Rencontres d’Autrans : le haut débit pour tous

Mobilité

Parmi les nombreux ateliers et conférences organisés aux 5èmes Rencontres de l’Internet Society, les participants ont longuement abordé l’Internet haut débit, thème principal de cette manifestation. Si l’Internet rapide est inégalement réparti sur l’Hexagone, son développement passe par une volonté collective et une mobilisation générale des différents acteurs.

Organisées par l’Isoc-France, les 5èmes Rencontres de l’Internet Society qui se déroulaient à Autrans (Vercors) du 11 au 13 janvier 2001, ont réuni plus de 400 personnes. Soit « presque deux fois plus de participants que l’année passée », précise Pierre Lemoine, délégué général du chapitre français de l’Isoc. « Le groupe de base constitué des gens qui font partie de la gouvernance de l’Internet s’est élargi aux collectivités locales, aux associations, aux universitaires, entreprises, opérateurs, bref, à ceux qui vont désormais faire l’Internet », explique le coordinateur. Il faut dire que le thème était porteur nbsp;: « l’Internet rapide pour tous ». Autrement dit, la connexion haut débit grand public. Outre le câble (qui dépend de la volonté d’un opérateur à gérer un réseau local), l’ADSL et, bientôt, la boucle locale radio, sont quasiment les seuls moyens d’accéder au haut débit. « Les boucles locales radio ne sont pas destinées aux agglomérations de moins de 50 000 habitants, voire 20 000 un peu plus tard, explique Bruno Oudet, président d’honneur de l’Isoc-France, « et en attendant, France Télécom pousse l’ADSL mais pas sur tous les territoires ». Pour cause, on le sait, des « derniers kilomètres qui coûtent le plus cher ». C’était tout l’enjeu de la rencontre avec France Télécom représenté par Jean-Jacques Damlamian qui a annoncé que 10 à 15 millions de Français seraient exclus du haut débit, c’est-à-dire les agglomérations de moins de 15 000 habitants.

Un enjeu financier et politique« C’est tout le paradoxe du haut débit qui permet de désenclaver une région, d’offrir des services spécifiques, de donner un second souffle », analyse Bruno Oudet, « et ce sont justement les régions qui en ont le plus besoin qui n’y auront pas droit, dans un premier temps. » Comme le faisait remarquer un participant, maire d’une petite commune, feignant de retourner à son « miel » et ses « chèvres » : « La société de l’information tant vantée, ce n’est visiblement pas pour moi. » Des expériences comme celles de Castres le prouvent. En installant, pour 12 millions de francs, sa propre boucle locale en fibre optique (34 km à 155 Mbit/s), Castres a ainsi évité le déménagement des laboratoires Pierre Fabre et a attiré de nouvelles entreprises. « Il ne faut pas attendre que l’opérateur vienne installer son réseau », clame le président d’honneur, « mais cela dépend d’une véritable volonté collective. » Bref, l’enjeu n’est pas uniquement financier. Il est aussi politique et tient de la mobilisation générale. D’où l’intérêt des Rencontres où opérateurs dialoguent avec les représentant des usagers. « Les participants sont des démultiplicateurs d’idées, lesquelles seront évoquées à l’occasion des débats qui animent les conseils (généraux, régionaux ou autres) souvent à l’origine de nouvelles politiques de développement », soutient Pierre Lemoine.

Si le haut débit pour tout le monde passe par une volonté collective, Bruno Oudet souhaite simplement sa standardisation à tout le territoire d’ici dix ans « afin d’utiliser le réseau aussi simplement qu’on allume la télévision aujourd’hui ». On en est encore loin. Selon l’ART, 96 % des internautes utilisent le modem « traditionnel » (RTC) pour se connecter au réseau mondial. Au moins, sur le haut débit, la France n’est pas en retard. « Si l’on exclut les réseaux universitaires, le haut débit aux Etats-Unis s’installe à peine », justifie Bruno Oudet. « Le retard français n’existait pas dans les esprits des participants », confirme Pierre Lemoine. Et le dégroupage de la boucle locale devrait stimuler la concurrence et donc élargir les offres… qui resteront concentrées géographiquement.

Autres signes encourageants, la présence de Jean-Noël Tronc, conseiller de Lionel Jospin pour la société de l’information et, surtout, une lettre de Jacques Chirac qui, « au delà du message de sympathie, semble avoir pris conscience de l’enjeu », remarque Bruno Oudet. Si le président s’inquiète de l’accès au Net garanti à tous les territoires et de la sécurité sur les réseaux, Jacques Chirac a également évoqué l’idée d’un service universel pour le téléphone mobile… sans apporter de solution. « C’est la première fois qu’une telle intervention a lieu à Autrans », explique Pierre Lemoine, « nous ne désespérons pas d’inviter le Premier ministre ou le chef de l’Etat pour l’année prochaine ». A l’année prochaine, donc !

Pour en savoir plus :

Le site de l’Isoc France

Voir aussi notre carte de France de l’Internet rapide