Canal+ se tourne vers la justice dans son bras de fer face à TF1

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Comme Orange l’an dernier, Canal+ a saisi le tribunal de commerce de Paris d’une plainte contre TF1, avec qui le contrat de diffusion arrive à terme ce 28 février.

Une plainte de plus contre TF1 devant le tribunal de commerce de Paris.

Saisie en juillet dernier par Orange, la juridiction de première instance l’est désormais par Canal+.

Le chaîne cryptée et sa maison mère Vivendi assignent plus précisément, selon BFMTV, le groupe audiovisuel et sa filiale TF1 Distribution.

La procédure s’ouvre à l’heure où un contrat liant les deux parties prend fin : à compter du 1er mars 2018, le groupe Canal+ n’aura plus l’autorisation de reprendre le signal des chaînes gratuites de TF1, comme il le fait actuellement dans son bouquet Canalsat et sur l’application MyCanal.

Aucun accord n’a été trouvé autour de l’offre premium dans laquelle la filiale du groupe Bouygues a intégré ses chaînes et son service de replay, additionnés de fonctionnalités de type start over (reprise d’un programme au début), avant-premières et qualité HD.

Canal+ refuse de payer les sommes que lui demande TF1 pour proposer cette offre à ses abonnés.

L’argument audience

Son directeur général Maxime Saada s’était montré affirmatif début février dans les colonnes du JDD.

L’intéressé avait fermement exclu l’idée de verser le montant exigé (en l’occurrence, près de 20 millions d’euros, d’après Le Figaro).

Non sans assurer que Canal+ représente « entre 15 % et 20 % » de l’audience des chaînes gratuites de TF1, il avait dénoncé le « chantage » pratiqué par un groupe qui « profite indûment de sa puissance » et de l’« avantage énorme » de pouvoir diffuser gratuitement sur la TNT.

Stéphane Richard, P-DG d’Orange, a tenu un discours similaire la semaine dernière, lors de la présentation des résultats annuels de l’opérateur.

« On nous demande de payer une chose pour laquelle nous estimons ne pas avoir de raison de payer », s’était-il insurgé, en affirmant capter 25 % de l’audience de TF1 en France.

L’accord avec Orange, prolongé dans le cadre des négociations amorcées en 2016, s’est terminé le 31 janvier 2018.

« Regardez en Europe »

Passé cette date, TF1 a immédiatement suspendu la fourniture de son service de replay et a sommé le groupe télécoms – en engageant des poursuites pour « contrefaçon » – de stopper la diffusion de ses chaînes en clair.

Son P-DG Gilles Pélisson, intervenu à la mi-février sur RTL, avait rappelé, à travers les exemples de la Pologne, de la Belgique, de la Roumanie et de la Slovaquie, qu’un tel système de contribution des opérateurs existe « dans beaucoup d’autres pays d’Europe ».

« On demande quelques centimes d’euro par abonné. […] Ce n’est ni plus ni moins que la proportionnalité* par rapport à une base d’abonnés plus large », avait résumé le dirigeant, ajoutant : « On ne va pas faire croire […] que les quelques millions que nous demandons pour la rémunération de nos chaînes [vont] mettre en péril l’économie d’une société comme Orange ».

La CFE-CGC a pris position dans le débat, invitant le gouvernement à prendre des mesures. Entre autres, « établir sans ambiguïté que tout bénéficiaire d’une autorisation de diffusion gratuite sur la TNT doit mettre gratuitement son signal à disposition de tout diffuseur national, dès lors qu’il n’est pas porté atteinte à la qualité du signal ».

Il faudra surveiller l’évolution de la situation avec Free, le contrat arrivant à échéance fin mars.

Au 30 juin 2017, le CSA estime à 54,4 % la proportion de foyers français recevant la TV par Internet (+ 2,8 points en 6 mois), contre 56,3 % par voie hertzienne terrestre (- 2,6 %).

* Une estimation à 10 millions d’euros circule pour l’accord annoncé en début d’année avec SFR.

Crédit photo : Pierre Metivier via Visualhunt.com / CC BY-NC

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