Copie privée : les écrits après l’audiovisuel ?

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Le Sénat vient d’adopter une proposition de loi qui étendrait la rémunération perçue pour copie privée sur les supports d’enregistrement numériques aux oeuvres écrites, photographiques et à certaines réalisations plastiques. Le gouvernement n’est pas favorable à cette proposition, préférant attendre la transposition d’une directive européenne.

Alors que la « célèbre » commission Brun-Buisson se démène pour trouver des moyens de taxer le droit à copie privée sur les supports d’enregistrement numérique (voir édition du 12 janvier 2001), un nouvel élément vient se glisser dans les rouages de cette machine complexe qui tente de concilier l’inconciliable : les intérêts des auteurs, des producteurs, des industriels et en plus ceux des professionnel et des consommateurs. Il s’agit d’une proposition de loi adoptée le 17 mai par le Sénat, émanant de Danièle Pourtaud, sénateur de Paris et secrétaire de la Commission des affaires culturelles.

La proposition de loi rapportée par la membre du groupe socialiste modifie le code de la propriété intellectuelle afin que le régime de la copie privée soit étendu à toutes les oeuvres soumises au droit d’auteur. Actuellement, la rémunération perçue ne concerne que les oeuvres audiovisuelles. Il s’agit donc d’inclure aussi les écrits électroniques, les photographies, voire « certaines oeuvres plastiques ». Mais la proposition ne s’arrête pas là, elle va au-delà en proposant « une nouvelle définition des droits à remboursement de la rémunération pour copie privée ». Une exonération réclamée à cors et à cris par les professionnels (voir édition du 18 janvier 2001) qui ont visiblement été entendus. Aujourd’hui, seules « les entreprises de communication audiovisuelle ainsi que les producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes » ne versent pas la rémunération qui, rappelons-le, est là pour compenser le manque à gagner imputé à la copie pour usage personnel. Même si dans les calculs, la redevance a été « mutualisée », une majorité s’accorde à dire qu’une exonération pour les professionnels serait justifiée. Pour autant, seul un texte de loi serait susceptible d’étendre le nombre des bénéficiaires de l’exonération, ce qui dépasse les compétences de la commission Brun-Buisson.

Le gouvernement gêné aux entournures

Le gouvernement est conscient de l’importance du dossier, il l’a bien compris face au tollé suscité par les propos de Catherine Tasca rappelant que les ordinateurs étaient concernés par la redevance (voir édition du 16 janvier 2001) – signalons à ce propos que la commission Brun-Buisson discute toujours des supports intégrés. « Si le gouvernement est aussi sensible à cette question, expliquait face au Sénat le secrétaire d’Etat Michel Duffour, il ne lui paraît pas raisonnable de l’aborder de manière isolée, ni de procéder à une extension sectorielle sans étude préalable. » La ministre de la Culture vient en effet d’inaugurer un Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) (voir édition du 14 mai 2001) qui sera notamment chargé d’étudier la transposition de la directive européenne sur les droits d’auteur et droits voisins dans la société de l’information adoptée le 9 avril dernier (voir édition du 10 avril 2001). Ainsi que l’a clairement indiqué Catherine Tasca, la copie privée constituera un gros dossier pour le CSPLA. « En travaillant sur le périmètre de la copie privée, le Conseil supérieur pourrait être conduit à formuler des recommandations utiles à propos des usages professionnels », a rassuré Michel Duffour. Quant à Michel Charasse, il a tout simplement qualifié ce même Conseil de « belle fumisterie ». Une chose reste certaine : la machine est lancée.

Pour en savoir plus : La proposition de loi sur le site du Sénat