Vers une guerre du prix des PC ?

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Même si la chute des ventes de PC grand public enregistrée aux Etats-Unis sera moindre en France où le taux d’équipement reste faible, l’approvisionnement en composants et surtout la parité dollar / euro inquiètent les fabricants. Ces derniers pourraient bien déclencher une « guerre des prix » pour satisfaire des consommateurs habitués à voir régulièrement diminuer leur addition.

« Je crains une baisse tendancielle des prix et surtout des marges, comme on l’a connue il y a quelques années », confie le directeur de Gateway France des produits grand public à VNUnet. Albert Barrachina prévient : « Une guerre des prix pour conserver des parts de marché nuirait au marché. Cela ne peut que laisser des blessés et des morts. » Guerre des prix : le mot est lâché. Le directeur des études de Jupiter Media Metrix, Peter Christy, emploie le même vocable :« Je serais forcé de croire qu’il va y avoir une guerre brutale », a-t-il indiqué à l’agence Reuters en précisant qu’elle aurait lieu lors du premier trimestre 2001. « Si les stocks s’accumulent, il faut s’en débarrasser avant qu’ils ne pourrissent sur pied », a-t-il justifié.

Si les chiffres des ventes réalisées sur la période de Noël ne sont toujours pas connus, les estimations étaient pessimistes et les chiffres de novembre décevants. Selon une étude Context, citée par Reuters, en France en novembre dernier les ventes de PC ont chuté de 6 % au total par rapport à l’année dernière, pire si l’on considère le marché grand public avec une diminution des ventes de 55 %. Fin novembre déjà, les fabricants lançaient les uns après les autres des prévisions de ventes en baisse. Gateway ouvrait le bal, s’appuyant sur le marché des PC aux Etats-Unis et précisant dans son annonce qu’il se basait sur « des ventes d’ordinateurs personnels nettement inférieures aux prévisions sur la période des vacances de Noël. »Toutes les prévisions revues à la baisse

Dans la foulée, IDC (International data corporation) publiait ses chiffres pour les Etats-Unis. Ses analystes prévoient une croissance des ventes d’ordinateurs de 15,8 % seulement pour le dernier trimestre de cette année, moins que les 17,1 % escomptés. Ensuite, ce fut le tour d’Apple d’annoncer qu’il fallait s’attendre à des résultats inférieurs à ses prévisions initiales (voir édition du 8 décembre 2000), suivi d’annonces de Compaq et de Hewlett Packard. Même Intel et AMD s’y sont mis, les fondeurs préfèreraient accumuler les stocks plutôt que de les écouler. Depuis, une étude IDC a dressé un panorama du marché à l’échelle de la planète. L’institut, comme le souligne Reuters, a divisé par deux ses estimations de ventes d’ordinateurs de bureau pour le grand public au quatrième trimestre (Q4) passant de 21,2 à 10,2 % de croissance.

François Leblanc, marketing manager de la gamme Pavilion de Hewlett Packard en Europe, est confiant quant au marché français : « Il suffit de regarder les taux d’équipement, les Etats-Unis sont à 60 voire 70 % quand nous sommes encore à 30-35 %, la moitié. Il nous reste donc de la marge avant de saturer le marché ! Les indicateurs sont dans le vert, nous sommes confiants. » A l’institut d’études GFK on confirme ces chiffres : « Le taux d’équipement était à 26 % à la fin de l’année dernière », confie Frédéric Patissier, chef de groupe sur l’activité hardware, « cette année il est de 30 % ; l’engouement des particuliers pour la micro-informatique reste marqué, » assure-t-il. Des chiffres en accord avec ceux de l’étude 24 000 Multimédia Médiamétrie / ISL qui estime le taux d’équipement des foyers à 26,6 % pour le troisième semestre 2000.

Un dollar fort qui gêne la baisse « normale » des prix

Finalement la hausse du taux d’équipement par rapport à l’année dernière reste timide : « Le frein se situe au niveau des prix, la France est désavantagée par le cours du dollar et les approvisionnements en composants, » estime Frédéric Patissier qui remarque tout de même que les configurations sont de plus en plus complètes, « avec des périphériques qui n’en sont plus ». Résultat : « + 23 % sur les prix du marché grand public de janvier à octobre, » souligne l’analyste de GFK, qui précise que cette tendance est bénéfique pour les ordinateurs portables. Confirmation chez Toshiba, par la voix de Didier Halbique, responsable produit portables, qui assure qu’aucun ralentissement n’est en vue sur le marché français : « Contrairement aux US, ici nous sommes toujours en phase d’équipement, c’est un peu comme pour le téléphone portable. »

Le retard en équipement informatique des foyers français est encourageant pour les fabricants, mais les consommateurs sont désormais habitués à une baisse régulière du prix des ordinateurs. « Le très fort taux du dollar pénalise nos marges et nous gêne dans la baisse des prix », constatait Albert Barrachina de Gateway avant de craindre une « guerre des prix ». Aux Etats-Unis, Gateway a revu sa politique de vente en proposant des ordinateurs directement dans ses points de vente ; Dell a baissé les prix sur sa Gamme de portables Latitude, suivi de près par Apple qui lance aussi des promotions en France (voir édition du 26 décembre 2000). La nécessité d’écouler les stocks accumulés pour Noël pourrait entraîner une baisse des prix généralisée. D’ici à en faire une guerre…