La Macif dans l’ère du digital : « Bouleverser radicalement la maison »

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Entre innovation et adaptation d’organisation, la Macif a fait de la transformation numérique l’axe fort de son plan stratégique 2016-2020. Quels moyens pour quelles fins ?

« On ne peut pas prétendre, demain, servir une ambition telle [qu’annoncée] sans bouleverser radicalement la maison ».

Directeur général du groupe Macif depuis bientôt cinq ans, Jean-Marc Raby met l’accent sur l’innovation dans le cadre de son plan stratégique 2016-2020 avec un montant de 500 millions d’euros consenti.

Mais il ne fait pas de mystère non plus sur la réorganisation interne que l’assureur mutualiste orchestrera .

« On sent bien que globalement, il va y avoir des mouvements, plutôt dans les back-offices et les activités support que sur […] tout ce qui est relation client », a reconnu le dirigeant dans le cadre d’un point presse organisé ce jeudi au sein des locaux du Schoolab.

Le choix de cet accélérateur de start-up localisé dans le quartier parisien du Sentier est représentatif de la politique d’open innovation dont le groupe aux 5 millions de sociétaires a fait l’un de ses fils conducteurs.

L’ouverture se fait à plusieurs échelons. D’abord avec les clients : ils sont environ un millier de « bêtatesteurs permanents » à expérimenter les nouvelles offres digitales.

La Macif fait également jouer ses partenariats avec le monde associatif, au travers de structures comme Unis-Cité, qui a pour objectif d’organiser et de promouvoir le service civique des jeunes en France.

Des groupes de travail se sont par ailleurs constitués au sein de la Fédération française de l’assurance, où la Macif, historiquement positionnée sur les contrats automobiles, pilote celui dédié aux véhicules autonomes.

Cette thématique est l’un des cinq axes forts auxquels le groupe accorde une importance particulière en matière d’innovation technologique.

Une question se pose avec le véhicule autonome et plus généralement l’Internet des objets : dans quelle mesure cette segmentation introduit-elle un risque de « détruire l’assurance » ? La Macif ne manquera pas de réfléchir à ce sujet de prospective.

Une clientèle omnicanale

Dans la pratique, le lien avec les assurés et les prospects a déjà nettement glissé vers le canal digital : alors qu’elle enregistre en moyenne 5 millions de contacts par an en agence et 12 millions au téléphone, la Macif en a comptabilisé 26 millions par Internet en 2016… dont plus de 50 % sur smartphone.

La fréquentation des 550 agences du réseau s’en ressent : elle a baissé, ces deux dernières années, d’environ 2 %.

Il n’est pas pour autant question d’en supprimer : souhaitant « garder le contact physique avec les assurés », la Macif table sur l’établissement d’une « relation de qualité » qui se traduirait notamment par la mise en place d’un bilan annuel.

Inscrite dans une logique de parcours client omnicanal, la démarche implique une sensibilisation du personnel aux nouvelles technologies, entre autres par le biais d’un MOOC.

Une réflexion est en outre menée sur le déploiement, dans un délai d’un an, de tablettes en agences, en complément à celles qu’utilisent déjà les collaborateurs nomades.

Directeur général délégué du groupe Macif, Adrien Couret insiste sur la volonté d’accompagner les sociétaires dans cette transition. Témoin le partenariat signé avec « un acteur de la solidarité » qui touche aux problématiques d’inclusion numérique.

En toile de fond, un enjeu d’image auprès du jeune public, clientèle difficile à capter et dont la volatilité contraste avec un sociétariat globalement fidèle (4 % de churn annuel ; en légère augmentation depuis l’entrée en vigueur de la loi Hamon).

Opération start-up

Adrien Couret résume le défi sous-jacent : « développer des services qui peuvent avoir une audience nationale et par lesquels la Macif est identifiée autrement qu’un assureur ».

Cette valeur ajoutée émane en partie du monde des start-up. L’interface se fait à travers le fonds d’investissement Macif Innovation, monté l’an passé avec une enveloppe de 15 millions d’euros qui a permis de soutenir cinq jeunes pousses.

Des liens se sont créés avec d’autres fonds : NewAlpha (dont Macif est actionnaire), Swan Capital (groupe Amilton)… et Daphni, qui cherche à rapprocher les investisseurs des groupes institutionnels.

La Macif intègre parfois dans son offre les produits développés par les start-up qu’elle soutient.

llustration avec l’outil de gestion dynamique d’inventaire de CBien, ajouté dans une assurance habitation lancée l’an passé sous l’angle de la maison connectée.

La relation fonctionne parfois dans l’autre sens. C’est le cas avec Carizy (vente de véhicules d’occasion entre particuliers). La Macif intervient notamment pour l’évaluation et le suivi après-vente.

On en est parfois encore à la phase pilote, comme avec Drust et ses solutions de télématique embarquée exploitées sous le prisme de la gamification pour donner des conseils aux conducteurs.

Ou encore avec Monitorlinq et sa plate-forme d’interconnexion des équipements IoT (expérimentation sur la possibilité de maintien à domicile des personnes atteintes d’Alzheimer). Une offre concrète devrait émerger d’ici la fin de l’année.

Génération Y

Certains aspects de la réorganisation ne sont théoriquement pas perceptibles des assurés. En tête de liste, l’abandon des 11 pôles régionaux par lesquels l’activité était distribuée depuis 1987 sur le territoire français.

Depuis quelques semaines, la Macif fonctionne avec 5 pôles « interrégionaux » qui ont chacun sous leur coup un peu plus d’un million de sociétaires et qui sont censés pouvoir répondre plus rapidement aux besoins.

Trois directions ont par ailleurs été créées : l’une s’occupe de la transformation (organisation de projets) ; la deuxième, de l’expérience client ; la troisième, baptisée « digital et SI », vise à harmoniser les projets de numérisation enclenchés par les différents métiers.

On peut y ajouter la mise en place, il y a quelques mois, d’un Comité jeunes. Élaborée sur le modèle du « shadow comex » d’AccorHotels, l’instance consultative est composée de collaborateurs de moins de 35 ans. Elle fonctionne essentiellement en mode prospectif sur les problématiques digitales.

La transformation numérique, c’est aussi une « plus grande souplesse » qui induira, d’après Jean-Marc Raby, une augmentation – avec compensation –  de la durée de travail : fini, les 31 h 30 par semaine, place aux 35 heures.

La « souplesse », c’est aussi l’évolution des métiers : selon Jean-Marc Raby, la DRH du groupe estime vraisemblable que « dans quelques années, près de 50 % des gens auront une autre activité ». Il faudra préciser la portée de cette évaluation.

Photo d’illustration : de gauche à droite, Adrien Couret, Mathieu Boulay (directeur France de GoMore, société que soutient la Macif) et Jean-David Miquel (président-cofondateur de Monitorlinq).

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