Le Xserve passe au clustering

Mobilité

Apple a discrètement introduit une nouvelle version de son serveur 1U, baptisée « Xserve node » et destinée au clustering. Cette commercialisation s’avère bien planifiée : le marché des clusters, et du calcul hautement intensif en général, doit passer de 508 millions de dollars aujourd’hui à 2,3 milliards dans les deux années à venir.

C’est dans la journée de mardi 19 mars qu’Apple a discrètement réalisé l’introduction d’un nouveau modèle dans sa gamme de Xserve, qui en comporte désormais trois. Le Xserve node est une configuration spécifiquement destinée au marché du clustering, une formule d’assemblage de serveurs destinée au domaine des calculs hautement intensifs. Sur le principe, il s’agit de mettre en oeuvre des fermes allant de plusieurs centaines à plusieurs milliers de serveurs à bas prix, destinés à prendre en main des calculs complexes le plus rapidement possible. La machine d’Apple, qui devrait être disponible en avril, reprend les caractéristiques générales du Xserve, mais ne comporte qu’un seul disque dur de 60 Go, aucun lecteur optique, une seule carte réseau Gigabit Ethernet et une licence Mac OS X serveur, limitée à 10 clients (elle est illimitée sur le Xserve). Elle intègre deux processeurs G4 à 1,33 GHz, 256 Mo de mémoire vive DDR (extensible à 2 Go) et deux slots PCI à 66 MHz. L’ajout des processeurs et le retrait d’un certain nombre de « composants de luxe » permet à Apple de proposer le produit au même tarif que son modèle d’entrée de gamme, soit près de 2 800 dollars (qui se traduisent par un prix d’environ 3 700 euros sur l’Apple Store français). Cette tarification s’avère éloignée des prix proposés par la concurrence sur les serveurs d’entrée de gamme destinés aux clusters (Dell propose par exemple des machines de base à moins de 1 200 euros), mais la puissance développée par chaque machine s’avère supérieure et il faut monter en puissance et en prix côté PC pour trouver des performances comparables. « Apple sera toujours sous la menace tarifaire de Dell en particulier, alors tout ce qu’ils peuvent faire pour se débarrasser de pièces non nécessaires et pour abaisser leurs tarifs sera positif », a souligné l’analyste Gordon Haff, de la société de conseil en stratégies technologiques Illuminata, à nos confrères de C/Net. La maîtrise du ratio puissance/prix s’avère un facteur déterminant sur le marché de l’informatique de haute performance (HPC ? High Performance Computing), qui touche des secteurs très ciblés comme la recherche pétrolière, l’animation numérique, la conception aéronautique, les sciences de la vie, la rentabilité des compagnies aériennes ou les services financiers.

Clusters contre superordinateurs

L’arrivée de la firme sur le marché des clusters n’est pas vraiment une surprise : la rumeur couvait depuis quelques mois déjà (voir édition du 21 octobre 2002). Elle confirme toutefois l’intérêt croissant d’Apple pour l’informatique d’entreprises. Elle dispose de clients prédisposés à être intéressés par sa solution de clusters (voir édition du 21 novembre 2002). Principalement dans le domaine de la recherche sur le génome humain (dont la société Genentech), mais également sur le marché de l’animation, même si la seconde firme de Steve Jobs, Pixar, a fait le choix de machines tournant sur processeurs Intel récemment. Surtout, le choix d’Apple d’introduire maintenant une version « noeud de clusters » arrive à point nommé : ce type de configuration se révèle être la formule de plus en plus adoptée par les entreprises pour l’informatique de haute performance, alors que les superordinateurs se voient peu à peu délaissés. De plus, sur ce segment de marché qui représente actuellement 508 millions de dollars et devrait atteindre les 2,3 milliards en 2005 selon la firme IDC, 40 % des machines tournent sous une version d’Unix et 50 % sous Linux. Tandis que seuls 10 % du marché s’avèrent occupés par des versions fonctionnant sous Windows et sous Mac OS dans sa version classique.

Or le binôme Mac OS X-Xserve répond aux principaux défis du calcul massivement intensif : la formule « à géométrie variable », les protocoles de communication, les couches logicielles de gestion, la disponibilité, les outils, les entrées/sorties à haute performance, l’environnement de programmation (les objets distribués et le passage de messages), mais aussi certaines applications distribuées typiques dans les domaines scientifiques ou de l’industrie du cinéma. On notera par exemple Pooch, solution de clustering déployée par des clients d’Apple, dont la Nasa (voir édition du 19 novembre 2002). Enfin, la Pomme ne cache pas s’attendre à une augmentation du déploiement de ses solutions dans le domaine des calculs à haute performance en clusters. C’est en tout cas ce qu’avait précisé Eric Zelenka, responsable de cette branche chez Apple, à nos confrères de CRN début janvier 2003. La firme a toutefois encore fort à faire pour se bâtir une réputation, malgré des ventes en forte progression sur ce segment de marché.