Quel avenir pour l’industrie de la musique numérique ?

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Tribune : Jérôme Giachino, le P-DG de Starzik, site indépendant de téléchargement légal en Europe, revient sur l’état du marché, l’état de l’industrie de la musique et sur la place de l’industrie de la musique numérique afin de dessiner le marché de demain.

Qui se cache derrière l’industrie des œuvres musicales ? Comment fonctionne-t-elle ? Quelles sont ses atouts ? Ses faiblesses ? Y’a t-il un avenir pour ces entreprises culturelles qui essaient, par leur passion, de faire cohabiter des mondes diamétralement opposés : le capitalisme et la culture…

Explication du marché de la musique…

La musique est bien évidemment un produit unique qui parle, fait frissonner, émeut… Pourquoi ? Pour les paroles, les rythmes, les sonorités, le dynamisme, pour le physique de l’interprète, les accords… C’est finalement un doux mélange de tous ces éléments qui font que la musique nous fait vibrer, pleurer, chanter, danser…

Ces artistes et ces musiciens donnent tous un morceau d’eux même dans la musique qu’ils proposent. En effet, le système de l’industrie du disque repose sur le principe fondamental que les succès financent les non succès, les flops de certains artistes qui demandent du temps à se révéler ou à trouver son public. Quelque part quand on achète un album aujourd’hui, on paie aussi pour les albums qui n’ont pas réussi.

C’est l’une des erreurs de l’industrie du disque de n’avoir pas su valoriser la musique en montrant les coulisses, sa conception, les hommes derrière… des albums trop chers… Mea culpa.

… Et d’un coût qui ne réside pas dans le support physique mais bel et bien dans la création de l’œuvre musicale

Dans une musique, il y a un travail conséquent d’homme et de femme de talent : paroliers, musiciens, arrangeur, interprète, manager, producteur, studio, techniciens du son… Je profite d’ailleurs de cette tribune pour leur rendre hommage. Et tout ce travail, toute cette sensibilité contenue dans 0,99€ et on voudrait nous faire croire que c’est encore trop cher car il n’y a plus de support physique. Que les maisons de disques peuvent dupliquer à l’infini. Donc il faudrait proposer toute la musique gratuitement au nom de la culture universelle !

Je pense sincèrement, et sans démagogie, que la musique est arrivée à un prix acceptable tant pour le consommateur que pour l’industrie. D’ailleurs, on peut toujours aujourd’hui découvrir de nouvelles musiques gratuitement sans débourser un centime via les multiples et nombreuse Web radios. Par contre, il faut accepter de ne pas pouvoir écouter ce que l’on veut quand on veut et en plus gratuitement.

L’état des lieux de la musique numérique sur le marché de la musique

Le marché de la musique en France en 2009 représente environ 750 millions d’euros, et celui de la musique numérique génère 76 millions d’euros, soit seulement 10% du marché. C’est très peu quand on sait qu’il représente 40% aux US et est 3 fois plus important en Angleterre !

Mais attention, ce n’est pas que les Français ne téléchargent pas. En effet, on comptabilise 1 milliard de téléchargements illégaux… Ce qui n’est pas normal, car les artistes se donnent du mal pour réaliser leurs œuvres et tout travail mérite salaire.

Cependant, il ne faut pas stigmatiser les internautes car par oubli, par omission consenti, par facilité, on offre un accès facile à des sites illégaux, sans fournir la possibilité d’accéder à des sites légaux identifiés (campagnes de pub, labellisation…), du streaming gratuit à la demande sans dégradation que l’on peut facilement récupérer avec des logiciels basiques…

L’avenir de l’industrie de la musique numérique

Il ne faut pas stigmatiser les pirates et ceux qui téléchargent illégalement, mais leur faire comprendre l’industrie, son fonctionnement où l’on paie le côté aléatoire du succès ou du non succès d’une œuvre.

Il faut prendre nos responsabilités pour sauver la création (en 2009, les maisons de disques ont rendu pour la première fois plus de contrats d’artistes que signés). On s’aperçoit aujourd’hui d’appauvrissement de la création… Le crowdsourcing est une bonne façon de permettre à un artiste de trouver son public ou d’arriver à maturité sans forcément l’aide d’un maison de production, mais ce ne sera pas suffisant.

La solution : payer le juste prix pour ce que l’on consomme et participer à la construction d’un nouveau modèle enclin à investir et à développer de nouveaux services :
–    Le freemium, modèle économique associant une offre gratuite en libre accès et une offre « Premium » haut de gamme en accès payant,

–    le Cloud, accessible partout… La musique sera un mélange entre streaming et download, mais avec une part de moins en moins importante dans le on demand. On va revenir au conseil.

–    La carte musique pour promouvoir les offres légales de téléchargement, pour inciter à découvrir ces offres.

Je reviens sur cette carte si décriée… En effet, en plus d’être une formidable initiative pour pousser les jeunes et leurs parents vers le téléchargement légal, cette carte représente un moteur d’embauche pour l’industrie de la musique. Pour notre part, nous nous engageons à embaucher une personne en CDI pour 10 000 cartes.

La musique a traversé bien des tempêtes et il est nécessaire de finir sur une note optimiste.

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