Droit à la déconnexion : la Cour de cassation valide par téléphone portable

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La Cour de cassation a consacré le principe du droit à la déconnexion en statuant sur le cas d’un salarié qui devait rester joignable sur son portable hors des heures de travail.

Lorsque obligation est faite à un salarié de rester joignable sur son téléphone portable hors des heures de travail, il convient de lui verser une indemnité d’astreinte.

C’est le sens d’un arrêt du 12 juillet 2018 par lequel la Cour de cassation consacre le principe du droit à la déconnexion.

La juridiction suprême a rejeté un pourvoi formé par la filiale française de Rentokil Initial, groupe britannique spécialisé dans les services d’hygiène pour les entreprises et les administrations.

Une décision du 14 décembre 2016 faisait l’objet de ce pourvoi. La cour d’appel de Montpellier avait confirmé, dans ce cadre, un jugement prud’homal par lequel Rentokil Initial avait été condamné à verser 60 868,51 euros à un ancien salarié que nous appellerons « M. Y. ».

L’intéressé avait été engagé le 14 janvier 2008. Il avait été promu directeur d’agence le 1er janvier 2009 et s’était vu adjoindre, le 1er avril 2010, les fonctions de directeur général du pôle Sud-Ouest.

Son licenciement était intervenu le 12 décembre 2011. À la suite de quoi il avait saisi les prud’hommes le 22 mars 2012, obtenant la somme susmentionnée au titre de « rappel d’indemnité d’astreinte ».

L’astreinte en question était prévue dans la convention collective à laquelle M. Y. était soumis. En l’occurrence, celle des entreprises de désinfection, de désinsectisation et de dératisation, dans sa rédaction antérieure à une réactualisation effectuée le 28 juin 2011.

Le salarié est, selon l’article 26 de ladite convention, concerné par cette astreinte dans le cas où il doit « assurer une permanence téléphonique à son domicile ».

Appels d’urgence

La juridiction d’appel avait constaté l’existence, chez Rentokil, d’une obligation, pour les directeurs d’agence, de laisser en permanence leur téléphone allumé hors des heures de travail, dans le cadre d’un dispositif de gestion des appels d’urgence.

Elle n’a cependant pas, d’après la Cour de cassation, caractérisé que M. Y. était soumis à une obligation de tenir une permanence téléphonique à son domicile ou à proximité (définition de la période d’astreinte selon l’article L. 3121-5 du Code du travail).

Toujours dans le raisonnement de la Cour de cassation, si la décision de la Cour d’appel n’est pas légalement justifiée sur ce point, elle l’est sur un autre. En l’occurrence, l’obligation, pour M. Y., de rester disponible à l’aide de son téléphone portable et se tenir prêt à intervenir en cas de besoin.

Cette obligation apparaît dans des échanges de mails des 7 et 8 septembre 2011. Elle était par ailleurs inscrite dans un document relatif à la procédure de gestion des appels d’urgence.

Dans le cadre de cette procédure, les coordonnées des directeurs d’agence (ou des superviseurs / chefs d’équipe) étaient communiquées à la société chargée des appels d’urgence. En cas d’appel, les directeurs d’agence devaient « prendre les mesures adéquates ».

L’indemnité due à M. Y. a été calculée sur la base de l’article 26* de la convention collective. Il y est prévu une « prime d’astreinte forfaitaire » égale, pour chaque journée de permanence, à 4 h du taux horaire brut.

M. Y. affirmait que Rentokil devait lui régler cette astreinte, quand bien même elle n’était pas mentionnée dans son contrat de travail.

L’entreprise assurait quant à elle, extraits d’agenda à l’appui, que son ex-employé n’avait jamais été soumis à des astreintes. Elle contestait également les mails qu’avançait ce dernier, au motif qu’ils visaient simplement à « l’informer sur une situation générale qui ne le [concernait] pas directement ». Tout en avançant que ses subordonnés s’étaient plaints d’être « livrés à eux-mêmes » tandis qu’il « ne répondait pas à leurs demandes ».

* L’article prescrit que les heures de permanence ne sont pas considérées comme des heures de travail effectif. À défaut de poste téléphonique, l’entreprise pourra fournir « un système de recherche de personnes équivalent ».

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