Olivier Mathiot – PriceMinister Rakuten : « Logistique et m-commerce : deux axes forts »

Marketing
olivier-mathiot-priceminister-rakuten

Le campus e-Commerce du groupe PriceMinister – Rakuten s’est déroulé hier à Paris. Interview du co-fondateur de PriceMinister en charge du marketing et de la communication.

Hier, le groupe PriceMinister-Rakuten organisait sa grande convention annuelle de l’e-commerce à Paris, en présence de Pierre Kosciusko-Morizet et Olivier Mathiot (fondateurs de PriceMinister) mais aussi de Hiroshi Mikitani, le Président fondateur de Rakuten venu du Japon.

Le groupe Internet a fait le point sur son business en France.

L’exploitation de sa place de marché des vendeurs professionnels (10 000 en l’état actuel), qui concrétise une approche BtoBtoC, représente désormais 60% du business de PriceMinister. Contre 40% il y a deux ans et demi.

Entretien avec Olivier Mathiot, qui occupe les fonctions de Directeur Marketing et Communication de PriceMinister au sein du groupe Rakuten.

(par téléphone le 16 mai 2013)

ITespresso.fr : Cela fait presque trois ans que le groupe Internet japonais Rakuten a acquis PriceMinister. Quels sont les grands changements en termes d’organisation ?

Olivier Mathiot : Tout d’abord, nous avons procédé à des recrutements. Nous sommes passés de 180 à 250 personnes en structurant les équipes de manière différente. Nous avons renforcé les pôles techniques et informatiques qui représentent désormais la moitié de l’effectif global.

Nous développons des outils de communication destinés aux marchands professionnels (e-mailing plus sophistiqué, publicité…) dans un axe BtoBtoC [en croissance de 40% chez PriceMinister, ndlr].

Une équipe spéciale a aussi été créée pour développer notre programme de fidélisation qui s’appelle les SuperPoints. Nous avons également renforcé notre pôle commercial avec des consultants e-commerce pour accompagner le business des marchands sur notre place de marché.

ITespresso.fr : Pourquoi considérez-vous désormais la logistique comme une priorité business ?

Olivier Mathiot : La logistique, il faut avouer que c’est assez nouveau pour nous. Historiquement, on avait dit que l’on en ferait jamais. On s’est un peu contredit.

Dans le domaine de l’intégration logistique, nous avons récemment acquis la société française ADS. Sa solution robotisée baptisée Cendrillon(prise de commandes à moindre coût sans erreur) nous apparaît comme la meilleure sur le marché français et elle convient autant aux gros marchands qu’aux acteurs de plus petite taille, toutes catégories de produits confondues.

D’ailleurs, elle est tellement performante qu’elle sera intégrée chez Rakuten au Japon.

La logistique constitue un maillon important pour les marchands qui ne sont pas des experts dans le domaine bien que ce soit stratégique pour satisfaire sa clientèle. Au sein de notre place de marché qui est un environnement forcément hétérogène, on tombe sur des tarifs et des délais de livraison très différents en fonction des marchands.

Lorsque nous proposons nos propres solutions de logistiques, nous y adossons une sorte de label « Expédié par PriceMinister ». Ce qui constitue une garantie supplémentaire à l’acheteur : nous assurons que le produit demandé est en stock et que le client sera livré dans quelques jours.

A l’occasion du campus Rakuten au Palais Brongniart, nous avons officialisé notre offre de prestations logistiques.

ITespresso.fr : Quels sont les autres axes de développement ?

Olivier Mathiot : Indiscutablement les synergies autour de la mobilité. Cela fait longtemps que je plaide pour le m-commerce qui a été très lent à démarrer en France. Jusqu’ici, j’avais du mal à générer une dynamique voire on me riait au nez quand j’abordais le sujet.

Maintenant, cela change : la mobilité représente globalement 10% de notre volume d’affaires passe par les devices mobiles (smartphones et tablettes). C’est vraiment considérable : c’est l’équivalent du taux de croissance du e-commerce aujourd’hui.

A la fin de l’année, le m-commerce sera probablement proche de la barre des 20%.

ITespresso.fr : Qu’est ce qui marche bien dans le business e-marchand mobile ?

Olivier Mathiot : Le taux de smartphones est beaucoup plus important qu’en tablettes mais ce sont les tablettes qui poussent le marché du m-commerce. Le taux de transformation est plus important (deux fois supérieur à celui observé sur smartphone). Ensuite, au sein de la famille smartphones entre Android et Apple, il faut distinguer les applications des sites mobiles.

Globalement, Apple reste très dominant en France. Ce n’est plus forcément le cas aux Etats-Unis, pays dans lequel Android a effectué une percée. Au Japon, on observe que les taux de transformation Android sont très bons. Traditionnellement, on avait tendance à dire qu’Apple était meilleur dans ce domaine en raison de l’expérience client plus affinée et en taux de pénétration. Mais Android rattrape Apple sur ces deux aspects.

