Napster, la RIAA, l’expert et la justice

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Napster et l’industrie du disque étaient convoqués ce mardi 10 avril par la juge Patel. La magistrate a nommé un expert chargé d’estimer l’efficacité du filtrage, sans prendre de mesure supplémentaire. Ce même jour, Napster annonçait l’acquisition de Gigabeat, une société spécialisée dans l’indexation des titres musicaux. Les téléchargements continuent…

Napster et la Recording industry association of America (RIAA) s’affrontaient une fois de plus face à la juge Patel ce mardi 10 avril. Ainsi qu’il était prévu dans l’injonction formulée par la magistrate, Napster doit rendre compte du filtrage qu’il est obligé d’assurer (voir édition du 7 mars 2001). Or il apparaît qu’une partie des morceaux dont les maisons de disques ont fourni une liste à Napster restent toujours disponibles sur le système d’échange de fichiers. La semaine dernière, la RIAA rendait un rapport à la justice accusant Napster de ne pas satisfaire aux conditions imposées par l’injonction et demandant l’emploi d’une « technologie plus avancée » pour filtrer, ou le basculement sur un système où ne seraient échangés que les fichiers indexés (voir édition du 28 mars 2001).

« Le système aurait peut-être besoin d’être fermé »

Entre le 16 mars et le 2 avril, Napster prétend avoir bloqué plus de 1,7 million de noms de fichiers correspondant à 311 000 titres de morceaux couplés au nom de l’artiste et 142 000 variations de l’orthographe de ceux-ci. De son côté, l’avocat de la RIAA Carey Ramos rétorque que 84 % des 6 000 morceaux dont la description a été fournie à Napster à partir du 24 mars restent disponibles sur le système, tout comme 212 issus de la première plainte. « Quoi qu’ils fassent, cela ne marche pas », a-t-il conclu. « C’est honteux », a réagi la juge Patel, « avec toutes les descriptions entre vos mains, s’il reste autant d’‘unchained melody’ présentes, vous auriez mieux fait de les en retirer », a-t-elle ajouté, faisant référence à la célèbre chanson dont les caractéristiques ont été fournies à Napster pour qu’il empêche son échange, mais que l’on trouve toujours. « Le système aurait peut-être besoin d’être fermé », a-t-elle menacé. Parmi les petites phrases que l’on retiendra de la part de la magistrate, citons aussi celle-ci à l’adresse de Napster : « Vous avez créé ce monstre, débrouillez-vous. »

Pour autant la juge n’a pas pris de mesure contre Napster. Marilyn Hall Patel a par contre désigné un expert qui sera chargé de rédiger un rapport sur l’efficacité du filtrage, en collaboration à la fois avec Napster et la RIAA. Il s’agit d’A.J. « Nick » Nichols, un consultant en informatique diplômé de Stanford qui a déjà collaboré avec la justice dans le cadre du procès entre Sun et Microsoft. « Nous pensons que quand l’expert aura fourni ses conclusions techniques à la juge, elle sera satisfaite et assurée que tout ce qui peut être fait est fait », a déclaré l’avocat de Napster cité par Reuters. La juge Patel attend en effet le rapport de Nick Nichols. « Je ne modifierai pas l’injonction [avant] », a-t-elle assuré tout en avouant qu’elle avait les mains liées par la cour d’appel qui lui avait demandé de reformuler son injonction. Marilyn Hall Patel a laissé toutefois entendre que le jugement de la cour d’appel aurait peut-être besoin d’être reformulé. « Ils auraient peut-être besoin de le réexaminer à nouveau », a-t-elle déclaré, citée par le New York Times.

Gigabeat : une nouvelle méthode de filtrage ?

Toujours désireux de montrer sa bonne volonté à filtrer, Napster a annoncé le jour de l’audience qu’il achetait Gigabeat, une société avec laquelle il collabore depuis fin mars (voir édition du 26 mars 2001). Spécialisée dans l’indexation des morceaux de musique, Gigabeat proposait un moteur de recherche permettant de retrouver un titre. « Proposait », car depuis l’annonce de son rachat, son site renvoie sur celui de Napster. Alors qu’actuellement le filtrage semble uniquement basé sur le nom des fichiers et est ainsi facilement contournable, les méthodes de Gigabeat reposent aussi sur une analyse des morceaux qui permet de les classer par genre ou en fonction du rythme, etc. Des possibilités qui intéressent Napster dans l’immédiat pour son filtrage, mais aussi dans la mise en place de son système sécurisé et payant qui reste toujours prévu pour cet été (voir édition du 21 février 2001). Au sortir de l’audience, la juge n’a pas fixé de prochaine échéance. Les téléchargements continuent.