Les hébergeurs français font front contre la loi sur le renseignement

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De nombreux hébergeurs français affirment leur opposition au projet de loi sur le renseignement, dénonçant la surveillance de masse et l’impact négatif sur l’activité numérique en France.

Après de nombreuses associations de défense des libertés individuelles et organisations professionnelles, des hébergeurs français viennent gonfler les rangs des opposants au projet de loi relatif au renseignement.

Une première car ce marché n’est pas structuré en syndicat. Vivement décrié, ce texte défendu par le Premier ministre étend les interceptions administratives et prévoit l’installation de boîtiers de détection (les « boîtes noires ») sur les réseaux des opérateurs, FAI et fournisseurs de services.

OVH, Gandi, Online, Ikoula, Lomaco, IDS, NBS Systems et l’Association française des hébergeurs agréés de données de santé à caractère personnel (Afhads) s’opposent à l’adoption de ce texte jugé « liberticide, anti-économique, et pour l’essentiel, inefficace par rapport à son objectif », soit la lutte contre le terrorisme. Le projet, qui fait l’objet d’une procédure accélérée, « les contraindrait à l’exil », alertent-ils.

« Imposer aux hébergeurs français d’accepter une captation en temps réel des données de connexion et la mise en place de ‘boîtes noires’ aux contours flous dans leurs infrastructures, c’est donner aux services de renseignement français un accès et une visibilité sur toutes les données transitant sur les réseaux », déclare le groupement d’hébergeurs dans un communiqué.

Or, « cet accès illimité insinuera le doute auprès des clients des hébergeurs sur l’utilisation de ces ‘boîtes noires’ et la protection de leurs données personnelles. »

Les hébergeurs doutent aussi de l’efficacité des « boîtes noires ». Selon eux, les organisations terroristes structurées sauront y échapper et les « loups solitaires » seront noyés dans la masse des informations collectées.

« Nous ne sommes pas les États-Unis, nous n’avons pas de NSA, dont les activités de surveillance opaques ont poussé nombre d’entreprises et de particuliers du monde entier à devenir clients de la France », poursuivent-ils, oubliant au passage la plainte déposée fin décembre à Paris par deux ONG à l’encontre de responsables français des services de renseignement, rappelle Silicon.fr.

OVH, Gandi, Online et consorts rappellent, enfin, qu’ils sont des acteurs majeurs de l’économie numérique du pays. Ils déclarent créer des milliers d’emplois directs et indirects, induits par le Cloud Computing, le Big Data, les objets connectés ou la ville intelligente, et investir des millions d’euros chaque année en France.

« Ces clients viennent parce qu’il n’y a pas de Patriot Act en France, que la protection des données des entreprises et des personnes est considérée comme importante. Si cela n’est plus le cas demain en raison de ces fameuses ‘boîtes noires’, il leur faudra entre 10 minutes et quelques jours pour quitter leur hébergeur français. Pour nous le résultat est sans appel : nous devrons déménager nos infrastructures, nos investissements et nos salariés là où nos clients voudront travailler avec nous », menacent les hébergeurs.

Ils demandent donc au Premier ministre, Manuel Valls, et aux parlementaires appelés à examiner le projet de loi sur le renseignement, d’abandonner le texte en l’état.

 

Crédit image : chungking – Shutterstock