Interview Bastien Duclaux – Twenga : « Passer du moteur shopping au marketing digital »

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Le co-fondateur de Twenga explique comment le shopbot français a « pivoté » pour adopter un modèle adtech, avec l’appui de son actionnaire Idinvest.

Twenga revient de loin. La société française, qui avait parié sur un développement de son moteur de shopping, a été malmenée dans la période 2011-2012 en raison de l’influence de Google sur le domaine de la recherche Internet (en particulier les changements d’algorithmes du moteur de recherche) et de son propre service Google Shopping.

Après une procédure de sauvegarde, Twenga a dû se restructurer er remodeler son modèle pour trouver un autre relais de croissance. Ce sera l’adtech (fourniture de solutions publicitaires) pour le compte des e-commerçants.

Un pivot qui a pu être effectué grâce à l’appui de son équipe R&D et le soutien de son actionnaire Idinvest qui vient de ré-injecter dix millions d’euros dans la société co-fondée par Bastien Duclaux et Cédric Anès.

(Interview réalisée le 26 mai 2015)

ITespresso.fr : Comment a évolué le positionnement de Twenga en quatre ans ?

Bastien Duclaux : Le virage a été assez fort. Nous avions un moteur de recherche de shopping le plus complet du Web avec une couverture géographique très large. En 2011, nous avons dû changer notre trajectoire. Mais l’activité première première nous a permis de développer des compétences, notamment en matière d’acquisition d’audience et de ciblage publicitaire.

Nous sommes en mesure de proposer à nos 4000 e-commerçants clients un rendement publicitaire en forte croissance.

Début 2014, nous avions développé énormément de canaux d’acquisition d’audience pour le compte de Twenga. Alors pourquoi pas introduire ces technologies pour le compte de nos clients ?

Nous sommes aboutis à la commercialisation de deux solutions pour rendre les dépenses publicitaires plus efficaces : Smart LEADS (augmenter le ROI avec la génération de contacts qualifiés) et Smart SEM (optimisation d’acquisition de campagnes publicitaires notamment sur les plateformes de paid search comme Google AdWords).

n l’état actuel, nous avons 250 clients qui ont essayé ou qui utilisent ces nouvelles solutions. Cette levée de fonds va nous permettre d’accélérer dans le marketing de ses solutions et développer la R&D autour de l’adtech.

ITespresso.fr : Vous allez vraiment basculer en termes d’activité ? Dans quelle mesure l’activité shopbot perd du poids dans votre business ?

Bastien Duclaux : La structure d’activité a radicalement changé. L’activité shopbot ne représente plus que 30% de notre business. Avec nos nouvelles solutions publicitaires, nous dépassons la sphère e-commerce produits. Nous commençons à toucher des clients dans le voyage et la finance.

Sur 2015, nous visons un chiffre d’affaires supérieur à 40 millions d’euros. C’est le quadruple de notre CA réalisé en 2011.

ITespresso.fr : Quels sont vos nouveaux objectifs ?

Bastien Duclaux : Nous voulons devenir une grande société ancrée dans le marketing digital. La plateforme Twenga était présente dans une quinzaine de pays. Au-delà de la France, nous allons renforcer notre présence au Royaume-Uni et en Allemagne, les deux plus gros marchés du commerce électronique en Europe.

Nous allons aussi ouvrir des bureaux en Espagne et en Italie d’ici le début de l’été. L’objectif sur les douze mois, c’est d’entrer sur le marché américain.

On ne vise pas de croissance externe immédiatement. On verra à moyen terme. On se concentre d’abord sur une exécution forte.

ITespresso.fr : Avec le recul, vous considérez que le pivot effectué par Twenga a été réalisé à cause de Google ?

Bastien Duclaux : C’est évidemment à cause des actions anti-concurrentielles que nous avons changées de positionnement. On avait déjà engagé en 2011 un certain nombre de développements R&D. Les événements liés à Google ont accéléré le processus.

Depuis trois ans, on s’est appuyé sur les travaux de notre équipe R&D, qui constitue une force essentielle de Twenga. Et nous avons même des fortes zones de partenariats à renforcer avec Google impliqué dans la sphère de la publicité et de l’e-commerce.

ITespresso.fr : Comment avez-vous vécu cette période trouble 2011-2013 ?

Bastien Duclaux : Cela a été une période difficile avec beaucoup de travail. On est passé par des moments délicats. Quelque part, cela nous a aussi renforcé en termes de management. Nous avons une envie forte de croissance chez Twenga.

Nous avons su préserver une équipe R&D très solide qui nous a permis de rebondir, avec le soutien de nos actionnaires.

ITespresso.fr : Par rapport aux griefs que la Commission européenne a notifiés à Google (qui mettent l’accent sur Google Shopping), comment regardez-vous cela ? En tant que société française ayant saisi Bruxelles sur ces questions de concurrence déloyale…

Bastien Duclaux : En 2011, nous avions effectivement pris part à cette procédure. La Commission européenne fait son travail comme sur toutes les plateformes numériques. On regarde cela avec un certain détachement car on a changé de modèle. Des sociétés américaines font très bien du lobby auprès de Bruxelles à notre place.

Il est vrai que la procédure d’enquête menée par Bruxelles est longue [rappelons que l’enquête contre Google a été initiée en novembre 2009, ndlr]. Cela montre l’inadéquation de certaines régulations. On laisse le soin à la Commission européenne de prendre des mesures si besoin est.

Mais c’est aussi le rôle d’un entrepreneur de ré-orienter les activités quand le plan de développement n’est pas conforme.

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