France Telecom dans l’ultra-haut débit

Mobilité

L’opérateur se lance dans une expérience de réseau internet à ultra haut débit: le VTHD, avec ses 800 Megabits par seconde, promet d’être le réseau du 21ème siècle.

France Telecom vient de lancer des expériences de réseau à ultra haut débit. Le projet VTHD pourrait bien être la réponse française au projet Abilene. Ce dernier, développé aux Etats-Unis, excite depuis quelques mois les imaginations sous le nom d’Internet 2.

Avec le VTHD, la France pourrait revenir au niveau des projets américains, avec une capacité annoncée de 800 Mbits par seconde jusqu’à l’abonné, l’équivalent de la transmission du contenu d’un CD-Rom en une dizaine de secondes. D’où son nom, le « Vraiment Très Haut Débit ». L’expérience que met en place France Télécom s’appuie sur son réseau de fibres optiques RING, pour Réseau Internet de Nouvelle Génération. Elle a été conçue par les techniciens du CNET, le Centre national d’études et de recherches de France Télécom.

D’ici deux mois, les premières liaisons expérimentales devraient être mises en chantier. Mais pour qui ? « Les premières applications seront à destinations de nos partenaires », nous explique Olivier Muron, responsable du projet VTHD à la direction de l’innovation de France Télécom. Une des applications les plus spectaculaires sera la réalisation par l’hôpital européen Georges Pompidou d’une intervention chirurgicale opérée à distance, avec retour de force dans l’instrument manipulé par le téléchirurgien. Les autres partenaires sont l’Institut National de Recherche en Informatique et Automatique (INRIA), les Ecoles de Télécommunications ENST, et Télévision de France (filiale de France Télécom). « Avec ce nouveau réseau, il ne faudra plus que quelques secondes pour télécharger un reportage complet », continue Olivier Muron. Mais l’ouverture de réseau RING au grand public n’est pas prévue avant trois bonnes années.

Le réseau n’est pour l’instant que franco-français, et reste cantonné aux partenaires, mais ce n’est qu’un début. « Nous sommes ouverts aux partenaires privés », précise Olivier Muron, « et nous cherchons aussi des partenaires à l’étranger, soit pour des réseaux semblables, soit pour de nouvelles applications « . Et, cette fois-ci, pas question de recréer un Minitel de l’an 2000, trop franco-français : « On s’appuie sur des normes mondiales, ouvertes et reconnues par les instances de régulation. D’ailleurs, nous participons aux travaux de l’IETF. Le tout est que chacun arrive avec ses propositions et ses expériences ». Le raccordement avec Abilene n’est donc pas exclu, de même que le projet Rodeo du réseau Renater (réseau des Université françaises) n’est pas concurrencé : « Renater est un projet de production, pas d’expérimentation, et nous les rencontrons depuis le début ».

En fait, VTHD sera un observatoire grandeur nature du comportement des protocoles de transmissions dans des fibres optiques à haut débit. Le protocole choisi est le fameux IP (pour Internet Protocol) sur WDM (pour multiplexage en longueur d’onde, un procédé qui permet d’optimiser le voyage des données dans les câbles optiques). La grande question est de savoir comment les logiciels de transport réagiront quand ils devront gérer la cohabitation entre des données aussi hétérogènes que les calculs partagés de l’INRIA, les back-up de serveurs, la vidéo haut-débit ou les réseaux privés virtuels. VTHD utilisera dans un premier temps IPv4, pour des raisons de simplicité, IPv6 n’étant pour l’instant pas à l’ordre du jour. En connexion directe sur Internet, « nous avons 40 Gbits de débit sur la dorsale », précise Olivier Muron. L’utilisateur final bénéficiera d’un raccordement Gigabit Ethernet à 800 Mbits par seconde.

Cette opération est d’autant plus intéressante que le réseau de fibre optique est déjà en place. Il n’y a plus qu’à l’équiper en matériel de transmission. Celui-ci est fourni par des constructeurs comme Cisco, Alacatel ou Lucent, « mais nous étudions aussi les propositions de start-up comme Juniper, qui se spécialisent dans les térarouteurs. » Si le réseau existait déjà, on peut se demander pourquoi un tel projet n’est pas né plus tôt. En fait, répond Olivier Muron, « nous utilisons ce réseau depuis longtemps en interne. Ce qui est nouveau, c’est notre ouverture à des partenaires. On se demandait quoi faire de toute cette bande passante. Mais nous n’avons pas l’impression d’être en retard : les térarouteurs arrivent seulement sur le marché ! »