La Commission européenne accuse Windows 2000

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Le commissaire européen à la concurrence Mario Monti a annoncé l’ouverture d’une enquête sur Windows 2000, pour vérifier que le système d’exploitation ne deviendra pas l’instrument d’une nouvelle pratique anti-concurrentielle signée Microsoft.

Le système d’exploitation Windows 2000 serait-il la prochaine arme de Microsoft pour imposer ses logiciels à la planète entière ? Possible, si l’on prend à son compte les soupçons du département chargé de la concurrence au sein de la Commission européenne. Son représentant, Mario Monti, a annoncé le 9 février 2000 le déroulement d’une enquête pour vérifier si le système d’exploitation ne contenait pas des fonctions susceptibles d’avantager les applications de la firme de Redmond, par exemple en créant des problèmes d’incompatibilité ou un manque de fiabilité avec les produits d’autres marques. La Commission craint que l’éditeur n’ait placé, sur les versions station de travail et serveur de Windows 2000, des fonctions de sécurité ou d’administration qui deviennent incomplètes lorsqu’elles sont prises en charges par un logiciel concurrent. La diffusion massive du nouveau logiciel serveur de Microsoft, amplifiée par l’essor du commerce électronique, fait donc planer le risque d’une standardisation forcée pour les entreprises, soumises au bon vouloir de l’éditeur. Et pour rafraîchir les mémoires, il ne faut pas oublier qu’à l’occasion du procès anti-trust aux Etats-Unis, le juge Thomas Penfield Jackson a déclaré l’éditeur coupable d’avoir abusé de sa position dominante (voir édition du 8 novembre 1999).

Selon Mario Monti, une demande d’information a été envoyée la semaine dernière à Microsoft pour lever le doute sur certaines fonctions de Windows 2000. L’éditeur dispose de quatre semaines pour rassembler les documents nécessaires, mais il faudra certainement beaucoup plus de temps pour que les experts désignés par la Commission européen soumettent leur avis.

Si les accusations de la Commission européenne étaient vérifiées, Microsoft pourrait être contraint de modifier le système d’exploitation, voire de rappeler les versions déjà diffusées. Interrogé par l’AFP, le commissaire Mario Monti n’évoque pas encore, à ce stade, les conséquences possibles de l’enquête. Microsoft considère qu’elle ne devrait pas altérer le lancement de Windows 2000 prévu pour le 17 février 2000.

Affichant sa sérénité, l’éditeur indique même dans un communiqué que la Commission européenne lui adresse trois ou quatre fois par an des requêtes semblables à celle de la semaine dernière. « Nous sommes confiants dans le fait que la Commission conclura que Microsoft travaille en conformité avec les lois européennes », a déclaré John Franck, responsable des services juridiques de Microsoft Europe. De son côté Brad Smith, un autre responsable de Microsoft, affiche lui aussi sa confiance :« Nous avons partagé une somme importante d’informations techniques à propos de Windows 2000 avec un grand nombre de développeurs, de clients et de concurrents, bien avant que le produit ne soit commercialisé, et nous sommes confiants dans l’interopérabilité de Windows 2000 avec d’autres systèmes d’exploitation ». Une phrase finalement à double tranchant. Elle confirme tout d’abord que le code source de Windows n’est effectivement pas en source libre et que Microsoft n’a pas partagé toutes les informations techniques avec les développeurs. De plus, Brad Smith parle de compatibilité avec d’autres systèmes d’exploitation… mais pas avec d’autres logiciels destinés à fonctionner sous Windows 2000.

En fait, les ennuis de la firme avec la justice européenne ne datent pas d’hier. En 1996, le distributeur Micro Leader portait plainte, accusant le géant du logiciel d’importer en France des versions canadiennes meilleur marché de ses logiciels. Jugeant les preuves apportées insuffisantes, la Commission européenne n’a pas instruit de procès (voir édition du 17 décembre 1999). La Cour européenne, qui jugeait au contraire le dossier suffisamment crédible, semble avoir incité les commissaires européens à se pencher de plus près sur les pratiques de Microsoft…