Sombre avenir pour le câble en France

Mobilité

Le câble français va mal. Démarrage laborieux, faible développement, pénétration décevante du nombre d’abonnés, difficultés techniques, réglementation obsolète… le câble ne compte plus ses tares selon une étude publiée par l’Autorité de régulation des télécoms. Un rapprochement des acteurs entre eux pourrait ensoleiller les sombres perspectives du secteur. Ce qui implique des modifications en profondeur de la réglementation.

Vecteur prometteur de développement des services audiovisuels dans les années 80, l’avenir du câble en France est loin d’être radieux. C’est ce qui ressort d’une étude réalisée par le cabinet JLM Conseil pour l’Autorité de régulation des télécoms (ART) qui vient de la publier. L’étude porte sur « la situation du câble dans le marché français des télécommunications et celui de l’audiovisuel ».

Si le câble ne se porte pas très bien, c’est d’abord parce que son développement a été plus lent que prévu et qu’il est limité par un cadre juridique complexe. Le câble compte, tous câblo-opérateurs confondus, environ 3,5 millions d’abonnés. Soit autant que le nombre d’abonnés à TPS (1,1 million) et CanalSatellite (2,1 millions) mais dont les premières offres commerciales ont démarré dix ans après celles du câble qui repose (au 31 décembre 2001) sur un potentiel de 11,5 millions de prises (dont 8,5 millions opérationnelles).

On aurait pu penser que l’accès en haut débit à Internet pousseraient les internautes à adhérer massivement aux services du câble. Certes, nombre d’utilisateurs du Net ont choisi cette solution mais les câblo-opérateurs comptabilisent plus de 3,4 millions de foyers abonnés au service de télédistribution. Seuls 234 000 abonnés (au 30 juin 2002) bénéficiaient d’un accès Internet. A la même date, l’ADSL attirait plus de 650 000 internautes (et plus d’1,4 million en début d’année (voir télégramme du 10 janvier 2003).

Une réglementation inadaptée

Par ailleurs, sur la cinquantaine de câblo-opérateurs, seuls quatre tirent leur épingle du jeu, notamment grâce à une exploitation à caractère national : Noos, France Télécom Câble, NC Numéricâble et UPC France. A eux seuls, ils comptabilisent plus de 92 % des prises commercialisables et près de 90 % des abonnés (tous services confondus). Face au satellite, le câble compte donc plus d’acteurs pour un marché plus restreint, bien que le chiffre d’affaire global des câblo-opérateur a augmenté de 9,3 % entre 2000 et 2001.

Enfin, si l’ART rappelle que « les réseaux câblés occupent une place pleine et entière dans le développement du haut débit en France », ces 692,9 millions d’euros de revenus en 2001 ne constitue que 2 % du chiffre d’affaires global du secteur des télécommunications de l’Hexagone. Bref, le secteur du câble ne pèse pas bien lourd, ni dans le développement et le choix d’offres de programmes auprès des diffuseurs, ni dans le secteur des télécommunications.

Ces « faibles » résultats sont la conséquence plus ou moins directe d’une réglementation inadaptée. La loi du 30 septembre 1986 interdit à un câblo-opérateur d’exploiter plus de 8 millions d’abonnés afin de favoriser la concurrence. Règle qui ne s’applique pourtant ni à la télévision hertzienne et satellitaire, ni à l’ADSL. Conséquence, cette loi, déjà difficile à gérer (quel est le ratio entre le nombre de prises opérationnelles et le nombre d’abonnés?) interdit tout rapprochement éventuels entre câblo-opérateurs. Ceux-là se plaignent également des obligations de service public (versement d’une redevance, financement d’un canal local…) qui alourdissent les investissements. Surtout, en ne leur accordant pas la pleine concession du réseau, la loi du 30 septembre empêche les opérateurs à valoriser leurs infrastructures auprès d’investisseurs potentiels. En conséquence « l’amélioration des conditions d’exploitation du câble nécessitera à un moment ou à un autre une réforme du régime de la concession de service public », estime les auteurs du rapport.

Trois scénarii pour sauver le câble

Enfin, l’adoption de la technologie numérique sur le câble (pour multiplier le nombre de programmes et de services afin de lutter contre la concurrence du satellite) ne se fait pas sans douleur, techniquement parlant. Seuls Noos et FTC ont franchi le cap… sans pour autant y convertir avec succès les abonnés. Un développement qui pèse également sur les charges des opérateurs. Et l’arrivée de la télévision numérique terrestre (TNT) et de la vidéo à la demande sur l’ADSL ne va pas faciliter la tâche des câblo-opérateurs.

Pour tenter d’assurer un avenir au câble en France, l’étude propose trois scénarii. Le premier invite à la consolidation des réseaux par échange de plaques entre les opérateurs ou par regroupement des acteurs existants autour d’un nouvel entrant qui apporterait des capitaux frais. Ce qui suppose l’évolution du cadre réglementaire. Deuxième proposition, la séparation des infrastructures et des services. Un seul opérateur physique fournirait ses services aux différents diffuseurs et fournisseurs d’accès Internet. Mais en impliquant l’adhésion de tous les câblo-opérateurs, ce scénario est difficilement exploitable. Enfin, le troisième scénario invite au statu quo. « L’absence d’assouplissement à court terme de la réglementation du câble limiterait la capacité des câblo-opérateurs de chercher un remède structurel à leurs difficultés individuelles; assez rapidement, la conjugaison de l’absence de perspectives nouvelles et de l’érosion des parts de marché du câble finirait par aboutir à un refus des actionnaires des câblo-opérateurs de continuer à financer leurs déficits d’exploitation. » Les réseaux reviendraient alors aux collectivités qui choisiraient, ou non, de les exploiter pour leur propres besoins locaux.

Le débat sur l’avenir du câble et son développement en France ne fait que commencer. Comme l’énonce l’ART, « Les parties intéressées sont invitées, le cas échéant, à faire part de leurs commentaires ».