Interview David Letemple – Teradata : « La DMP concrétise les rêves d’un marketing one to one »

Big dataData-stockage
David Letemple - Teradata Marketing Applications

Consultant Teradata Marketing Applications, David Letemple aborde l’essor de ces Data Management Platform (DMP), chaînon manquant entre l’achat média et les applications de CRM.

ITespresso.fr : Peut-on parler d’un virage marketing pour des spécialistes de l’informatique décisionnelle comme Teradata ?

David Letemple : Teradata est effectivement un grand nom de l’informatique décisionnelle depuis 30 ans et nos entrepôts de données équipent des milliers d’entreprises dans le monde dans des domaines aussi variés que la distribution, la santé ou le secteur public.

Notre métier est d’agréger les données de production dans une base, d’analyser ces données et ensuite d’aider les dirigeants à prendre les bonnes décisions.

Historiquement, nos interlocuteurs étaient plutôt les directions informatiques mais nous travaillons désormais de plus en plus avec les directions financières et les directions métiers, notamment les directions marketing, afin de démocratiser l’usage de ces solutions.

ITespresso.fr : La DMP permet de démocratiser l’informatique décisionnelle pour les directions marketing ?

David Letemple : La DMP est une solution spécifique, qui vient enrichir et s’intégrer avec notre offre Marketing Cloud déjà constitué d’une solution de MRM (Gestion des ressources marketing) et DMC (Digital Marketing Center) et qui répond à 4 objectifs : enrichir la connaissance client, unifier les données, segmenter les données et « activer » ces données, quel que soit le canal.

C’est donc une application cloud qui s’appuie sur un environnement big data, et qui permet d’aider les directions marketing à optimiser leurs budgets et augmenter le ROI de leur campagnes grâce à un marketing hautement individualisé, temps réel et sans couture puisque la solution s’intègre nativement avec l’ensemble des canaux tels que le display, le search, l’e-mail, le mobile, le web ou encore les réseaux sociaux.

ITespresso – La DMP, c’est le chaînon manquant entre CRM et AdExchange ?

David Letemple : Les entreprises ont effectivement beaucoup investi dans des solutions de gestion de la relation client mais ont encore tendance à confier à d’autres équipes leur politique d’acquisition, ce qui consiste bien souvent à payer pour faire revenir des clients déjà « embasés ».

La philosophie d’une DMP c’est d’avoir une approche unifiée de la donnée mais également de l’ensemble des canaux. En amont, la DMP doit se connecter avec les Adservers, les DSP (Demand-Side Platform), les data providers, les solutions de gestion de campagnes, le CRM, les solutions de personnalisation ou encore les réseaux sociaux, en essayant d’identifier des internautes le plus souvent anonymes, puis de qualifier ces profils, notamment en agrégeant des données tierces ou en faisant appel à des techniques de CRM on-boarding, afin de bâtir des stratégies marketing adaptées.

Concrètement, si un internaute anonyme abandonne un panier d’achat sur un site Internet, la DMP peut faire le lien avec un profil déjà identifié dans le CRM et envoyer un e-mail ou un SMS de relance à la bonne personne afin de finaliser la vente.

Mais cela peut également consister à des campagnes publicitaires différenciées, selon que l’on parle à d’anciens clients ou à des personnes qui n’ont jamais eu de contact avec sa marque.

ITespresso.fr : Combien coûtent ces solutions et peut-on quantifier leur retour sur investissement ?

David Letemple : Avec le big data et demain l’IoT, nos clients sont confrontés à une explosion des volumes de données collectées sur les prospects et les clients, et ils doivent bien évidemment s’équiper de solutions de stockage capable de traiter intelligemment et rapidement ces informations.

Historiquement, nous déployions de gros entrepôts de données chez nos clients mais grâce au cloud computing, nos solutions  applicatives marketing sont désormais accessibles aux PME pour des budgets de l’ordre de quelques dizaines de milliers d’euros par an.

