TV interactive : Liberate veut séduire l’Europe

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La société américaine Liberate, dont le navigateur Internet équipe déjà les décodeurs du géant AOL, prépare son arrivée sur le continent européen. Hervé Utheza et Giles Godart-Brown, respectivement responsables du marketing et de l’ingénierie, nous expliquent comment Liberate risque de changer notre regard sur la télévision.

VNUNet : Quelles sociétés ont déjà adopté votre technologie ? Et quels sont vos atouts, face à la concurrence d’autres géants comme Microsoft ?Hervé Utheza : Plusieurs câblo-opérateurs commercialisent déjà des offres de télévision interactive avec Liberate, aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne. En Amérique, la société Comcast propose un service opérationnel à Philadelphie. Des accords ont été signés avec les deux câblo-opérateurs canadiens Rogers et Shaw. La Grande-Bretagne est un pays où nous avons commencé à nous implanter. Le câblo-opérateur Cable & Wireless loue à ses abonnés des boîtiers équipés de Liberate pour environ 110 francs par mois, accès Internet compris. Son concurrent Telewest propose aussi l’Internet en plus de ses 60 chaînes télévisées, pour 130 francs par mois. Nous sommes en phase de démarrage en Europe. Mais Cable & Wireless représente déjà à lui seul 140 000 foyers connectés depuis octobre 1999.

Il faut signaler qu’un accord important a été signé avec AOL, après plusieurs années de travail, pour son service de télévision interactive AOLTV. Son lancement vient de démarrer aux Etats-Unis (voir édition du 19 juin 2000) et il est encore trop tôt pour tirer des conclusions. Si AOL nous a choisi, c’est probablement parce que nous avons adopté un standard de contenu ouvert et non propriétaire. La technologie Liberate permet d’exploiter tout de suite les contenus multimédia ou les services existants en Javascript et en HTML. Ensuite, AOL ne pouvait évidemment pas se tourner vers son concurrent Microsoft. Et contrairement à nos concurrents OpenTV ou Canal Plus Technologies, les développeurs sont libres de fournir des applications pour Liberate en quelques mois seulement, en utilisant n’importe quel outil standard comme Director de Macromedia.

VNUNet : Quelles sont les applications qui pourraient faire le succès de votre plate-forme ?Giles Godart-Brown : L’idée est de fournir au grand public le moyen d’accéder à la télévision interactive, à Internet, d’envoyer des messages ou des images à partir d’un seul bouton, simplement à l’aide de la télécommande et du clavier sans fil. Des émissions interactives affichent, grâce à une synchronisation avec la console, des messages pour s’informer ou jouer en même temps que les candidats devant la caméra. Les chiffres montrent que les abonnés de Cable & Wireless jouent à environ 15 000 jeux par jour. On peut par exemple parier sur les résultats pendant un match de foot, avec des choix et des questions variables en fonction du moment et de la situation du jeu.

Hervé Utheza : Il n’existe pas vraiment de killer application, les utilisateurs se focalisant sur cinq ou six fonctions. L’e-mail a un fort taux de pénétration (40 %), et c’est même l’activité préférée des grands-mères. Une bonne partie des utilisateurs appartiennent d’ailleurs à la catégorie des 50 ans et plus. Nous estimons qu’environ 30 % des utilisateurs n’ont pas de PC à la maison.

VNUNet : Quel est le coût des terminaux pour l’abonné ?Hervé Utheza : Cela dépend de la politique commerciale de l’opérateur, qui les propose à la location ou à l’achat comme AOL pour environ 200 dollars (1 300 francs). Liberate se contente de fournir le logiciel serveur et client, et n’est pas constructeur des appareils. C’est le rôle de sociétés comme Philips par exemple, qui traite avec AOL.

VNUNet : Votre rémunération repose donc sur les licences ?Hervé Utheza : Le chiffre d’affaires repose sur plusieurs activités, avec les licences du côté client, du coté serveur, mais aussi des prestations de services et du consulting. Durant l’exercice 2000, nous avons enregistré un chiffre d’affaires de 17 millions de dollars.

VNUNet : Le logiciel est-il évolutif ? Les fournisseurs de décodeurs devront-ils complètement revoir leur matériel pour s’adapter à Liberate ?Giles Godart-Brown : Liberate peut évoluer grâce à la partie serveur. Elle permet de mettre à jour les consoles. Ainsi, nous sommes en train de travailler au support de la technologie G2 de RealNetworks pour le streaming, par exemple pour lire la musique en MP3. Mais tout dépend surtout des choix de l’opérateur.

Hervé Utheza : Dans un avenir proche, nous prévoyons de lancer la vente d’espaces publicitaires. Concernant la question des cookies qui stockent des informations personnelles, le navigateur ne permet pas de les supprimer. Pour que Liberate reste simple, il n’est pas possible de « rentrer » dans le logiciel. Mais l’opérateur est libre d’ajouter les fonctions ou les services qu’il souhaite pour le personnaliser. Quant aux décodeurs, la plupart des modèles qui sortent actuellement sont en mesure de supporter Liberate. Les capacités requises sont limitées, de l’ordre de 1 Mo de mémoire vive et de 10 Mips (millions d’instructions par seconde) pour le processeur. Le problème est surtout d’éviter un éventuel conflit entre notre logiciel et celui déjà installé pour gérer les services interactifs.

VNUNet : L’arrivée de Liberate en France est-elle déjà programmée ?Hervé Utheza : Nous sommes en cours de négociation avec plusieurs opérateurs, dont nous ne pouvons citer les noms. Difficile aussi de donner une date. Mais nous visons plusieurs millions d’unités vendues à terme dans le monde, et l’Europe est un marché très important.

Pour en savoir plus :

* Liberate

* Le site TwoWayTV, fournisseur de jeux