Renseignement : le Sénat approuve le projet de loi sans sourciller

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Par 252 voix pour et 67 voix contre, le Sénat a adopté le projet de loi sur le renseignement à peaufiner en commission mixte paritaire. Parallèlement, les opposants restent mobilisés.

On arrive à la fin de la procédure d’examen de projet de loi sur le renseignement sans une véritable inflexion.

Le Sénat a adopté quelques modifications en première lecture au cours de sa séance du mardi 9 juin mais les dispositions au cœur de la contestation, en particulier les « boîtes noires » intégrées dans les réseaux des opérateurs, demeurent applicables. Au grand dam d’une contestation qui a dépassé le secteur numérique.

En décortiquant le vote solennel, on constate une forte adhésion au texte qui adapte la communauté du renseignement à l’ère du numérique.

Le résultat par scrutin public ne donne guère d’illusion : 252 voix pour et 67 voix contre.
Ce texte a été adopté par 252 voix pour et 67 voix contre.

Parmi les noms des « résistants » les plus connus (sélection très arbitraire), on signalera Chantal Jouanno et Catherine Morin-Desailly (groupe Union des Démocrates et Indépendants – UC),  Jean-Vincent Placé (Ecologiste) ou Serge Dassault (groupe Les Républicains). Dans les absentionnistes, signalons Alex Türk (pas de groupe politique mais précisons qu’il a occupé la présidence de la CNIL) et Robert Hue (groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen).

« Au total, 212 amendements avaient été déposés sur ce texte et 58 ont été adoptés par le Sénat », précise le service de communication du Sénat.

Dans le cadre de l’évolution des dispositifs de renseignement, une proposition de loi organique, déposée par Philippe Bas et Jean-Pierre Raffarin (Les Républicains), portant sur la nomination du président de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement a été adoptée par 324 voix pour et 0 voix contre (scrutin public).

Rappelons que le projet de loi fait l’objet d’une procédure accélérée. Par conséquent, il n’y a eu qu’une lecture par chambre.

Reste maintenant à peaufiner le texte car il reste des points non tranchés.

« Une Commission mixte paritaire composée de 7 députés et 7 sénateurs doit se réunir pour trouver un texte de compromis. Si c’est le cas, ce texte sera soumis aux deux assemblées qui pourront l’adopter ou le rejeter mais pas le modifier. »

« Dans le cas contraire, une nouvelle lecture aura lieu avec possibilité pour le gouvernement de donner le dernier mot à l’Assemblée nationale », précise par mail le service de communication du Sénat.

« Ce n’est qu’après l’adoption que le Conseil constitutionnel pourra être saisi. »

On peut s’attendre à une suite…Car Catherine Morin-Desailly se montre très combative via Twitter.

 

Mobilisation : 

Hier soir, quelques centaines de personnes avaient été manifestés Place de la République à Paris contre le projet de loi sur le renseignement, jugé liberticide sous certains aspects.

« Ce projet entérine les pratiques illégales des services secrets et met en place des méthodes de surveillance lourdement intrusives », sans contrôle suffisant, dénonce l’Observatoire des libertés et du numérique, du nom d’un collectif d’associations et d’organisations qui a servi de fer de lance de la mobilisation (Ligue des droits de l’Homme, Amnesty international, RSF, etc.).

Philippe Aigrin, co-fondateur de la Quadrature du net, se montre toujours aussi incisif : « Nous ne pouvons pas vivre avec cette loi. Il faudra que la société des citoyens se charge de surveiller les surveillants. »

Pilier de la contestation, Tristan Nitot, ex-Fondation Mozilla et membre du CNNum, était également sur place.

Peut-on modifier la donne ? Le débat sur le projet de loi sur le renseignement, qui a des implications négatives sur la sphère de nos libertés civiles, a laissé l’opinion publique plutôt insensible.

La contribution d’Edward Snowden dans une tribune diffusée par Libération vendredi dernier n’a pas été prise en compte : « Les chefs des services secrets […] en France ont exploité des tragédies récentes afin d’essayer d’obtenir de nouveaux pouvoirs intrusifs, malgré des preuves éclatantes que ceux-ci n’auraient pas permis d’empêcher ces attaques. »

La mobilisation pour la vigilance vis-à-vis des dérives dans la cyber-surveillance de masse ne doit pas s’atténuer.

Rappelons qu’une pétition en ligne est disponible sur Change.org pour marquer son opposition au projet de loi. Plus de 138 000 soutiens à cette initiative ont été recensés (pointage au 09/06/15 à 18h48).

(Crédit photo : Shutterstock.com – Source du contenu éditorial : Lilyana Vynogradova / Shutterstock.com)

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