Le logiciel libre s’adapte aux besoins des entreprises

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Jusqu’à présent, une entreprise souhaitant se doter d’un outil informatique avait le choix entre intégrer un progiciel du marché ou développer un logiciel spécifique. Aujourd’hui s’ouvre à elle une autre alternative : susciter la réalisation d’un logiciel libre. C’est ce qu’a fait une PMI du secteur de l’habillement, Coramy.

Le logiciel libre peut-il conquérir les fonctions critiques de l’entreprise telles que la gestion de la production, des commandes, de la relation client, des ressources humaines ? Pour l’instant, l’offre dans ces domaines applicatifs est encore balbutiante et les déploiements significatifs en entreprise sont rares, voire inexistants.

Pourtant, à l’occasion du salon Linux Solutions 2003 a été présenté ERP5, un progiciel de gestion intégré en Open source. Plus fort : un premier déploiement industriel d’ERP5 a déjà été réalisé au sein de Coramy, une PMI de 250 personnes qui conçoit et fabrique des maillots de bain. ERP5 a été conçu par une communauté de développeurs en Europe et en Amérique du Sud autour du serveur d’applications Zope. L’initiative en revient à Jean-Paul Smets, ingénieur des Mines, membre de l’Aful (Association francophone des utilisateurs de Linux et des logiciels libres) et directeur de Nexedi, société de consulting informatique dans le domaine du logiciel libre.

De la solution propriétaire à l’Open source

A dire vrai, c’est l’entreprise Coramy elle-même qui est à l’origine d’ERP5, ainsi que l’explique Jean-Paul Smets : « Pour rester dans la course, Coramy, comme toute entreprise du secteur de l’habillement, se doit d’être capable de concevoir de plus en plus de nouveaux modèles, avec un degré de personnalisation toujours plus grand. Modèles qui sont, a contrario, produits en quantités plus faibles que par le passé. Bien évidemment, ces contraintes ne doivent pas peser sur les prix. Tout ceci entraîne une inflation des informations circulant entre Coramy et ses clients. Mais là où nombre de ses concurrents ont renforcé leur service administratif afin de traiter ces informations, entraînant des frais généraux supplémentaires et par conséquent une dégradation de leur compétitivité, Coramy a fait le choix il y a dix ans de développer lui-même ses propres outils informatiques afin d’automatiser au maximum le traitement des flux d’information. » Ce choix a été fait sous l’impulsion du directeur opérationnel, Thierry Brettnacher, ancien informaticien lui-même.

Le produit développé alors, après dix ans d’évolutions et de modifications, devient aujourd’hui difficile à manipuler. La rencontre avec Jean-Paul Smets et la lecture de son livre Logiciels libres, liberté, égalité, business ont convaincu le dirigeant de Coramy de choisir un logiciel développé sur le principe de l’Open source. Solution préférée à celle consistant à adapter un progiciel du marché et à celle, choisie il y a dix ans, du développement en interne. La question du coût plaide évidemment en faveur du logiciel libre – il faut compter 300 000 euros pour s’équiper d’un progiciel générique et 100 000 pour développer un logiciel spécifique ? mais pas seulement. Selon Jean-Paul Smets, les progiciels du marché nécessiteraient un délicat travail de paramétrage afin de les adapter aux besoins métiers de Coramy. Quant au développement spécifique, il pose, comme on l’a vu, des problèmes de maintenance et d’évolutivité, toute modification d’un processus passant par une modification du codage informatique.

PGI ou progiciel métier ?

De fait, les principales innovations technologiques apportées par ERP5 sont une réponse aux problèmes posés par les solutions alternatives. Elles consistent, en particulier, à permettre à un non-informaticien de modéliser lui-même les processus métiers – par exemple, dans le cas de Coramy, la création d’un nouveau vêtement – en un workflow paramétrable, donc facile à faire évoluer dans le temps, constitué de tâches (conception, étude technique, étude de prix, validation par le client…) associées à des règles de gestion.

On l’aura compris, ERP5 est plutôt un progiciel métier qu’à proprement parler un PGI générique. Il lui manque notamment des fonctionnalités comme la gestion comptable et financière, qui devrait lui être adjointe dans un délai de douze mois. Reste à savoir enfin si ERP5, conçu en réponse aux besoins d’une entreprise particulière, en intéressera d’autres. C’est tout le pari fait par Jean-Paul Smets.