Echovox veut dévoiler le nom du nouveau Président dimanche dès 18 heures

Mobilité

Un service de SMS opéré depuis la Suisse compte révéler le visage du nouveau
Président avant l’heure légale dimanche. La CNCCEP rappelle le cadre de la loi.

Ségolène Royal, Nicolas Sarkozy? Dimanche 6 mai, il sera possible de connaître le nom du nouveau président de la République française avant 20 heures, heure légale de communication des résultats de l’élection présidentielle. Echovox, prestataire suisse de services et solutions pour téléphonie mobile, propose d’envoyer par SMS le résultat de l’élection dès 18 heures. Basée à Genève, Echovox n’est pas soumis à la loi française et à la réserve de communication des premières estimations avant la fermeture du dernier bureau de vote.

Les dirigeants de l’entreprise ne cachent pas leur goût pour la polémique. « Le problème est simple », esquisse Sylvain Boj, directeur général d’Echovox, contacté par Vnunet.fr. « Genève se trouve à 5 kilomètres de la frontière française. Tous les Suisses et les Belges connaissaient avant 20 heures le résultat du premier tour de l’élection du 22 avril, ainsi que les Français installés en zones frontalières. Il n’est pas normal qu’une partie des Français bénéficie d’une information cachée au reste de la population. »

Un point de vue qui ne s’encombre pas du risque d’influence que peut avoir le résultat prévisionnel sur les derniers votants. « La loi n’est de toute façon pas respectée en France puisque des bureaux de vote électronique sont restés ouverts jusqu’après 21 heures », s’insurge le directeur, « et à ma connaissance, ni TF1 ni France 2 n’ont été poursuivis. Les nouvelles technologies ont bon dos, c’est pourquoi nous relançons cette polémique. »

« Nous vendons le logo, pas le SMS »

C’est aussi l’occasion d’organiser une belle opération commerciale puisque le service SMS est facturé 1,50 euro TTC par envoi. Ouvertes depuis le 30 avril 2007, les inscriptions sur le site dédié Présidentielles.com se multiplient. Mais Sylvain Boj refuse de communiquer sur leur nombre.

Concrètement, l’utilisateur qui voudra connaître les résultats de l’élection deux heures avant l’annonce officielle doit entrer son numéro de téléphone destinataire sur le site Presidentielles.com prévu à cet effet. Echovox renvoie alors un « catalogue WAP » constitué de deux logos symbolisant les candidats finalistes. Il suffit alors de choisir indifféremment l’un des deux logos pour recevoir, le 6 mai, les résultats de l’élection dès 18 heures. Pour monter cette opération, Echovox s’appuie sur sa plate-forme de services mobiles Zong.

« Nous vendons le logo, pas le SMS qui est lui envoyé gratuitement », justifie le dirigeant. Un bon moyen de contourner, légalement, l’usage du numéro court associé au service et qui aurait été bloqué par les opérateurs nationaux lors de l’envoi des informations.

Echovox a l’habitude des opérations ponctuelles. « Nous en faisons régulièrement à l’occasion du 1er avril pour l’envois de blagues ou de poèmes pour la Saint-Valentin. » En France, où Echovox dispose d’un bureau à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), l’entreprise suisse est devenu le prestataire exclusif de M6 pour les solutions mobiles.

La nécessité d’une régulation européenne

Quid de la fiabilité de l’information? La direction d’Echovox est sure de son coup. « Je ne peux pas divulguer mes sources mais l’information sera vérifiée de multiples fois auprès de différents canaux avant d’être communiquée « , promet l’interlocuteur. « Et si le score est serré au point de peser sur le résultat final, nous rappellerons qu’il s’agit d’une estimation. »

Bref, Echovox devrait réussir où nombre de blogueurs les mieux informés des résultats, à commencer par le journaliste Jean-Marc Morandini, avaient finalement pris la décision de respecter la loi française malgré leurs intentions initiales de divulguer l’information en ligne. Quant aux sites des blogueurs suisses et belges qui avaient également diffusé les résultats du premier tour, leur accès restait impossible, saturé par la demande. « C’est d’ailleurs ce qui a poussé David Marcus [le créateur d’Echovox, ndlr] à monter l’opération », précise Sylvain Boj.

Pour sa part, la Commission nationale de contrôle de la campagne en vue de l’élection présidentielle (CNCCEP) rappelle, dans un communiqué du 3 mai 2007, que la diffusion d’informations relatives aux sondages d’opinions ou résultats de l’élection sont interdits avant 20 heures « par quelque moyen que ce soit« . Sont concernés les télévisions et radios mais aussi les sites web et « procédé de communication au public par voie électronique« .

A ce titre, les opérateurs de téléphonie mobile français sont directement concernés par l’opération d’Echovox puisque Orange, SFR et Bouygues Telecom relaieront les SMS de l’entreprise suisse sur les terminaux nationaux. « Les opérateurs sont soumis à la loi en tant que serveurs », explique à Vnunet.fr un représentant de la CNCCEP. « Si nous constatons que la loi n’a pas été respectée, le procureur de la République pourra être saisi. » Mais le mal aura été fait. Les opérateurs, comme tout autre acteur susceptible de violer l’article 11 de la loi du 19 juillet 1977, risquent 75 000 euros par infraction constatée.

Une situation de blocage national dont ne s’encombre pas Internet et le monde des télécoms. Il est même surprenant que la concurrence pour ce type de services ne se soit pas développée plus amplement. Quoi qu’il en soit, l’initiative d’Echovox montre encore une fois que, face aux usages des nouvelles technologies, il est nécessaire de faire évoluer le cadre règlementaire.