Comment les Ovnis ont affolé le site du Cnes

Mobilité

Les internautes se sont rués sur le site du Centre national d’études
spatiales dédié aux « phénomènes aérospatiaux non identifiés ». Enquête sur la
mobilisation de l’équipe technique.

« C’est toujours terrible le succès ! ». Amin Mamode, directeur des services informatiques du Centre National d’Etudes Spatiales (Cnes), se souviendra longtemps de la folle période entre le jeudi 22 mars et le vendredi 30 mars derniers.

C’est le moment choisi par le Cnes pour annoncer officiellement la mise en ligne des archives du Geipan. Derrière ce sigle se cache le très sérieux  » Groupe d’études et d’informations sur les phénomènes aérospatiaux non identifiés « . En clair : l’équipe au sein du Cnes qui s’occupe des Ovnis. Au cours des vingt dernières années, elle a rassemblé tous les témoignages mentionnant des PAN (phénomènes aérospatiaux non identifiés) recueillis en France. Une mine d’information que le Geipan veut mettre à disposition du grand public vua Internet.

Ainsi, le 22 mars, une première série de 350 documents – certains accompagnés de croquis – est accessible en ligne. Une initiative qui attire l’attention des médias du monde : presse, télé, radio et bien sûr Internet. Les internautes, surtout des Français, des Italiens et des Américains, se ruent sur le site Cnes.fr qui sert de portail à tous les projets maison. Au lieu des 15 000 à 20 000 connexions par jour que le serveur Sun, installé dans les locaux toulousains du Cnes, gère habituellement, la machine doit soudain en traiter plus de 200 000.

Son CPU (Central Processing Unit), occupée à plus de 90%, sature dangereusement. Le site Cnes.fr ne tarde pas à s’effondrer. Mais l’adresse directe d’accès au site du Geipan (Cnes-geipan.fr) a eu le temps d’être diffusée dans le cyberespace (merci Google!). Les internautes s’y précipitent, provoquant l’effondrement d’un second serveur Sun que le Cnes utilise pour héberger les sites spécialisés de ses équipes. « Le jeudi soir, plus rien ne répondait », soupire Amin Mamode.

L’art d’expliquer la saturation des serveurs par les files d’attente de la Poste

Dix personnes vont travailler d’arrache pieds pendant plus d’une semaine pour rétablir les sites, tout en augmentant les capacités d’accueil.

Côté hardware, le Cnes passe de deux serveurs à cinq : aux deux machines initiales ont été ajoutés un serveur prêté gracieusement par Sun et deux anciens équipements du Centre national, qui, pour l’occasion, ont repris du service. Et les CPU de tous ces appareils ont été doublées. De plus, les cinq serveurs sont mis en Round Robing, une organisation des demandes de connexion qui évite les embouteillages.

« Au lieu d’attendre qu’un serveur soit saturé pour faire appel à un autre appareil, vous répartissez tout de suite les requêtes entre toutes les machines, explique Amin Mamode. C’est un peu comme dans les Postes où il y a plusieurs préposés, mais une seule file d’attente : dès qu’un guichet se libère, un client s’y rend ; la file d’attente est beaucoup plus fluide. »

Côté applications, les pages d’accueil des sites Cnes.fr et de Cnes-geipan.fr sont simplifiées. « La page d’accueil de cnes.fr, qui était très animée, a été rendue statique et certaines fonctionnalités de recherche de la première page de cnes-geipan.fr ont été désactivées », explique Amin Mamode.

Le plus long reste cependant à faire : les procédures de sécurisation et de tests, en particulier de tous les outils qui interviennent dans la chaîne Internet (Apache http Server, pour la gestion des connexions, Sitools pour l’extraction des témoignages archivés dans une base de données Oracle, etc.).

Retour à la normale progressif

Si Cnes.fr est remis en route dès vendredi 23 mars, un bref passage sur le site le mercredi 28 mars montre qu’il faut encore patienter 4 à 5 minutes avant de se connecter à Cnes-geipan.fr. Enfin, le vendredi 30 mars les trois nouvelles machines de Cnes-geipan.fr sont connectées. 24 heures de plus et leurs adresses IP font le tour de la cyberplanète.

« Aujourd’hui, nous traitons entre 40 000 et 60 000 requêtes par jour, mais nous sommes capables d’en accueillir jusqu’à 150 000, se félicite Amin Mamode. Nous allons bientôt réexaminer la configuration actuelle et revenir sans doute à deux serveurs. Si c’est le cas, nous repenserons toute notre architecture système et applicatif. »

L’intérêt pour le Geipan risque en effet de ne pas se tasser. D’ici à la fin de l’année, un millier de nouveaux documents doivent être mis en ligne.