Le grand pardon de la RIAA

Mobilité

Fermement décidée à lutter contre les échanges de fichiers musicaux, la RIAA offre l’amnistie aux internautes qui s’engageraient à détruire tous leurs titres musicaux acquis illégalement.

La RIAA (Recording Industry Association of America) s’apprête, selon la presse américaine qui s’appuie sur des sources anonymes, à proposer un programme d’amnistie en direction des internautes qui partagent, illégalement, de la musique en ligne via les logiciels d’échange de fichiers peer-to-peer (P2P). L’association de défense des intérêts de l’industrie du disque américaine s’engage à ne pas poursuivre en justice les internautes qui accepteront de supprimer définitivement les fichiers illégaux de leur ordinateur (et pas seulement de les retirer du dossier partagé). Par ailleurs, ils devront s’engager, par écrit, à ne plus échanger de fichiers MP3 (et autres formats) dans un cadre illégitime.

Seulement, cette mesure ne vise que les internautes qui ne sont pas (encore) inquiétés par la RIAA. Les 1 600 destinataires des assignations qu’aurait déjà envoyées l’association pour violation de copyright ne sont donc pas concernés par cette proposition. Le message de la RIAA est clair : mettez-vous en conformité avec la loi et vous n’aurez pas de problème, sinon… Vue ainsi, cette amnistie ressemble plus à une menace que l’association lobbyiste n’hésite apparemment plus à mettre à exécution. Récemment, une internaute, qui a souhaité cacher son identité derrière le pseudonyme « nycfashiongirl », s’est retrouvée devant les tribunaux. Elle est accusée d’avoir mis à disposition un millier de fichiers musicaux environ. La RIAA s’est notamment appuyée sur une technique de marquage des fichiers MP3 pour tracer leur parcours en ligne. Auparavant, l’association avait remporté une victoire juridique en obligeant le fournisseur d’accès (FAI) américain Verizon à lui révéler les coordonnées d’un utilisateur soupçonné de piratage. Une victoire qui prend valeur de jurisprudence aux yeux de nombreux autres FAI.

Economies de procédures

Seulement, on peut également penser que, en invitant nombre d’amateurs de P2P à abandonner leurs activités illégales, la RIAA cherche avant tout à économiser de nombreux frais de procédure judiciaire, et du temps. Pourtant, l’association avait laissé entendre qu’elle ne poursuivrait pas les « petits » pirates (voir édition du 20 août 2003), sans pour autant préciser ses critères de sélection. D’autre part, si la RIAA est probablement la plus activiste en matière de lutte contre le piratage, elle n’est pas la seule représentante de l’industrie musicale. L’internaute qui signerait son offre d’amnistie ne serait pas certain pour autant de ne jamais être poursuivi.

« Plutôt que demander à 60 millions de personnes qui partagent des fichiers musicaux de se soumettre à leur prétendu programme d’amnistie, l’industrie musicale devrait saisir cette opportunité pour rendre légal l’échange de fichiers contre une redevance raisonnable », estime pour sa part Wendy Seltzer, avocat pour l’Electronic Frontier Foundation (EFF). Ce n’est apparemment pas l’intention de la RIAA qui semble profiter du climat de terreur qu’elle a su instaurer cet été en lançant les poursuites judiciaires pour poursuivre sa lutte contre le piratage. Reste à voir si cette nouvelle stratégie portera ses fruits.