Un distributeur Linux teste les licences commerciales

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Quant un distributeur Linux, MandrakeSoft, déroge à la sacro-sainte licence GPL, on se dit que l’esprit qui caractérisait les débuts du logiciel libre tend à se perdre. Pour les pionniers, il s’agit de capitaliser sur le succès croissant de Linux en entreprises pour bâtir une activité lucrative.

L’événement, bien que mineur, ne pouvait passer inaperçu dans le petit monde du logiciel libre. C’est le distributeur français MandrakeSoft qui en est à l’origine lorsqu’il a décidé d’éditer un de ses produits ? un pare-feu, le Multi Network Firewall (MNF) ? selon deux modes de licence. Très classiquement, il en propose une version téléchargeable sur le mode du développement ouvert (accès libre au code source publié selon les termes de la GPL – General Public License). De façon plus inattendue, il distribue en parallèle une version dont le code source est publié sous licence commerciale. « Les deux versions fournissent exactement les mêmes fonctionnalités réseau/pare-feu », précise l’éditeur. Mais contrairement à la version commerciale, la version téléchargeable ne bénéficie pas d’assistance technique, ni de garantie. C’est la première fois qu’un distributeur de Linux s’éloigne, même à la marge, des sacro-saints principes qui caractérisent le monde du logiciel libre. Faut-il y voir l’influence du nouveau patron de MandrakeSoft, François Bancilhon, arrivée à sa tête il y a un mois en remplacement du père fondateur, Jacques Le Marois, qui devient président ?

Il est vrai que depuis longtemps déjà, l’enjeu pour tous les pionniers de Linux est de construire un solide commerce autour du système d’exploitation Open Source. D’où l’idée de s’adjoindre les conseils d’hommes d’affaires avisés provenant du monde de l’édition logicielle, et qui en connaissent toutes les arcanes. Dans le cas de MandrakeSoft, il s’agit d’un créateur de plusieurs start-up dans le secteur de la high-tech. Et à peu près au même moment, un autre distributeur, l’allemand SuSe, plaçait de même à sa tête un ancien d’IBM. Mission pour ces deux hommes : atteindre au plus vite la rentabilité. C’est chose faite pour l’américain Red Hat, qui vient d’annoncer pour la première fois des bénéfices au troisième trimestre. Ils sont encore modestes, 305 000 dollars, mais constituent une belle progression par rapport à l’année précédente. La perte était alors de 15,1 millions de dollars. Le chiffre d’affaires est quant à lui passé de 20 millions de dollars il y a un an à 24,3 millions, réalisé à 93 % auprès des entreprises. De fait, pour tous les distributeurs, l’enjeu est d’accélérer la diffusion de leur suite dans les entreprises. Cela passe par la commercialisation d’une offre de service lucrative et, dans le cas de Red Hat, par l’engagement d’une stratégie de partenariat avec les grands constructeurs informatiques, en particulier HP et IBM, et d’éditeurs tel Oracle. Quant à MandrakeSoft, son pare-feu, qu’il positionne en concurrent de celui de Check Point Software, vise de même à étendre sa présence dans les entreprises.