Torvalds croit au succès d’un Linux grand public

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Malgré une programmation de second plan, Linus Torvalds, le père de Linux, a facilement volé la vedette à Bill Gates lors du salon Comdex de Chicago. Pendant une heure, il a répondu aux questions du public en prédisant l’avénement d’un Linux grand public d’ici deux à trois ans.

Bien que négligé par les organisateurs, Linus Torvalds a fait forte impression au salon du Comdex qui se tient jusqu’à la fin de la semaine à Chicago. Son intervention qui n’était même pas répertoriée avec celle des quatre principaux conférenciers invités au salon (dont Bill Gates) avait été programmée dans un auditorium dont la taille n’avait rien à voir avec la prodigieuse ascension de Linux cette année.

Beaucoup de gens sont restés à la porte mais ceux qui ont réussi à entrer ont pu entendre Linus Torvalds peindre la révolution et l’évolution Linux dans un style pour le moins inhabituel. Celui-ci a en effet passé la quasi-totalité de son temps oeune heure d’intervention- à répondre aux questions de l’assistance.

Interrogé sur le succès de Linux, il a répondu : « La première raison qui a fait que Linux a si bien marché est qu’il y avait une tonne d’intelligence sur Internet qui ne savait pas sur quoi se concentrer. Jusqu’à ce que Linux arrive ».

Il a ensuite ajouté qu’un autre élément du succès était la nature modulaire de Linux qui permet à de nombreuses équipes de développement de travailler sur des aspects très éloignés du système d’exploitation avec très peu de coordination.

« Les gens sont parfois surpris de voir qu’il y a des parties de Linux que je connais très mal et que cela m’importe peu. C’est parce qu’en tant que développeur du noyau, je dois avant tout construire une base stable sur laquelle les autres pourront s’appuyer ».

Comme Bill Gates, une heure plus tôt, Torvalds a expliqué que son objectif était de voir son système d’exploitation sur toutes sortes de machines allant des assistants de poche aux supercalculateurs en passant par les appareils embarqués. Toutefois, Torvalds a reconnu que Linux n’était pas prêt pour toutes ces applications en affirmant notamment que, pour des machines équipées de centaines de processeurs, des versions d’Unix comme celles de SGI, Sun ou Compaq « étaient probablement plus raisonnables ».

Concernant les ordinateurs de bureau, il pense qu’il faudra encore trois ans avant que Linux soit suffisamment simple à utiliser pour s’imposer dans le grand public. Il s’est cependant montré particulièrement résolu. « Je veux que d’ici deux à trois ans, quand on souhaite acheter un ordinateur, il faille réfléchir au système d’exploitation que l’on souhaite installer et qu’il n’y ait plus comme aujourd’hui qu’un choix par défaut », a-t-il déclaré.

Torvalds s’est aussi expliqué sur le danger d’un éclatement de Linux en plusieurs versions incompatibles. Selon lui, le fonctionnement de la licence Open Source de Linux écarte cette éventualité. Celle-ci permet en effet aux sociétés de modifier le système mais elle les oblige aussi à offrir leurs modifications qui peuvent être à leur tour réutilisées. Ainsi, si un revendeur sort une version de Linux qui connaît un succès énorme grâce à son interface ou à sa facilité d’installation, rien n’empêche la concurrence de copier cette version qui devient de facto le nouveau standard.

Une personne a également demandé à Torvalds s’il était possible que Microsoft porte sa suite bureautique Office sous Linux (voir édition du 17 mars 1999). Celui-ci a répondu qu’il était plus important d’offrir des logiciels offrant les mêmes fonctions plutôt qu’Office elle-même. Il a alors cité la suite StarOffice gratuite aussi bien sous Linux que sous Windows. Selon lui, celle-ci ressemble tellement à Office que « certaines personnes s’y trompent et ont pris l’habitude en l’utilisant de sauver leur fichier avant d’imprimer ».