Interview Antonia McCahon – Pernod Ricard : nos priorités pour le numérique

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En qualité de Digital Accelerator Director chez Pernod Ricard (vins & spiritueux), Antonia McCahon évoque ses missions dans le cadre de la transformation numérique.

Arrivée en 2013 chez Pernod Ricard pour assurer la transformation digitale du groupe, Antonia McCahon a travaillé pendant dix ans au sein de l’agence digitale Fullsix.

Son ambition ? Inscrire le digital dans l’ADN du groupe Pernod Ricard. Quelle est la recette du cocktail digital au sein de ce groupe leader mondial dans les vins et les spiritueux ?

(Interview réalisée en septembre 2016)

ITespresso.fr : Quel était le niveau de digitalisation du groupe Pernod Ricard lors de votre arrivée ?

Antonia McCahon : Il y a trois ans, la digitalisation était, comme dans la majorité des grandes entreprises françaises, portée par la direction marketing. Cette direction avait initié de nombreux projets structurants autour, notamment, du média planning. Les autres directions métiers avaient, de par et d’autre, lancé quelques projets d’envergure variable.

Tous ces projets manquaient de synergie et l’entreprise n’avait pas de vision globale de sa digitalisation.

En 2013, Alexandre Ricard, P-DG de Pernod Ricard, a décidé de créer le poste de Digital Accelerator Director, pour donner au groupe une image résolument digitale.

En qualité d’accélérateur de la transformation digitale, mon rôle consiste donc à distiller le digital dans toute l’entreprise de façon à ce qu’il s’inscrive dans l’ADN du groupe. Nous ne devons plus penser Digital, mais être Digital.

ITespresso.fr : Comment sont élaborés les projets ?

Antonia McCahon : A Paris, l’équipe dédiée au Digital groupe dont j’ai la responsabilité, est composée de neuf collaborateurs issus du commercial du marketing, des médias, de la R&D. Chacune de nos 85 filiales possède elle-même une équipe digitale dédiée constituée de 1 à 8 personnes selon la taille de la société.

Lorsque l’équipe Digital groupe identifie un projet pertinent, elle doit s’associer à une autre filiale pour le cofinancer. Une fois le pilote achevé, celui-ci doit être testé sur plusieurs marchés pour vérifier sa viabilité.

Par ailleurs, nous avons identifié au sein de l’ensemble du groupe, 80 digital champions auprès de qui nous puisons des idées de projets digitaux.

C’est ainsi que nous avons identifié six champs d’actions prioritaires : la data, l‘e-commerce, les objets connectés, les médias, le contenu et le développement de la culture digitale des collaborateurs.

ITespresso.fr :  La data est un axe prioritaire. Comment abordez-vous le sujet ?

Antonia McCahon : Sujet phare qui impacte les ventes et le marketing, la data est utilisée à plusieurs fins.

La première concerne nos opérations de marketing programmatique qui permettent d’optimiser nos  campagnes en utilisant des algorithmes et des solutions d’automatisation des processus d’achat, de vente et de recommandation à partir de données collectées.

Bien que la technologie joue un rôle important, c’est surtout la meilleure connaissance du consommateur qui change notre marketing.

Grâce à notre Ecosystème Data nous pouvons définir nos besoins de campagnes sur tous types de médias (display, mobile, vidéo, social,…) et assurer leur mise en œuvre, leur suivi et leur optimisation en temps réel.

Notre objectif est de remplacer le marketing de masse par du marketing ciblé. La data change la lecture que nous avons de nos cibles et des canaux sur lesquels nous opérons ainsi que la manière dont nous ciblons nos consommateurs : leurs intérêts, les expériences qui peuvent les intéresser, etc.

Notre deuxième façon d’utiliser le potentiel de la data repose sur la collecte de toutes les données issues de nos sites internet, de nos réseaux sociaux, des objets connectés, de nos outils de CRM et de nos bases de données.

Nous avons par exemple lancé le World’s Best Bars, un site Web mettant en avant des bars d’exception situés à New York ou Paris et à partir duquel nous recueillons des informations sur les goûts des consommateurs et la manière dont ils vivent la convivialité.

Nous collectons aussi des informations issues de l’open data, des réseaux sociaux ou autres sites Web.

Aujourd’hui, toute cette masse de données est centralisée sur une unique plateforme. La data est devenue le fil rouge de tous nos grands chantiers, essentiellement la « route to consumer » et l’achat média.

ITespresso.fr : Vous avez été épinglé par la CNIL au sujet d’une défaillance de votre site Ricard en termes de gestion des données personnelles. Comment avez-vous géré ce problème ?

Antonia McCahon : Nous avons réagi très rapidement et nous avons réglé cette défaillance technique sous 24h. Nous avons également renforcé nos procédures de contrôle en collaboration avec nos prestataires externes.

Cet été, nous avons lancé un nouveau site qui répond aux exigences de sécurité requises.

ITespresso.fr : Comment évolue le ratio de vos ventes en ligne et en boutique?

Antonia McCahon : Les ventes via les sites de commerce en ligne sont en croissance de 25% d’une année sur l’autre pour l’industrie des vins et spiritueux, avec une part grandissante pour les ventes indirectes, via nos partenaires de la grande distribution.

Toutefois 95% de nos ventes continuent à être réalisées en boutique. Nous travaillons également avec les nouveaux acteurs qui tirent l’innovation de l’industrie des vins et spiritueux, comme Amazon par exemple.…

ITespresso.fr : Les innovations digitales proviennent souvent des start-up. Quelles sont vos relations avec ces entreprises ?

Antonia McCahon : Conscients que c’est au cœur des start-up que naissent les technologies et les business models disruptifs actuels, nous travaillons quotidiennement avec elles pour se nourrir de leur réflexion et stimuler nos équipes.

Ainsi nous identifions les besoins de nos filiales en matière d’innovation que ce soit sur le digital ou sur des prestations plus traditionnelles et nous les mettons en relation avec les startups que nous avons sélectionnées dans le monde entier.

Par ailleurs, nous travaillons aussi avec les géants du Web avec qui nous avons noué des partenariats.

L’idée est de nous inscrire dans la mouvance digitale pour répondre aux exigences et aux nouveaux usages des consommateurs ; voire les surprendre par des services digitaux très innovants.

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