Ouverture du .fr : les bureaux d’enregistrement affinent leurs offres

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Les prestataires de services Internet s’organisent pour convertir les Français au .fr. Mais des dérives risquent de surgir avec la pré-réservation.

(Article modifié le 20/06/06) Il est grand temps que la France ouvre le .fr aux particuliers car nous connaissons un certain retard dans ce domaine. Pour ce bond prévu le 20 juin prochain à partir de 9h00, l’ Association française pour le nommage Internet en coopération (AFNIC), en charge de la gestion du nom de domaine en .fr, a établi une procédure simplifiée d’enregistrement (voir interview du 21 mars 2006). Actuellement, elle recense 440 000 noms de domaine en .fr en circulation, avec des dépôts essentiellement en provenance des entreprises. Côté Royaume-Uni, on recense de noms de domaine avec l’extension nationale « .co.uk ». L’Allemagne est championnne en la matière : 10 millions de noms de domaine en .de [et non en .fr comme précédemment indiqué, NDLR], à 80% déposés par des particuliers.

L’ouverture du .fr au grand public, reposant sur la règle du « premier arrivé, premier servi », est perçue comme une bonne opportunité de business pour les bureaux d’enregistrement de noms de domaine (registrars). La plupart d’entre eux ont monté des offres spéciales afin de pousser les Français à acquérir une identité virtuelle. Voire les inciter à adopter une offre packagée avec un nom de domaine, des adresses e-mail et un espace d’hébergement pour exploiter un site Web ou un blog.

Spécialiste de l’hébergement et des services à prix discount, Amen va proposer l’acquisition d’un nom de domaine en .fr au tarif de 4,74 euros toutes taxes comprises par an, applicable jusqu’au 14 juillet. Plus cher, le groupe d’hébergement européen Active 24, présent sur le marché français à la suite du rachat de Virtual Internet en 2004, propose de réserver un nom de domaine dans le cadre d’un pack de services pour le prix de 6,77 euros TTC par mois (hors frais d’installation).

D’autres prestataires préfèrent communiquer de manière décalée en annonçant le .fr gratuit?mais emballé dans un package payant. Ainsi, Strato, prestataire d’hébergement de sites Web et de services Internet d’origine allemande, vient de poser ses valises en France (voir édition du 21 février 2006). Il espère que le .fr aura plus de succès que le .eu (voir édition du 7 avril 2006). Effectivement, avec 60 000 enregistrements en .eu (données mi-avril), la France est en sixième position dans le tableau des pays les plus actifs pour le démarrage de l’extension européenne.

A l’occasion du démarrage de ses activités dans l’Hexagone, Strato a déployé cinq packages destinés aux particuliers et aux entreprises. Pour les débutants, le pack Strato EasyWeb suffit largement. Pour 0,89 euro HT par mois (1,67 euro TTC), le client dispose d’un nom de domaine en .fr, de 200 Mo d’espace Web et de 50 comptes e-mails. « Nous allons lancer une offre à bas prix combinant un weblog avec un .fr », a révélé Damian Schmidt, CEO de Strato qui avait effectué une visite à Paris fin mai dans les locaux de Vnunet. Cette formule s’appuie sur la plate-forme open source d’édition de blogs WordPress.

De son côté, Gandi a retenu une approche similaire : en collant le plus près possible à l’événement de l’ouverture du .fr, il va lancer Gandiblog, un service de blog hébergé, basé sur la technologie open source Dotclear 2. Chaque client pourra en bénéficier gratuitement avec l’achat de son nom de domaine, assure le prestataire français d’hébergement et de services Internet.

Le système de pré-réservation, une usine à gaz ?

Pour ne pas rater le coche, les spécialistes de l’hébergement discount (OVH, 1&1, Amen?) ont mis en place un système de pré-commande des noms de domaine pour les particuliers. La technique est simple : réservez dès maintenant votre nom de domaine et votre prestataire se charge de l’enregister en votre nom dès que le feu vert est donné (c’est à dire à partir de mardi prochain). En attendant la libéralisation du .fr, le prestataire garde ce .fr sous sa tutelle puis effectue une bascule de propriété intellectuelle du nom de domaine vers le particulier lorsque le robinet de l’Afnic est ouvert (voir encadré ci-dessous).

Un système qui connaît ses limites, selon Stephan Ramoin, PDG de Gandi, qui a refusé d’instaurer un dispositif de ce type pour son propre compte. « C’est une usine à gaz dangereuse pour les clients, les ayants droit et les bureaux d’enregistrement. », considère-t-il. Notamment sur le volet de la validation manuelle des noms de domaine déposés. « Ces procédures de pré-réservation sont automatisées. Le nom de domaine requis est toujours accepté sauf s’il est déjà pris », explique Stephan Ramoin. Une technique trop lisse qui peut touner à la dérive pour deux raisons, avance-t-il : l’absence de validation manuelle des dépôts et la vérification a priori sur les marques et les autres éléments de propriété intellectuelle pour éviter les litiges avec un ayant droit, qui se sent lésé par le dépôt d’un nom de domaine.

Le responsable de Gandi connaît bien cette problématique de pré-réservation en .fr à destination des particuliers. Il avait mis en place ce type de dispositif pour le compte de Lycos il y a deux ans. Toutefois, des filtres avaient été instaurés, comme un contrôle manuel des demandes afin de canaliser le flux. Lycos s’est appuyé sur United Domain, un prestataire spécialisé dans l’enregistrement des noms de domaine qui est entré dans le giron du groupe en janvier 2004.

A ce jour, le portail Internet continue d’exploiter ce service mais il ne lui reste plus que quelques jours à vivre, compte tenu de l’évolution des schémas d’enregistrement du .fr. « Nous ne souhaitons pas donner de chiffres précis sur ses ventes de .fr, mais il est possible de dire que la moitié des ventes totales ont été faîtes par des particuliers », déclare un porte-parole du portail. Lycos compte d’ailleurs profiter de la libéralisation du .fr pour convertir ses bloggeurs de son service Jubiiblog (voir édition du 15 décembre 2005) en adeptes du .fr.

Ouverture progressive des vannes du .fr
Pour éviter l’afflux le premier jour de l’ouverture du .fr au grand public, l’Afnic a mis en place une procédure spécifique pour la première vague de dépôts de noms de domaine. A partir du 16 juin, elle suspendra tout enregistrement de noms de domaine en .fr, y compris pour les entreprises. Le 20 juin, à 9h00, l’Afnic ouvre les vannes. Mais en acceptant uniquement les demandes d’enregistrement pour les noms de domaine commençant par un chiffre ou par les lettres A ou B. Le 21 juin, le cercle est élargi aux noms de domaine commençant par les lettres comprises entre C et F. Le mêm schéma se répètera pour l’ensemble des lettres de l’alphabet jusqu’au 23 juin. A partir du 24 juin, c’est le retour à la normale. Les demandes d’enregistrement suivent la procédure habituelle du « premier arrivé, premier servi », sans distinction de lettres.


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