Sans repreneur, Surcouf revoit surgir le spectre de la liquidation

Régulations

Surcouf va-t-il rendre les armes ? Placée depuis février 2012 en redressement judiciaire, la chaîne de magasins n’a pas trouvé de repreneur en dépit de recherches intensives et s’orienterait vers la liquidation, avec une grosse casse sociale à la clé.

[Update à 17 h, voir en fin d’article] Ça va mal pour la grande distribution spécialisée… Après la Fnac hier 9 octobre, qui, faute d’avoir trouvé un repreneur, va sortir du giron de PPR pour être introduit en Bourse à la recherche d’investisseurs, c’est au tour de Surcouf aujourd’hui. Et son cas est infiniment plus grave…

En redressement judiciaire depuis la fin février,  l’enseigne appartenant à Hugues Mulliez n’a pas – malgré l’optimisme affiché et maintes fois réitéré de celui-ci – trouvé de repreneur. Surcouf pourrait être dès ce mercredi après-midi placé en liquidation judiciaire avec 380 personnes sur le carreau…

Un représentant du comité central d’entreprise, désirant conserver l’anonymat, a expliqué : « Aucun repreneur ne s’est présenté, ce qui signifie que le mandataire judiciaire va demander la mise en liquidation de Surcouf mercredi au tribunal de commerce ».

Funeste perspective

Concurrencé sur le terrain des prix par le Net, bousculé par les réseaux propriétaires (notamment les Apple Store), en perte de vitesse pour cause de pouvoir d’achat en berne des français, Surcouf a collectionné au fil des ans les difficultés.

En 2010, en dépit d’un chiffre d’affaires de 160 millions d’euros, le groupe avait affiché une perte nette de 20 millions d’euros ! Dans un premier temps, Hugues Mulliez avait tenté au début de l’été de redresser la barre en cédant trois de ses magasins à Paris, Bordeaux et Lille.

Une opération couronnée d’un échec retentissant. Il avait alors déclaré à l’époque : « Malgré de nombreux contacts et échanges avec de potentiels repreneurs, le délai court imparti et la complexité des cessions de baux n’ont pas permis de répondre à nos attentes. »

Puis le tribunal de commerce avait prolongé la période d’observation de l’enseigne, permettant à sa direction de renouveler ses efforts afin de trouver un repreneur viable. La mission semblait difficile… Elle fut carrément impossible…

Si la liquidation est confirmée ce mercredi après-midi, 380 personnes encore en poste chez Surcouf devraient être licenciées, à l’instar de ce qu’ont connu il y a quelques semaines les salariés du groupe eBizcuss.

Cité par divers médias, Christophe Desmoires, délégué CGC de Surcouf est bouleversé par la funeste perspective d’une liquidation : « Ce qu’on craint », dit-il, « c’est que quelqu’un vienne racheter les actifs de l’enseigne après liquidation pour pouvoir continuer sans les salariés ». D’autres évoquent  « Un énorme gâchis » et « l’incompétence des dirigeants » ou encore « une gestion calamiteuse ».

Magasin Surcouf

Au-delà du cas Surcouf

Les faillites en série dans la distribution IT spécialisée montrent qu’il y a un réel problème, au-delà des erreurs de gestion ou de stratégie. En avril 2012, une étude de Canalys prédisait un avenir des plus sombres aux géants de la distribution IT grand public.

Le cabinet d’études expliquait alors que la Fnac, Surcouf et leurs homologues du monde entier (il ne s’agirait donc pas d’un problème franco-français mais bien d’un problème global) allaient sans doute disparaitre à l’horizon 2020, concurrencés qu’ils sont par les e-commerçants et les hypers généralistes.

De fait, les acteurs américains dans la GSS ont été « précurseurs » – si l’on peut dire – en la matière : on se souvient des cas retentissants de Best Buy Europe, de Circuit City ou encore de CompUSA.

Steve Brazier, CEO de Canalys, expliquait lors de la sortie de son étude : « Ils sont frappés à la fois par la concurrence du commerce électronique et celle des supers et hypermarchés. En outre, ces distributeurs ont perdu des parts de marché face à des compétiteurs qui proposent des prix plus intéressants. Par ailleurs, ils se sont montrés incapables de répondre aux services d’un un Amazon, par exemple, qui propose un stock très étendu, des recommandations d’achats, une livraison gratuite et un excellent système de retour des produits. »

Qu’aurait du (ou pu) faire Surcouf pour échapper à la liquidation ? Pas évident de répondre à cette question, même si l’on peut comprendre le désarroi des personnels de Surcouf.

Il faudra suivre l’introduction en bourse de la Fnac – qui, comme on le sait, ne donne pas que dans l’électronique grand public mais aussi dans la vente de biens culturels, qui ne se porte pas mieux -, pour savoir si on peut encore légitimement vendre en France des produits high-tech  dans de « vrais » magasins et non pas uniquement par Internet…

 

Voir à ce sujet, les articles suivants sur ChannelBiz.fr :

(1)    Surcouf jette l’éponge

(2)    Surcouf voit sa période d’observation prolongée

(3)    eBizcuss, la fin d’un acteur qui comptait

(4)    Canalys prédit la disparition des distributeurs physiques d’EGP dans les 5 ans

 

Mise à jour 17h : L’enseigne a bien été placée en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Lille. Une information qui ne faisait malheureusement plus doute… Le tribunal a pris acte qu’aucun candidat sérieux ne s’était présenté pour la reprise de l’enseigne.  Dans le délibéré, le Tribunal assure que l’activité va pouvoir se poursuivre jusqu’au 30 novembre 2012 mais qu’ensuite le rideau devra être définitivement tiré avec, à la clé, le licenciement des 379 personnes faisant encore partie du personnel de Surcouf. 

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