Réseau public WiFi : une belle mascarade ?

Mobilité

L’exploitation des réseaux locaux de type Wifi sera exclusivement réservée aux opérateurs privés. C’est ce qui ressort du deuxième séminaire organisé par la mission Ecoter. Seule alternative pour les collectivités locales intéressées : l’exploitation d’une licence WLAN à titre expérimental pendant trois ans uniquement. A partir du 1er janvier 2003 ! Encore faudra-t-il qu’elles soient prêtes.

Quand l’Autorité de régulation des télécoms (ART) évoquait l’idée d’assouplir rapidement les conditions d’utilisation des bandes de fréquences des 2,4 GHz, pour offrir des accès Internet via les technologies WiFi (voir édition du 12 juin 2002), elle pensait probablement réserver ces facilités aux seuls opérateurs de réseaux et non aux collectivités, sans même parler des associations. C’est ce qui, globalement, se dégage du deuxième séminaire de la mission Ecoter (chargé de développer les nouvelles technologies au sein des collectivités locales) consacré au « déploiement d’un réseau local sans fil » et qui s’est déroulé le 7 octobre 2002 à l’Assemblée. Avec les interventions des représentants d’Orange, de Cisco et Sagem notamment, ainsi que des municipalités de La Rochelle et la communauté de communes du Pays de Sillé.

Selon un témoignage de François Bergeret, « il n’a jamais été question d’autre chose que de la prise de possession future et incontournable de cette technologie et bandes de fréquences par des ‘opérateurs de réseaux’, concédant l’usage du dernier tronçon kilométrique à des ‘opérateurs de services' ». Autrement dit, le WiFi tombera entre les seules mains des opérateurs de réseaux et des « gros » équipementiers. « On n’a entendu parler que d’opérateurs de réseaux, de marché, d’argent mais pas de notion de gratuité ou de partage public », résume l’auteur du message que nous avons joint par téléphone. « Le WiFi est vu comme un nouveau marché à exploiter via des technologies économiques », déclare François Bergeret. Un marché trop important pour que l’ART le laisse entre les mains des collectivités, apparemment. Comme l’écrit François Bergeret : « Exit les utilisateurs anarchiques qui souhaiteraient utiliser les points d’accès wireless en extérieur, et pas un mot relatif aux utilisateurs – pionniers historiques – que sont les radioamateurs. » Au risque aussi que les opérateurs n’installeront tout simplement pas un réseau WiFi qu’ils estimeront trop coûteux (ou pas assez rentable) à déployer.

Du WiFi expérimental pour les collectivités locales

Seule alternative pour les collectivités locales, la possibilité de déployer un réseau à titre expérimental, dont l’exploitation sera dans tous les cas limitée à trois ans avec une mise au point tous les six mois. Encore faudra-t-il qu’elles soient prêtes. Car l’ART laisserait une fenêtre de deux mois pour déposer les dossiers. Les deux mois en question sont novembre et décembre prochains pour un démarrage au 1er janvier 2003 ! A l’heure où nous bouclons et à trois semaines de l’ouverture du dépôt des dossiers, aucune information n’est publiée sur le site de l’ART. Seuls les acteurs déjà concernés seront donc prêts à temps. « D’autant qu’on ne connaît pas les critères de décision et encore moins le formulaire qu’il faut remplir », assène Marc Revial, fondateur de l’association Wireless-fr.

« Il s’agit d’une belle mascarade », poursuit-il visiblement écoeuré, « je pensais qu’ils joueraient au moins le jeu du libre marché car ce ne sont pas seulement les associations et les collectivités locales qui sont exclues du WiFi, ce sont aussi toutes les start-up locales. » Pour lui, les choix technologiques sont à eux seuls révélateurs du « manque de démocratie et de transparence ». Seuls deux points d’accès seront autorisés par kilomètre carré, selon ce qui ressort du séminaire. « On sait très bien que le réseau basé sur la bande des 2,4 GHz supporte difficilement plus de dix utilisateurs simultanés », explique Marc Revial, « on voudrait tuer la technologie qu’on ne s’y prendrait pas autrement. » L’alternative sera de porter la technologie sur la bande des 5 GHz qui offrira des débits de 54 Mbits/s au lieu de 11 Mbits/s actuellement. Transfert qui devrait s’effectuer autour de… 2005.