L’Adami suggère une redevance musicale pour les FAI

Mobilité

S’il est impossible de venir à bout des échanges illégaux de musique en ligne, pourquoi ne pas taxer ceux qui transportent ces contenus, les fournisseurs d’accès ? C’est la proposition faite par l’Adami, une société française de gestion des droits d’auteur.

Organisée par la société de gestion de droits d’auteur Adami, la quatrième édition des Rencontres européennes des artistes (à Cabourg les 27, 28 et 29 novembre 2003) a été l’occasion de relancer la question de la survie économique de l’industrie du disque face au phénomène du peer-to-peer (P2P ou échange de fichiers entre ordinateurs connectés à Internet). Le 28 novembre 2003, un atelier réunissant représentants des sociétés de gestion de droit, fournisseurs d’accès, consultants et juristes avait choisi pour thème : « Peer-to-peer et téléchargement : quel est l’intérêt des artistes ? ». Au delà du rôle que peut jouer la technologie d’échange sur la carrière commerciale des artistes, l’Adami a simplement proposé de taxer les fournisseurs d’accès afin de compenser la perte économique que subit l’industrie musicale. En France, la vente de disques aurait baissé de 13 % sur les neuf premiers mois de l’année, selon les professionnels du secteur.

Une idée assez mal reçue

Si aucun chiffre officiel n’a circulé, cette taxe pourrait être de 1 à 2 euros par abonnement Internet. Elle serait appliquée sur le même principe que les diffusions faites par les radios, libres de passer ce qu’elles veulent en payant un pourcentage prélevé sur leur chiffre d’affaires. Cependant, la proposition a peu de chance d’aboutir car l’idée a été rejetée tant par les représentants des intérêts artistiques que par l’association des fournisseurs d’accès (AFA). Pour les premiers, cela légitimerait la pratique de l’échange en ligne, aujourd’hui considérée comme de la piraterie, avec le risque de voir les revenus diminuer encore plus. De leur côté, les fournisseurs d’accès se défendent d’être des diffuseurs, se présentant comme des prestataires qui se contentent de fournir les moyens techniques qui permettent, entre autres, les échanges de fichiers MP3 litigieux.

Surtout, la taxe serait par défaut – et injustement – imposée aux utilisateurs qui n’exploitent pas les applications d’échange de fichiers, sans même évoquer les différences de capacités de téléchargement, selon la bande passante dont on bénéficie. Pourtant, avec la démocratisation du haut débit, le phénomène est tel qu’une solution pour contrer le phénomène devient urgente. Certains évoquent la mise en place par les FAI de filtres chargés d’empêcher leurs abonnés de télécharger des contenus protégés par le droit d’auteur. Mais, même si la technologie des filtres se révélait efficace, les FAI ne se montrent pas très enthousiastes à l’idée de surveiller leurs clients.

Entre prévention et répression

Reste la solution répressive, voie choisie par la RIAA (Recording Industry Association of America) aux Etats-Unis. L’association qui défend les intérêts des majors a lancé, cet été, des centaines de poursuites judiciaires à l’encontre d’utilisateurs de Kazaa et autres applications de P2P (voir notamment édition du 20 octobre 2003). Un pas que les professionnels français du disque hésitent à franchir pour le moment, préférant attendre la mise en place de la loi sur le « droit d’auteur et droit voisin dans la société de l’information » (voir édition du 13 novembre 2003), laquelle devrait légaliser la mise en place de systèmes de protection audio. On peut cependant douter de l’efficacité de cette politique car les internautes pratiquant les échanges P2P se comptent en dizaines de millions dans le monde – de quoi engorger les tribunaux pour plusieurs décennies. De plus, il est difficile de mesurer l’impact de ces poursuites sur les téléchargements illégaux (voir édition du 7 novembre 2003) et les procès poussent au développement de réseaux et technologies qui rendent l’internaute fraudeur toujours plus invisible et, donc, difficile à identifier.

Quant aux solutions de téléchargement légales et commerciales, elles peinent à s’imposer faute de simplicité d’utilisation ou… d’intérêt. Si les récentes plates-formes comme l’iTunes Music Store d’Apple (voir édition du 17 octobre 2003) ou le nouveau Napster de Roxio (voir édition du 10 octobre 2003) connaissent un joli succès outre-Atlantique, aucune date n’a été annoncée pour la commercialisation des services en Europe. L’offre d’O2D (On Demand Distribution) commercialisée en France par MSN et Tiscali souffre d’un catalogue peu exhaustif (250 000 titres). D’autant que ces plates-formes commerciales doivent encore prouver la validité de leur modèle économique.