La taxe sur les disques durs toujours au menu

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La fameuse « taxe CD-R » – le « complément de rémunération » perçu au titre de la copie privée – sera appliquée aux disques durs. La commission Brun-Buisson se penche depuis janvier sur les supports intégrés, mais sa décision n’interviendra pas avant fin mars comme prévu. D’autant qu’un recours devant le Conseil d’Etat serait en préparation?

On l’aurait presque oublié, mais le « complément de rémunération » appliqué aux CD, DVD, mini-disc et autres supports d’enregistrement numériques aura un équivalent pour les solutions de stockage intégrées, disques durs compris. La commission Brun-Buisson, composée des industriels, ayants droit et représentants des consommateurs, se réunit tous les quinze jours et tente tant bien que mal d’avancer sur le sujet. Elle a récemment auditionné Jacques Espinasse, le directeur général de TPS, venu en compagnie de son état-major pour convaincre les membres de la commission qu’il ne fallait pas appliquer de redevance aux « disques durs dédiés ». La prochaine génération de décodeurs intègrera en effet un disque dur et les chaînes n’ont pas du tout envie de voir le prix de leur matériel augmenter. Jacques Espinasse aurait ainsi insisté sur le fait que TPS finançait déjà les activités d’ayants droit en tant que diffuseur de contenus. Il aurait également bien précisé que les décodeurs seraient verrouillés, ce qui devrait restreindre les copies. La semaine prochaine, ce sera au tour de la direction de Canal Plus de venir exposer son point de vue.

La question des disques durs est toujours d’actualité

Comment calculer le montant à appliquer ? C’est un véritable casse-tête auquel se heurtent les membres de la commission présidée par Francis Brun-Buisson. Mais contrairement à ce qui avait été annoncé par Catherine Tasca, les disques durs des ordinateurs figurent bien au programme. Le gouvernement a bien cherché à calmer le jeu mais dès la première réunion suivant l’application de la redevance aux supports amovibles, Francis Brun-Buisson demandait aux membres de la commission de se pencher sur tous les disques durs (voir édition du 18 janvier 2001). Quand certains membres indiquent qu’il n’y a « rien de nouveau », que « les travaux suivent leur cours », d’autres se montrent moins respectueux du silence imposé par le président. Ainsi, on apprend par exemple que les tractations se poursuivent en dehors des réunions, auxquelles tous les membres ne sont de toute façon pas présents.

Francis Brun-Buisson suspecté de partialité

Surtout, on apprend qu’un front mené par les industriels serait sur le point de déposer un recours devant le Conseil d’Etat. Leur ambition serait ni plus ni moins de faire casser la décision de la commission publiée le 7 janvier 2001. Les opposants à la redevance appuieraient leur recours sur quatre arguments. Le premier remettrait en cause l’indépendance du président Brun-Buisson. L’information a été publiée dans le quotidien Libération : Francis Brun-Buisson était administrateur de l’association « Fonds pour la création musicale » (FCM) jusqu’en juillet 2000. Or, environ un tiers des revenus de la FCM proviendrait de la copie privée et les négociations sur les supports d’enregistrement amovibles avaient déjà débuté depuis le mois d’avril. Le deuxième point porterait sur les statistiques, les études présentées par les ayants droit n’auraient pris en compte que les consommateurs non professionnels, introduisant ainsi un biais. Tout comme les chiffres de ventes des CD-R, qui comptabilisent les supports vierges utilisés pour du piratage. Le recours pointerait sur cette contradiction, d’après la loi la redevance doit couvrir la copie privée mais pas le piratage. Enfin, en quatrième lieu viendrait la question de l’exonération des professionnels, qui requiert de légiférer pour y inclure les professions non audiovisuelles, non prises en compte actuellement.

Quoi qu’il en soit, il ne faut plus s’attendre à une décision avant la fin du mois comme Francis Brun-Buisson avait indiqué qu’il le souhaitait. La rencontre avec Canal Plus programmée pour jeudi prochain le prouve bien. Certains remarquent aussi la proximité des présidentielles, en arguant que les fins de mandat n’incitent guère aux décisions impopulaires. D’autres soulignent que les décodeurs avec disque dur ont pris du retard et ne seront vraisemblablement pas arrivés avant 2002. Avec en plus des réunions déjà programmées pour avril, si la redevance sur les disques dur est bien au menu, elle n’est pas encore là. Le feuilleton continue…

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