Diffamation sur Internet : le FDI fait ses recommandations

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En cas de message diffamatoire posté sur un forum Internet, qui est responsable ? L’auteur ou l’organisateur du forum, cela dépend de l’activité du prestataire, répond le Forum des droits sur l’Internet qui propose aujourd’hui une grille de lecture des niveaux de responsabilité.

« Appliquer le régime de responsabilité en fonction de l’activité exercée par l’organisateur de forum et non en fonction de son statut. » Telle est la principale recommandation que le Forum des droits sur l’Internet (FDI) adresse aux juges. En l’état actuel, la future loi sur l’économie numérique (LEN) leur imposera en effet d’estimer la responsabilité du prestataire d’un forum Internet (hébergeur, fournisseur de services, éditeur, webmestre indépendant…) impliqué dans une plainte pour diffamation. Votée par les députés fin février 2003, la LEN proposée par Nicole Fontaine, ministre déléguée à l’Industrie, avait été l’objet de quelques amendements lors de son passage au Sénat (voir édition du 26 juin 2003). Les sénateurs avaient ainsi retenu l’avis du FDI concernant la question de la responsabilité des hébergeurs (voir édition du 10 février 2003). Le FDI avait notamment proposé d’accorder un régime de responsabilité « allégée » à certains prestataires selon leur activité (voir édition du 27 juin 2003), laissant à la justice le soin de trancher. Pour les aider dans ce travail, le FDI délivre aujourd’hui « une grille de lecture déterminant le régime applicable à chaque type de forums ». Ce document de référence a nécessité neuf mois de travail en concertation avec des experts du droit de l’Internet, des représentants d’exploitants de forums, des éditeurs en ligne et des utilisateurs.

Différents régimes de responsabilité« Le Forum des droits sur l’Internet fait valoir auprès du juge que l’activité consistant à organiser des forums de discussion recouvre des réalités parfois très différentes, ce qui rend inopportune l’application d’un régime de responsabilité unique », expliquent les auteurs de la grille de lecture. L’objectif étant de trouver un équilibre entre liberté d’expression et respect des lois. Ainsi, concernant les auteurs des messages et les modérateurs, qui par leur intervention sur le contenu lui conféreraient un caractère illicite, la règle est simple : le Forum recommande d’appliquer le régime de la responsabilité civile du droit commun (qui comprend l’atteinte au droit à l’image, le dénigrement, la contrefaçon ou la concurrence déloyale…).

En revanche, cela se complique en ce qui concerne les organisateurs de forums de discussion dont les activités peuvent relever du régime de l’édition, de l’hébergement ou de la responsabilité civile. Le FDI recommande ainsi de retenir la responsabilité éditoriale lorsque l’organisateur du forum exploite les contenus mis en ligne, que ce soit en les sélectionnant subjectivement ou en les enrichissant. Une recommandation qui s’applique naturellement aux responsables des forums dont les sujets sont eux-mêmes illicites (racisme, pédophilie, etc.). La responsabilité civile de droit commun serait engagée pour les organisateurs qui, sans opter pour une exploitation éditoriale des contenus, lanceraient des discussions « sur un sujet particulièrement sensible », ainsi que pour les prestataires qui choisiraient de ne pas dévoiler les éléments permettant d’identifier les auteurs de messages litigieux. Enfin, le régime de responsabilité « allégée » s’appliquerait aux prestataires techniques dont l’activité se limite à la fourniture d’un espace de stockage et de services.

Mieux vaut prévenir…

Si ces recommandations sont destinées aux juges afin de leur offrir un cadre de lecture précis, le FDI adresse également quelques conseils aux organisateurs de forums afin de prévenir d’éventuelles poursuites. Il recommande notamment d’afficher une charte de bonne conduite, de modérer les forums en se laissant la possibilité de supprimer un message, de permettre l’identification des intervenants, d’archiver les contenus et de déclarer l’activité auprès de la CNIL. Des conseils pleins de bon sens mais trop souvent négligés…