vidéo personnelle gênante déposée sur un réseau social qui serait susceptible de devenir encombrante dans un procédure de recrutement en entreprise…

« En France, il existe un droit de l’effacement des peines » qui pourrait servir à des dirigeants d’entreprises qui sont mêlés dans des affaires d’abus de biens sociaux. « Cela n’existe pas sur Internet. »

Par conséquent, l’avocate Christiane Feral-Schul, qui réfléchit aussi à la dimension de la vie privée à l’ère numérique au sein d’une instance réunissant 13 députés et 13 personnalités qualifiées (commission de réflexion et de propositions ad hoc sur le droit et les libertés à l’âge du numérique), « plaide pour le droit à l’oubli ».

« Mais il y a l’autre versant ou chacun ré-écrit sa propre histoire pour lisser. A un moment où la mémoire s’inscrit en numérique. Qu’advient -il du devoir de mémoire ? » Comment régler le curseur ? Alors que la tentation est grande de « gommer toutes les aspérités de nos CV et de nos histoires personnelles qui peuvent déformer l’histoire », commente l’avocate. « Hors contrôle du juge, un acteur comme Google peut-il décider comment va se faire la ligne du départage ? »

Reputation VIP : « Démocratiser le droit à l’oubli »

En qualité de CEO de Reputation VIP, Bertrand Girin ne s’en cache pas : cette affaire juridique a été exploitée par Reputation VIP  en « opportunité business ». « Le fait d’avoir une législation en harmonie sur l’Europe permet de développer une plateforme commune pour traiter le droit à l’oubli dans tous les pays », explique le manager.

Avec sa start-up, il compte « démocratiser le droit à l’oubli »: effacement des données associées à la confidentialité (numéro de téléphone, situation personnelle…), usurpation d’identité, diffamation, injures... »Le domaine Facebook représente 20% des demandes de droit à l’oubli », évalue Bertrand Girin. Plus globalement, les réseaux sociaux, les blogs et les sites médias dans une moindre mesure sont concernés.

Killian Bazin (CEO de la start-up Toucan Toco dédiée à la « data intelligence ») apporte un regard décalé sur cette question. Un brin provocateur même. « Dans dix ans, les gens s’en foutront d’avoir ce type de photos. On n’a pas de recul sur les usages numériques (…) La migration de Facebook vers Snapchat est intéressante avec cette proposition d’effacement automatique. »

Un sujet qui n’est pas à prendre à la légère pour le cas des jeunes internautes, réagit Christiane Feral-Schul. « Au niveau des ados, c’est là qu’il y a le plus de drame. Une fille trop grosse qui se suicide à cause de la diffusion d’une photo sur un réseau social, c’est une réalité. La violence est plus forte avec les jeunes qu’avec les adultes. »

Pour adopter des comportements responsables sur les réseaux sociaux, il est vivement conseillé de consulter l’espace mode d’emploi des réseaux sociaux établi par la CNIL.

* Arrêt du 13 mai 2014 rendu par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) dans une affaire opposant l’Agence espagnole de protection des données (AEDP) à Google.

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De gauche à droite : Anton’ Maria Battesti (Policy Manager Facebook), Killian Bazin (CEO de la start-up Toucan Toco), Marine Pouyat (responsable juridique FEVAD), Bertrand Girin (CEO de Reputation VIP) et Christiane Feral-Schul (avocat associé, ancien bâtonnier de Paris)

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