Quelle place pour Apple sur le marché actuel ?

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Les commentaires intrusifs de Michael Dell et de quelques critiques sur l’avenir de la Pomme méritent qu’on s’arrête un instant sur la place d’Apple sur le marché en ce moment. La firme est loin de son objectif de 10 % de parts de marché. Peut-il y avoir inversion de tendance ?

« Le Macintosh est devenu le Betamax de l’informatique. Betamax était meilleur [que le VHS, Ndlr], mais comme ses parts de marché ont décliné, le nombre de marques a décliné, le nombre de titres disponibles en Betamax a décliné, le nombre de loueurs de cassettes Betamax a décliné et il devint même difficile d’acheter des cassettes vierges. La même chose est en train d’arriver au Mac ». Ces mots durs sont de Dan Knight, le cerveau derrière le site Low End Mac, spécialisé dans les informations concernant les anciens produits d’Apple, les vieux Macintosh qui ne sont plus en production. Une vision défaitiste ? Certes, mais qui abonde dans le sens de ce que Michael Dell semble lui aussi penser ; ou tout du moins ce qu’il semble vouloir faire penser (voir édition du 9 avril 2001).

10 % de parts de marché, un seuil fatidique

La logique du marché, des chiffres, des ratios et des statistiques veut qu’en dessous de 10 % de parts de marché, un produit ou un service soit peu connu voire inconnu de la majorité. Le seuil de 10 % n’est pas pris par hasard : il signifie qu’une personne sur 10 fait partie des clients. Il implique également que le reste de la population a de grandes chances d’avoir connaissance de quelqu’un faisant partie de ces 10 % ! Apple n’y est pas. Et les réflexions auxquels les utilisateurs de Mac font face aujourd’hui sont du type : « Ah, ça existe encore » ou « mais, ils n’ont pas été rachetés par Microsoft ? » Il reste du travail…

Heureusement pour Apple, la tendance que suit la firme va vers une bien meilleure disposition, capable de modifier à terme sa position sur le marché. Cette évolution, si elle n’est pas immédiate, sera due au mouvement qu’elle est en train d’initier avec son nouveau système Unix. Pourquoi ? Parce qu’il répond à une demande multiforme : les développeurs du monde Unix n’ont jamais franchi les portes du monde Mac en raison du côté irrationnel du portage de leurs logiciels sur Mac OS. Mais X change cela de fond en comble : la recompilation des programmes réalisés sous Unix ne demande en fait que quelques heures à quelques jours de travail dans bon nombre de cas. L’effort de portage est donc restreint comparativement au passage à Windows qui nécessite des équipes pendant souvent plusieurs mois. Pour ce qui est donc de l’effort logiciel, les sociétés proposant déjà de l’Unix ont toutes les raisons de vouloir qu’une version de leurs applications tourne sous X (voir édition du 7 novembre 2000).

Eviter les doubles développements dans les relations client/serveur

L’autre grand enjeu consiste dans le rapport client-serveur : observez bien le fonctionnement des grandes entreprises ou de toutes les organisations qui font tourner des applications industrielles ou qui demandent un système robuste? Leurs serveurs tournent sous Unix, tandis que leurs terminaux fonctionnent sous Windows. Double développement ! Multiplication des coûts, questions de compatibilité, double équipes d’assistance… L’arrivée de Mac OS X change les données : pour un coût de développement réduit, le binôme client-serveur devient un modèle cohérent.

Mais l’inflexion apportée par l’X ne s’arrête pas là : la firme est désormais en mesure de fournir des serveurs multiprocesseurs très performants à des coûts bien moins élevés que ceux des serveurs Unix actuels… Sans parler des prochaines puces qui pourraient être multinoyaux pour un coût moins élevé que plusieurs processeurs (voir édition du 11 avril 2001). De quoi induire des acquisitions dans les PME et PMI, mais aussi, comme le fait remarquer le site d’Apple, pour les activités scientifiques aux besoins importants en calculs, comme les programmes de décryptage du génome humain, ou les calculs intensifs dans des secteurs de pointe. On comprend mieux le coup que vient de jouer Apple : s’appuyer sur sa base de fidèles d’un côté et sur les attentes de la base Unix installée de l’autre. Deux mondes qui ne pouvaient pas se rencontrer viennent de le faire. De quoi faire peur aux autres constructeurs. Michael Dell n’est pas dupe : sur le marché de l’éducation d’abord, puis dans les entreprises à mesure que Apple fera savoir que son système n’est plus aussi propriétaire qu’il l’était, il va devoir se battre pour continuer à imposer des doubles développements aux administrateurs des établissements dont les grands progiciels tournent sous Unix…