La diffamation sur le Net est bien imprescriptible

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Le tribunal correctionnel de Paris a rendu aujourd’hui un jugement qui estime que les publications sur Internet sont « ininterrompues ». Il confirme ainsi que, contrairement aux médias « papier » et audiovisuels, le Web ne bénéficie pas du délai de prescription de 3 mois.

En 1996, des associations de lutte contre le racisme portaient plainte contre Jean-Louis Coste pour « incitation à la haine raciale ». Les textes controversés de certaines chansons de l’artiste étaient publiés sur son site Internet. En première instance, la justice considérait qu’il y avait prescription des faits. La loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse prévoit en effet que les responsables d’une publication ne peuvent être poursuivis passé un délai de 3 mois après parution : il y a prescription. Mais la Cour d’appel rendait ensuite un jugement qui considérait l’inverse : la prescription ne s’appliquerait pas pour les sites Internet car l’acte de publication serait continu. Le jugement en appel a d’ailleurs été confirmé par la Cour de cassation en mars dernier.

Mercredi 6 décembre, la 17ème chambre du tribunal de grande instance de Paris a rendu un jugement qui suit les précédentes conclusions rendues par la Cour de cassation. Cette affaire opposait Carl Lang, dirigeant du Front National, au Réseau Voltaire, une association qui milite pour la promotion des libertés et de la laïcité. Le délégué général du parti d’extrême droite portait plainte pour diffamation en visant une notice bibliographique présente sur le site Internet de l’association qui stipule notamment :  » Dévoué fanatiquement à Jean-Marie Le Pen, [Carl Lang] était partisan de la solution armée au problème Mégret. »Une diffamation sur Internet constitue une « infraction continue »

Le juge estime, comme le rapporte l’AFP, que les diffamations commises sur Internet le sont dans le cadre d’une « publication ininterrompue » et à ce titre elles constituent une « infraction continue ». Par conséquent, le jugement confirme que ces diffamations sont imprescriptibles. Pour autant, le tribunal a débouté Carl Lang et relaxé Thierry Meyssan, le dirigeant du Réseau Voltaire, en considérant qu’il n’y avait pas diffamation. Dans un communiqué, le Réseau Voltaire pose la question : « Faut-il fermer les sites Internet de presse ? » L’association estime en effet que la décision de justice « place la France en marge de l’évolution technique et du mouvement des idées » et qu’elle « empêche la fonction de mémoire et d’archivage de l’Internet. » Le communiqué précise : « Le Réseau Voltaire annonce la constitution d’un comité d’initiative pour préparer une loi visant à garantir la liberté d’expression sur le Net. »