En France, ce n’est pas le cas. Mais cela devrait s’équilibrer prochainement. Historiquement, il faut rappeler que le marché français est important pour Apple en proportion. Mais, en fournissant des terminaux bon marché, Android pourrait combler son retard très rapidement.

ITespresso.fr : Dans la concurrence entre places de marché, comment fait-on pour attirer les marchands sur PriceMinister ?

Olivier Mathiot : Nous bénéficions d’une certaine antériorité. Depuis douze ans, nous sommes nativement une place de marché. Nous maîtrisons les subtilités d’une gestion d’une place de marché en tant que tiers de confiance. L’approche de relation entre acheteurs et vendeurs est éprouvée (techniques de paiement, contrôle de la fraude et de la contrefaçon, etc.).

Secundo, nous sommes une vraie place de marché dans le sens où nous n’entrons pas en concurrence directe avec les marchands présents sur notre place de marché. Les places de marché sont souvent perçues comme des annexes de sites de commerce électronique. Ces derniers ayant une tendance à mélanger leur offre BtoC avec leur approche BtoBtoC. Du coup, la relation devient conflictuelle avec la communauté des marchands.

Enfin, nous avons adopté la culture Rakuten plus « merchand centric » que « product centric ». Le vendeur est au centre du dispositif de ce que l’on appelle l’empowerment (art d’animer sa boutique, de communiquer et de participer à la vente).

L’e-commerce, ce n’est pas seulement des rayons froids avec tous les produits. La petite touche supplémentaire, c’est le conseil avisé et le service qui va avec. On revalorise la relation clients-marchands. On s’aperçoit que le taux de transformation est meilleur quand on fidélise le vendeur et qu’on le met en avant. Mais cela nécessite des efforts supplémentaires pour le vendeur qui doit participer à l’acte de vente.

ITespresso.fr : Le BtoBtoC est devenu votre principal business. Allez-vous abandonner comme eBay les petites annonces déposées par les particuliers ?

Olivier Mathiot : eBay poursuit la vente aux enchères avec les particuliers mais il a cessé les petites annonces à prix ferme. On pense que le gros du marché se trouve du côté des professionnels. Le succès de Rakuten en est la preuve vivante (14 milliards de volumes d’affaires au Japon via la place de marché Rakuten Ichiba). Nous sommes encore loin de cette performance BtoBtoC en France par rapport à cette maturité du marché observée au Japon.

Pour autant, il existe une complémentarité avec les particuliers qui vendent. Certes, c’est notre business historique mais nous avons aussi appris à travailler avec des professionnels. Cette complémentarité permet d’élargir notre catalogue pour des produits rares. Et ces liens vendeurs particuliers – vendeurs pros sont réciproques. En face, l’acheteur n’est pas dogmatique.

Nous n’avons aucun projet d’éjecter les particuliers du site. Bien au contraire, on se dit même qu’il faudrait les remettre davantage en avant au nom d’un ré-équilibre.

ITespresso.fr : On évoque régulièrement la fin de la marque PriceMinister au profit de Rakuten. Si c’est inéluctable, quelle échéance prévoyez-vous ?

Olivier Mathiot : J’aime bien la marque PriceMinister car j’ai participé à sa création. Mais ce n’est pas un attachement sentimental. On ne peut pas faire la bascule trop vite d’un point de vue business. Parce que la marque bénéficie d’une certaine notoriété en France (90% de notoriété assistée sur la population internaute). C’est un vrai actif important.

En revanche, si on regarde cela d’un point de vue international avec notre maison-mère Rakuten, il faut une seule marque pour lutter contre des eBay ou des Amazon. La question est de savoir : quand fera-t-on la bascule ? Objectivement, je ne sais pas. Peut-être en 2014…

On augmente déjà la visibilité de la marque Rakuten à travers notre communication (« Rakuten SuperPoints », « Rakuten SuperBoutiques »…). Au fur et à mesure, on augmente donc la notoriété de Rakuten en France.

Quant au nom de domaine Rakuten.fr, le groupe Internet japonais avait pris le soin de déposer le nom de domaine avant le rachat de PriceMinister.

e-Commerce : les six grandes tendances 2013 selon Rakuten – PriceMinister
Dans son intervention au Campus Rakuten – PriceMinister, Olivier Mathiot a rappelé les 6 grandes tendances du e-commerce en 2013 selon PriceMinister-Rakuten : fidélisation (c’est le client qui est au centre), la « curation ecommerce » (proposer au consommateur ce qu’il aime d’abord), les méthodes de paiement (s’ouvrir aux transactions mobiles, NFC et sans contact), le commerce spécialisé (au-delà de la course aux prix, le service aussi est très important et compte pour les clients), la vidéo (« incontournable »), et le mobile (fin 2013, Rakuten au Japon parie sur un taux de transactions de 50% sur son site).

(Credit photo illustration : PriceMinister – Rakuten – copyright Nathalie Seroux)

Lire aussi :

Lire la biographie de l´auteur  Masquer la biographie de l´auteur