Centrales numériques de confiance : la cocotte-minute du cloud français déborde

Régulations

Le financement de projets de cloud souverain (Numergy, Cloudwatt) suscite un tollé auprès des fournisseurs IT du secteur privé déjà installés sur ce crédo. OVH, Ikoula mais aussi IBM expriment leur désapprobation.

Le cloud souverain commence à faire des vagues dans le cloud tout court.

Au cours de la même semaine, la »centrale d’énergie numérique » du duo SFR – Bull a été dévoilé (Numergy), suivi du projet similaire liant Orange et Thalès (Cloudwatt).

Deux nouvelles sociétés dédié à l’informatique en nuage derrière laquelle la Caisse des Dépôts est impliquée dans le cadre du programme des Investissements d’avenir (anciennement dénommé projet Andromède).

L’Etat a investi 75 millions d’euros dans chacun de ces projets.

Mais l’ambiance est survoltée dans le paysage du cloud français. Certains prestataires d’envergure nationale ou internationale protestent contre ce qu’ils considèrent comme une distorsion à la concurrence.

OVH, un des plus grands acteurs dans l’hébergement de sites Web, prend un air désabusé en mettant en ligne Vaporcloud.info en guise de boutade.

Le message principal en dit long sur l’atmosphère : « Vous aussi vous en avez marre des annonces franco-françaises autour du Cloud financé par l’argent public ? Adoptez le Cloud français d’OVH.com ».

Sur le site Internet de L’Usine Nouvelle, Jules-Henri Gavetti, P-DG d’Ikoula (lui aussi spécialiste de l’hébergement), hausse également le ton.

« Il existe déjà une filière française de cloud computing avec, selon l’AFNIC, 400 acteurs, dont une vingtaine dans les services d’infrastructure. L’arrivée de Numergy et Cloudwatt menace cette filière sérieusement. »

En début d’année, alors que Numergy et Cloudwatt étaient encore dans les limbes, Alain Bénichou, Président d’IBM France, fourbissait ses armes contre ce qu’il qualifiait déjà à l’époque de « distorsion de concurrence ».

« L’Etat fait supporter des investissements technologiques par les contribuables. Ce qui lui permettra par la suite d’appliquer une baisse artificielle des prix. »

Cité dans un article des Echos en date du 31 janvier, le patron d’IBM France précisait : « Dès 2009, nous avons investi 300 millions de dollars afin de construire sur le territoire national dix ‘data centers’ dédiés à nos clients français. Nous savions que ce marché allait décoller à partir de 2012. Nous avons donc fait les investissements nécessaires, sans attendre l’Etat. »

Dans une interview ITespresso.fr diffusée le 5 septembre, Philippe Tavernier, Président de Numergy (SFR + Bull), a commencé à répondre aux détracteurs : « A mon avis, l’Etat met l’argent où il considère que c’est important. Je ne suis pas convaincu que nos amis américains ont des leçons à nous donner en la matière. Qu’ils fassent également leurs preuves avec leurs propres éléments de différenciation. »

Tout en poursuivant : « Nous sommes sur un marché de libre concurrence : le client choisira ce qui lui parait bon et approprié pour son avenir. »

Quant à Cloudwatt (Orange + Thalès), il devrait fournir davantage de précision sur son approche du cloud souverain lors d’une conférence de presse prévue début octobre.

Pour l’instant, le gouvernement n’entre pas dans la polémique.

Dans un communiqué de presse, Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, et Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l’innovation et de l’économie numérique et Louis Gallois, le nouveau commissaire général à l’Investissement, « se félicitent du lancement des deux premières centrales numériques de confiance françaises ».

Mais cela va être difficile de rester sage comme une image sur le nuage…

Crédit photo : © James Thew – Fotolia.com

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