Interopérabilité : iTunes/iPod dans le collimateur de l’Europe?

Mobilité

La commissaire européenne à la protection des consommateurs entend s’attaquer
au monopole iTunes/iPod.

La question de l’interopérabilité des fichiers musicaux commercialisés sur la plate-forme iTunes Store d’Apple revient sur le devant de la scène européenne. Dans une interview accordée au magazine allemand Focus à paraître ce lundi 12 mars 2007, la commissaire européenne en charge de la protection des consommateurs Meglena Kuneva s’en prend nommément à Apple.

« Pensez-vous qu’il soit normal qu’un CD puisse être joué sur tous les lecteurs de CD mais qu’une chanson achetée sur iTunes ne soit lisible que sur un iPod? », rapporte Reuters selon une pré-version de l’entretien à paraître. « Moi, je ne le pense pas. Quelque chose doit être fait. »

Selon un porte-parole de la Commission européenne, ces propos seraient propres à son auteur et ne font pas suite à une délibération de Bruxelles. Pour l’heure, aucune action contre Apple n’est programmée. Mais le vent semble souffler dans une mesure visant la firme de Steve Jobs à élargir le champs de l’interopérabilité des fichiers musicaux achetés sur iTunes afin de pouvoir les lire sur des appareils concurrents de l’iPod. Le couple iTunes/iPod est régulièrement crédité de plus de 70 % du marché de la musique aux Etats-Unis, et plus de 50 % en Europe.

La France montre la voie de l’interopérabilité

En France, la loi DADVSI adoptée en juillet 2006 introduit timidement la notion d’interopérabilité en laissant à une Autorité de régulation des mesures techniques (laquelle reste à créer) le soin d’exiger des éditeurs l’interopérabilité de leurs formats… à condition qu’elle en soit saisie par les professionnels du secteur (éditeur, fabricant, exploitant). Une mesure dont pourrait s’inspirer l’Europe si elle souhaite contraindre Apple à ouvrir sa technologie aux offres concurrentes.

Car l’interopérabilité ne peut passer que par la divulgation de l’archit ecture de FairPlay, le système de protection des titres d’Apple, aux autres plates-formes. Mais Apple en a-t-il les moyens, notamment en regard des contrats passés avec les maisons de disques? L’autre solution est l’abandon pur et simple des DRM (digital rights management) comme le réclament notamment les consommateurs et certaines plates-formes de diffusion comme FnacMusic ou VirginMega qui ont toutes les deux créé un catalogue de fichiers MP3 essentiellement issus des artistes de labels indépendants.

La lettre ouverte de Steve Jobs

C’est également la solution prôné par Steve Jobs en personne. Début février, le patron d’Apple s’était fendu d’une lettre ouverte à l’intention des principales maisons de disques mondiales. Mais l’idée est, pour l’heure, rejetée par l’industrie du disque. Quelques jours plus tard, à l’occasion du 3GSM de Barcelone, Edgar Bronfman, PDG de Warner Music avait réagi à la proposition de Steve Jobs en rappelant qu’il y avait  » une différence entre les concepts de DRM et d’interopérabilité ». Autrement dit, laissez les DRM en place et commercialisez votre technologie de protection auprès de la concurrence.

Seulement, il n’est pas certain que la concurrence soit intéressée par l’idée (surtout Microsoft qui, avec sa solution Zune reprend le modèle hermétique d’Appel). D’autre part, Steve Jobs avait précisé qu’en ouvrant FairPlay à des partenaires (et néanmoins concurrents), il risquait de s’exposer à des fuites technologiques et donc à casser le modèle économique de la musique protégée, y compris sur iPod. Plein de bon sens, Michael Robertson avait suggéré à Apple de vendre des fichiers MP3 sur l’iTunes Store, tout simplement. Le MP3 est le format interopérable par excellence puisque exempt de DRM et intégré à tous les lecteurs numériques. Une suggestion restée sans réponse pour le moment.