Jean-Michel Planche : « En dix ans, Witbe est devenu un des leaders de la supervision »

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Le fondateur d’Oléane (revendu en 1998 à France Telecom) est patron de Witbe, une société spécialisée dans la supervision de services. Quel chemin parcouru ? Quel avis sur les lois Hadopi et Loppsi ? Interview fleuve.

ITespresso.fr : Que pensez-vous de l’état des infrastructures télécoms en France ?
JM Planche : Depuis 15 ans, j’explique que l’infrastructure est quelque chose de fondamentale, essentielle voire de noble. On me rétorquait alors que l’on avait dépensé trop d’argent pour ne favoriser que certains opérateurs et qu’il fallait désormais se tourner presque exclusivement vers les services et les contenus. A force de trop délaisser l’infrastructure et d’oublier qu’il s’agit d’une ressource rare à mettre à disposition du plus grand nombre, on écarte du champ de l’innovation la plupart des acteurs possibles. Je pense donc qu’il faut veiller jalousement à la compétitivité de nos infrastructures, à quelques règles simples, comme leur neutralité, leur symétrie et bien sûr le plus haut débit possible et pour tous. Il ne faut pas transformer des infrastructures conçues pour la communication en infrastructures de diffusion. Il faut pouvoir créer de la valeur en tout point de notre territoire et pas seulement en un seul point mieux connecté que les autres. Sans infrastructure qui permet à chacun d’être autonome, notre vie numérique, notre création, notre innovation, nos talents vont se faire « aspirer par d’autres » en dehors du champ européen. Mais les récents développements politiques autour des infrastructures me redonnent un peu d’espoir…

ITespresso.fr : Pourquoi avez-vous marqué un très fort engagement contre les lois HADOPI (anti-piratage de contenus numériques) et LOPPSI (lutte contre la cyber-délinquance) ?
JM Planche : Je suis toujours surpris de voir la justesse du questionnement de nos politiques. Mais, ensuite, le débat échappe et on ne retrouve qu’une vision partial et partielle du sujet. Au final, on peut s’inquiéter sur la réussite des moyens mis en jeu. C’est un peu comme si dans notre monde, on demandait à un entrepreneur de répondre à un problème bien posé et de trouver la meilleure solution et de la mettre en œuvre pour 10 ans. Mais cela ne marche pas ou plutôt cela ne fonctionne plus du tout comme cela. Le problème n’est jamais bien posé. Et qui plus est, on ne nous demande pas de trouver la meilleure solution, mais un compromis acceptable à mettre en œuvre le plus facilement pour un coût moindre. Et surtout … on nous demande toujours d’avoir un plan B, de ne pas trop nous enfermer dans une solution dont la marche arrière serait impossible ou le changement de route serait trop coûteux. J’aimerais que l’on prenne ces problèmes de sociétés de la même façon qu’un entrepreneur. Vous savez, un proverbe chinois dit : « Dis-le-moi et je l’oublie; Montre-le-moi et je le retiens; Implique-moi et je comprends. » Et bien j’aimerais que nous nous sentions impliqués. Car c’est la seule façon que nous soyons tous responsabilisés et que d’autres solutions puissent voir le jour. Un sujet comme l’Internet n’est fondamentalement pas régalien, il faut donc trouver des solutions de pair à pair, selon Joël de Rosnay… même si celles-ci peuvent être encadrées par la loi. Et, en l’espèce, je ne pense pas que, compte tenu de la complexité du sujet, nous puissions nous passer de la puissance de réflexion, de l’expérience du plus grand nombre.

ITespresso.fr : Un dernier mot ?
JM Planche : L’Internet est porteur de tellement de transformation qu’il serait dommage de le transformer dans un commun dénominateur bas, qui convienne à quelques uns, à leur profit et ne permette plus la libre participation de tous…et la possible responsabilisation. Dans les NTIC, nous avons vu beaucoup la lettre I (pour Information). J’aimerais que l’on n’oublie jamais que le but est le C (la Communication). Et que, surtout, il n’y a que cela qui fonctionne à long terme. Graham Bell a été le premier à nous le prouver !

ITespresso.fr répond ? Witbe nous a donné la réponse.

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