Dégroupage : les premières offres arrivent

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Le dégroupage, qui permet une concurrence entre opérateurs télécoms jusque chez l’abonné, devrait enfin être effectif dans quelques jours. Les opérateurs commencent à annoncer leurs offres. Aucun pour le moment n’offre d’accès Internet sur lignes dégroupées, mais septembre marquera bel et bien le départ d’une concurrence effrénée sur les prix, les débits, et les services entre les opérateurs. Sur des zones géographiques limitées au début.

Il aura donc fallut attendre neuf mois pour que le dégroupage soit effectif. S’il est vrai qu’officiellement France Télécom perdait son monopole en permettant à la concurrence l’accès à son réseau de proximité en janvier 2001, l’opérateur était, depuis, le seul à maîtriser l’ensemble de ses offres voix et données (voir édition du 2 janvier 2001). La rentrée devrait donner le signal des offres dégroupées. En clair, les opérateurs pourront accéder à ce que l’on appelle de manière un peu simplifiée le dernier kilomètre du réseau, celui qui aboutit à l’abonné. Au préalable, ils devront placer leur matériels dans les centraux locaux de l’opérateur historique et se brancheront alors directement sur les paires de fils de cuivre de France Télécom. Et dans cette course au premier entrant, Colt devrait arriver le premier. L’opérateur devrait lancer son offre d’ici la fin septembre dans le centre de Paris, dans près de 11 arrondissements. L’offre, selon Colt, devrait couvrir 57 % des entreprises parisiennes. Les autres acteurs ne vont pas tarder non plus à offrir leur services Internet dégroupés. Cegetel, de son côté, annonce commercialiser ses offres sur son propre réseau dès novembre 2001 pour les entreprises implantées à Paris intra-muros et dès janvier 2002 pour celles situées en région parisienne, Lyon intra-muros ainsi que Marseille intra-muros.

Le dégroupage ne séduit pas tous les opérateurs

Les investissements importants que nécessitent le dégroupage imposent aux opérateurs de ne proposer des offres dégroupées que dans des zones urbaines à forte concentration. Ainsi Easynet, qui lui aussi devrait commercialiser sous peu ses offres au coeur de Paris, ne cherchera à s’étendre qu’en Ile-de-France et dans les grandes agglomérations. « Nous n’aurons jamais la couverture de France Télécom », explique Hervé Le Roy, chef produit DSL chez Easynet. Et d’ajouter, « là où on ne pourra pas être présent, nous passerons des accords avec France Télécom ou avec un autre opérateur présent dans cette zone ». Toutefois, tous n’ont pas fait le choix du dégroupage. Cable & Wireless, pourtant positionné sur l’Internet haut débit et qui revend la solution Turbo DSL de France Télécom, n’a pas souhaité s’engager dans les offres dégroupées. « Notre stratégie n’est pas de toucher le client final. C’est un investissement lourd qui nous aurait obligé à faire le sacrifice dans d’autres domaines, alors que nous voulons nous focaliser sur les services comme les VPN, les solutions complexes tels l’hébergement ou la sécurité », explique David Brette, chef produit DSL chez Cable & Wireless. En fait, Cable & Wireless souhaite miser sur la concurrence inévitable entre les opérateurs. Tant au niveau des offres qu’au niveau des prix. Pour autant l’opérateur, qui est présent dans 70 pays, se réserve la possibilité de mettre en place des offres dégroupées dans certaines villes si l’équation économique se révèle viable.

Le dégroupage comme garantie de qualité ?

Une stratégie qui ne fait pas l’unanimité auprès des opérateurs qui vantent tous la possibilité de pouvoir offrir un service qu’ils peuvent garantir de bout en bout. Ainsi Frédéric Connault, directeur du programme DSL chez Colt, estime que les entreprises seront sensibles au fait de pouvoir traiter avec un seul opérateur qui s’engage sur des points précis comme la qualité de service. Easynet de son côté estime que le dégroupage va permettre aux opérateurs d’assumer l’entière responsabilité de leur offre sans se cacher derrière une société tierce. Hervé Le Roy juge que le dégroupage va permettre à Easynet de s’engager réellement sur des temps de latence et sur la GTR (Garantie du temps de rétablissement). « Aujourd’hui, ce dernier est de 4 heures. Nous étudions en ce moment la possibilité de le réduire encore » confie-t-il.

Au delà de la qualité de service, le dégroupage devrait permettre aux opérateurs de proposer des débits beaucoup plus importants. Les opérateurs peuvent dorénavant utiliser la technologie DSL pour accroître les capacités de la ligne téléphonique traditionnelle. Alors que le Turbo DSL se limitait à 256 Kbits/s en voie montante, le 2 Mbits/s est aujourd’hui atteint. Colt proposera ainsi des débits garantis symétriques de 128 Kbits/s à 2 Mbits/s. L’opérateur européen lancera également des services d’accès Internet asymétriques pour des débit garantis allant jusqu’à 6 Mbits/s. Easynet préfère quant à lui jouer sur la personnalisation des offres pour chaque client. Alors que Colt reste dans des offres de débits standards, Easynet propose des débits à la carte allant de 128 Kbits/s à 2 Mbits/s. Par ailleurs, chaque client pourra à tout moment évoluer vers des débits plus importants ou moindre en fonction de ses besoins journaliers.

Vers une spectaculaire baisse des prix ?

Au niveau prix, chaque opérateur reste très discret sur sa grille tarifaire. Si chacun promet une baisse tangible, il est difficile de savoir dans quel ordre de grandeur la baisse se situera. Cable & Wireless, qui devrait passer par un autre opérateur pour lancer ses propres offres, révèle qu’ils n’ont pas eu d’offre de prix précis. Toutefois l’opérateur s’attend tout de même à des baisses de 50 % sur certaines offres. Des suppositions non confirmées par Colt.

Le dégroupage permettra certes une concurrence sur le marché de l’Internet à haut débit, mais aussi sur les appels locaux. La concurrence sur les communications nationales et internationales est déjà effective depuis deux ans. L’offre dégroupée de Colt s’étendra par conséquent aussi sur la voix. Il proposera ainsi des appels locaux à 0,078 F TTC par minute. A titre de comparaison, la minute pour un appel local de France Télécom est pour le moment facturée 0,12 F TTC en heure creuse et 0,22 F TTC en heure pleine. 9 Telecom dont on attend les offres dégroupées pour le premier trimestre 2002, devrait lui aussi proposer des solutions voix et données sur ligne dégroupée sur Paris dans un premier temps, puis sur Lyon et Marseille.

France Télécom toujours omniprésent

Au vu des premières offres, les espoirs portés par le dégroupage ne sont que partiellement atteints. Certes l’Internet rapide est développé notamment par des offres symétriques avec des débits importants. Mais la concurrence ouverte tant prônée par les acteurs risque bien de rétrécir comme une peau de chagrin. Les opérateurs vont effectivement concurrencer France Télécom, mais uniquement sur les zones urbaines à forte densité. L’opérateur historique risque bien de se retrouver seul sur les zones peu peuplées. Certes Colt espère couvrir l’ensemble du territoire national d’ici la fin de l’année en Internet rapide, mais ce ne sera que du Turbo DSL. Autrement dit, un produit France Télécom.