Oracle/Peoplesoft : l’onde de choc ébranle Siebel

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Si les résultats financiers de Siebel sont décevants, explique son p.-d.g., c’est en raison du climat d’incertitude créé par l’OPA surprise et hostile d’Oracle sur Peoplesoft, mettant en lumière la fragilité de ce dernier… et de bon nombre d’entreprises high-tech, dont Siebel. Fragilité qui prélude à de profonds bouleversements…

Ce n’est pas encore ce trimestre que Siebel, le leader des progiciels de gestion de la relation client ou CRM, est en mesure de prouver qu’il est, après une année 2002 difficile, sur la voie du renouveau (voir édition du 25 avril 2003). Ses résultats prévisionnels pour le trimestre clos fin juin sont en effet inférieurs à ses prévisions antérieures et à celles des analystes financiers. Son chiffre d’affaires devrait s’établir entre 330 et 334 millions de dollars, dont 110 millions provenant de la vente de licences. Or, fin avril, l’éditeur avait anticipé un chiffre d’affaires de 340 millions de dollars et, selon le consensus établi par Thomson First Call, les analystes financiers de Wall Street tablaient sur un chiffre d’affaires de 347,6 millions de dollars. En revanche, Siebel atteint ses objectifs au niveau du résultat net, avec une estimation de 2 cents par action, ce qui correspond à la fourchette basse de la prévision donnée précédemment mais reste inférieur à l’estimation des analystes financiers qui prévoyaient en moyenne 3 cents par action. Comment Siebel explique-t-il sa contre-performance ? Il invoque un climat économique difficile, aggravé par l’OPA d’Oracle sur Peoplesoft, laquelle favorise l’attentisme des entreprises. Attentisme qui vient s’ajouter aux difficultés inhérentes au secteur du CRM : la défiance des entreprises vis-à-vis d’un domaine applicatif qui les a déçues (voir édition du 24 mars 2003) ; de nouveaux comportements d’achat, axés sur des projets brefs à retour sur investissement rapide ; une tendance à privilégier le modèle locatif (voir édition du 27 juin 2003)…

Un révélateur de la fragilitéMais revenons à l’OPA d’Oracle sur Peoplesoft et à ses conséquences néfastes sur l’activité de Siebel. Il est indéniable que cette opération a surpris tous les observateurs et a mis en lumière la vulnérabilité de Peoplesoft et plus généralement de la pléthore d’entreprises high-tech qui, après les heures glorieuses de l’engouement pour la nouvelle économie, ont vu leur carnet de commandes se dégarnir et, par conséquence, leur cours de Bourse chuter, devenant des proies idéales pour des éditeurs plus solides tentés par la croissance externe. De toutes ces entreprises, Siebel est incontestablement une des plus emblématiques. Du coup, se pose la question de son éventuel rachat par un prédateur, dans le cadre d’une OPA amicale ou non, et s’explique l’attentisme des entreprises, inquiètes de la pérennité de leurs investissements. Au-delà du cas de Siebel, ne serait-on pas à la veille d’une période d’acquisitions tous azimuts ? Un article récent du New York Times évoque ce scénario, qui s’étaye sur les confidences de banquiers américains, lesquels cumulent des rendez-vous avec des entreprises informatiques en vue de financer des acquisitions.

Le calme avant la tempêteMais l’initiative de Larry Ellison vient juste catalyser un phénomène qui semblait de toute façon inexorable : la conjonction d’une part de la chute du cours de Bourse des valeurs high-tech qui semblent bien avoir atteint leur niveau plancher, et d’autre part de la baisse des taux d’intérêt, facilitant la recherche de capitaux, plaide en effet pour une consolidation du secteur. Le New York Times estime que ce sont les poids lourds de l’informatique ? IBM, Microsoft, Cisco… – qui seront les plus actifs dans ce processus, du fait de leurs moyens financiers considérables, et parce que la croissance externe est le plus sûr moyen de se doter rapidement de technologies qui leur fait défaut et ainsi de s’ouvrir les portes de nouveaux marchés. Et de citer l’exemple de Sun Microsytems, annonçant fin juin le rachat de Pixo, petite société spécialiste de l’affichage de contenu sur les terminaux mobiles. Mais, comme le montre l’OPA d’Oracle, le principal secteur particulièrement propice à un vaste mouvement de concentration reste celui des logiciels de gestion, caractérisé par une offre pléthorique… Si Oracle, et avant lui Peoplesoft, a lancé le mouvement, il ne devrait pas trouver sa pleine mesure avant la fin de cette année ou début 2004, les groupes high-tech étant en ce moment en phase d’élaboration de leur stratégie d’acquisition.