Difficile concurrence dans le secteur des télécoms

Mobilité

Rassemblés en colloque pendant deux jours, les opérateurs télécoms ont fait le point sur le marché des télécommunications. Comme à l’accoutumée, France Télécom est montré du doigt, mais aussi l’ART qui jouerait un double jeu en cherchant, en même temps, à garantir la concurrence mais aussi à réduire le nombre d’acteurs, notamment dans le secteur de la BLR.

Dans le cadre du forum intitulé « Colloque Economie Télécoms » organisé par Les Echos et qui s’est déroulé les 24 et 25 juin derniers, les opérateurs présents ont tenté de faire le point sur le marché des télécommunications en France. A ce titre, plusieurs opérateurs ont pris la parole. Ce colloque se déroulait dans un contexte difficile où chacun s’interroge sur son avenir au moment même où KPNQwest s’effondre et où les relations entre l’opérateur historique et les opérateurs alternatifs ne sont pas forcément au beau fixe.

François Maire, président de l’Aforst (Association Française des Opérateurs de Réseaux et Services Télécoms) évoque d’ailleurs le terme de « carnage boursier » en parlant de la situation des opérateurs qui, à de très rares exceptions près, ne dégagent pas de rentabilité nette. « Probablement avons-nous tous péché par excès d’optimisme et la multiplication des acteurs a rendu la plupart des business plans caduques » explique-t-il. 130 licences environ ont en effet été décernées dans la téléphonie fixe, ce qui, en définitive, ne permet pas de faire vivre autant d’acteurs ; du moins dans un premier temps. Le président de l’Aforst estime pourtant qu’un opérateur peut être rentable en France. « Mais tout délai, tout report dans le temps, toute manoeuvre dilatoire font le jeu de l’opérateur historique. Le temps joue contre la concurrence », précise-t-il.

Face à l’actualité de KPNQwest, du rachat de 9 Telecom… l’Aforst estime que la consolidation du marché des Télécommunications s’accélère en France depuis quelques mois. Même si elle apparaît à certains comme inéluctable, François Maire juge la situation grave. « En effet, ce mouvement appelé pudiquement ‘consolidation’ cache surtout des échecs, des faillites et des renoncements et il a de multiples effets négatifs », rappelle-t-il. Et de montrer du doigt France Télécom qui serait selon lui le principal, sinon l’unique, bénéficiaire de ce mouvement en récupérant une partie des clients des opérateurs qui disparaissent. Selon les calculs de l’Aforst, lors d’une absorption d’un opérateur par un autre, dans les 12 mois qui suivent, sur 100 clients environ la moitié restera chez le nouvel opérateur, 30 % se disperseront sur d’autres concurrents et 20 % reviendront à France Télécom.

Quand France Télécom récupère un monopole de fait

L’Aforst ne se prive d’ailleurs pas pour dénoncer l’attitude de l’opérateur historique notamment dans le haut débit. « France Télécom est en train de reconstruire un monopole de fait sur l’accès haut débit », affirme Richard Lalande, vice-président de l’Aforst et directeur général adjoint du groupe Cegetel. Il estime par ailleurs qu’« en dehors de zones de forte densité où la fibre optique ou la BLR peuvent se justifier, et de celles qui ont un réseau câblé, l’ADSL n’a pas de concurrent économique ». Il estime que pour aboutir à une concurrence ouverte et saine, il est nécessaire que France Telecom « gère son réseau d’accès comme un bien commun, qu’elle l’offre à tous, à ses propres services comme aux opérateurs alternatifs, de manière commercialement neutre et non discriminatoire. En bref, qu’elle se dégroupe elle-même, ou qu’elle soit dégroupée ».

De son côté, loin d’assumer le semi échec de la boucle locale radio, l’ART reconnaît tout de même, alors que c’est elle qui a choisi les opérateurs, « que l’existence même d’un segment de marché, je (Jean-Michel Hubert, président de l’ART, ndlr) pense à la PMR ou à la BLR, impose d’accepter, avec pragmatisme et lucidité, un nombre limité d’acteurs, sans au demeurant qu’il s’agisse nécessairement d’une situation définitive, et c’est le marché qui le dira ». L’allocution semblerait ainsi donner raison à certains qui pensent que l’ART ne ferait rien pour enrayer l’élimination de petits opérateurs au profit de grands groupes afin de redessiner le paysage de la boucle locale radio (voir édition du 18 juin 2002). D’ailleurs Jean-Michel Hubert estime que « la constitution de groupes sains et puissants favorise la viabilité d’acteurs capables de préserver et d’étendre les acquis de la concurrence ».

Richard Lalande estime pourtant nécessaire de renforcer les pouvoirs de l’ART souvent accusée, voire montrée du doigt pour son immobilisme. Jean-Michel Hubert a par ailleurs estimé que le rôle de l’ART n’était pas de réguler le monopole mais la concurrence. Toutefois, le directeur général adjoint de Cegetel juge important aussi de délimiter clairement les domaines d’activité de l’ART. La foire d’empoigne n’est pas terminée.