Et si Apple réinventait le Minitel ?

Mobilité

Une des subtilités d’Unix, c’est l’X-Window, ou la faculté d’un système d’exploitation d’être là sans y être vraiment. Si on veut porter crédit aux rumeurs de PC allégé que préparerait Apple, la firme pourrait remettre en cause le modèle traditionnel de l’ordinateur en en faisant descendre le système d’exploitation ! Et offrir une solution s’apparentant à un super-Minitel. Explications…

Thomas Lot, le responsable grand public pour Apple Europe, interrogé par LCI vendredi 9 mars, a raison : avec 5 à 10 % de progression cette année, le marché de l’ordinateur n’est pas mort. Mais son taux de progression est bien plus bas que celui qu’on a pu connaître jusqu’à il y a peu. Il faut le réinventer. Peut-être convient-il seulement de remettre le Minitel au goût du jour ? Un retour en arrière ? Pas si l’on veut bien prendre deux secondes pour réfléchir aux implications de la rumeur lancée sur le Net par Sho Fukamachi (voir édition du 13 mars 2001). En fait, le PC embarque beaucoup trop de matériel. Pour faciliter la vie des utilisateurs et toucher les derniers réfractaires aux ordinateurs, une nécessaire simplification s’impose. Un clavier, un écran et des services seraient sans conteste, bien accueillis. Or, il s’agit là du principe du Minitel, un des marchés de la télématique qui a le mieux fonctionné. Le Minitel comptait encore pour la moitié du chiffre d’affaires mondial de la télématique en 1999. Un modèle si simple qu’il pouvait être utilisé par la boulangère d’Aubervilliers, adepte de la culture du clavier et de l’écran…

Sur un PC léger, comme celui décrit par Sho Fukamachi, les ressources viennent du réseau informatique (ou de l’Internet). Seule l’interface homme/machine est importante. Or Apple sait, comme de nombreux autres acteurs, faire tourner un ordinateur à distance, en ne faisant passer sur le réseau que l’interface graphique ! Dans le monde Unix, c’est X-Window qui réalise cette opération. Le système d’exploitation reste alors sur un serveur. Quel avantage ? L’utilisateur n’a rien à faire : pas de coût d’acquisition de logiciels, pas de gestion des licences, pas de mise à jour… Allumez, ça fonctionne… La machine se connecte au serveur qui lance une session et met ses applications à disposition de l’utilisateur. La firme proposerait alors ce qu’on appelle un WOS ou Web Operating System (système d’exploitation Web).

Un clavier, un écran… et des logiciels en ASP

Si elle développait effectivement ce modèle, Apple réinventerait-elle la roue ? Oui et non. Oui, parce qu’il s’agit ni plus ni moins d’un fonctionnement client-serveur, de ceux qui sont bien maîtrisés en informatique de réseaux locaux ou en cours de maturation sur le Web. Avec son logiciel Webobjects, Apple peut même proposer un serveur d’applications (permettant un fonctionnement sur le mode ASP) (voir édition du 22 décembre 2000). Non, car derrière une telle proposition, il y a les services qui se dessinent : location d’applications, comptes divers, stockage de données… Un nouveau métier rebâti du sol au plafond. Comme ont dû le faire les sociétés de services sur Minitel. Sauf que le modèle pourrait se nourrir aussi des services existant déjà sur Internet.

Peu importe s’il voit le jour à une grande échelle (sur Internet) ou seulement sur des réseaux locaux. En fait, on s’aperçoit que la batterie de moyens dont va disposer Apple est d’un seul coup très vaste et lui permet d’être présente tous azimuts. MacOS X et ses environnements Classic, Carbon, Cocoa, Java et WebObjects, s’avère l’un des systèmes potentiellement les plus compatibles qu’on connaisse… Evidemment compatible Mac, il peut accepter des applications Unix BSD, les nouvelles applications issues de l’environnement Cocoa, les logiciels en Java et les applications Webobjects. En ne faisant tourner que le rendu de l’interface MacOS X sur un PC, la firme de Cupertino serait en mesure de revenir à un modèle simple, proche de celui du Minitel, sans son coût de fonctionnement, et lui permettant de conquérir de nouveaux utilisateurs, lassés de la lourdeur des ordinateurs. Mais, pour l’instant, tout ça n’est que conjectures…

Pour en savoir plus :

* L’interview de Thomas Lot sur LCI (en anglais)

* La solution Webobjects d’Apple (en anglais)