Nous avons récemment réalisé une étude sur l’un de nos produits, qui permettait d’identifier des profils jumeaux (look alike) et qui estimait le ROI à près de 35%. Mais au-delà de ces chiffres, je pense que la valeur ajoutée d’une DMP n’est plus à démontrer.

Elle permet non seulement de ne plus dépenser de l’argent en acquisition sur ses propres clients mais également d’utiliser des canaux d’acquisition traditionnels comme le display, en véritables outils CRM pour faire de l’up-sale ou réduire le churn de ses propres clients.

C’est un changement de paradigme qui permettra à nos clients de gagner en pertinence, en efficacité et en réactivité, concrétisant beaucoup des promesses sur le marketing one to one.

ITespresso.fr : La gouvernance des données devient-elle un sujet complexe ?

David Letemple : Oui et c’est toute la valeur ajoutée d’une DMP que de pouvoir collecter, enrichir, connecter et segmenter des données qui sont et doivent rester anonymes.

Sur le Web, on utilise traditionnellement les cookies pour suivre les internautes mais il est également possible d’avoir recours à du fingerprinting reposant sur la collecte des caractéristiques du navigateur afin de reconnaitre un visiteur.

Au sein des applications mobiles, nous travaillons principalement avec les identifiants publicitaires fournis par Apple, Google ou Microsoft. Et l’une des valeurs ajoutées de notre DMP est de pouvoir intégrer l’ensemble de ces identifiants afin de proposer une approche cross-device à nos utilisateurs.

Outre ce suivi des internautes et des mobinautes, nous cherchons à enrichir ces profils en récupérant des données « first party », issues par exemple du CRM de nos clients, des données « second party », issues de partenaires de nos clients, mais également des données « third party », issus de gros brokers de données.

Depuis la fin du Safe Harbor, il n’est désormais plus envisageable de stocker ces données aux États-Unis et nous proposons à nos clients européens de les héberger dans notre centre de Munich en Allemagne, ou chez Amazon Web Services en Irlande. Nous avons également décidé d’appliquer la réglementation allemande en matière de gouvernance, qui nous oblige non seulement à anonymiser ces données mais désormais également à les chiffrer. En offrant ainsi à nos clients les standards les plus élevés du marché.

ITespresso.fr : Redoutez-vous la concurrence d’autres grands noms du progiciel ou des nouveaux acteurs de l’Internet ?

David Letemple : Ces dernières années, Teradata a racheté les sociétés Aprimo, eCircle, ArgyleSocial, Appoxee, Flxone afin de proposer l’une des suites marketing les plus complètes du marché et répondre à l’ensemble des problématiques de ses clients.

Nous sommes effectivement en compétition avec Oracle ou Adobe et nous nous attendons également un jour à être challengé par IBM, SAP ou SalesForces sur ce segment de la DMP.

Aujourd’hui les agences médias voient de plus en plus d’annonceurs s’équiper de DMP, laissant aux agences le soin d’opérer la DSP (achat média).

C’est pourquoi certaines agences ont fait le choix d’utiliser nos technologies en marque blanche ce qui leur permet de se concentrer dans une prestation de service à valeur ajoutée.

Nous observons également la naissance de beaucoup de start-up, en France comme aux Etats-Unis, qui revendiquent également l’étiquette de DMP.

Mais ces sociétés sont généralement spécialisées sur un segment comme le display, le mobile ou le social, et ne proposent pas une approche aussi large que celle de Teradata.

Enfin nous regardons également les ambitions de Facebook ou de Google, qui vient d’annoncer sa propre DMP, mais je pense que leur rivalité sera paradoxalement leur point faible car ils refuseront pendant encore longtemps de collaborer.

La force de Teradata est sans doute de proposer la technologie DMP la plus avancée, s’appuyant sur notre expertise dans l’informatique décisionnelle depuis 30 ans, tout en s’interconnectant avec un large écosystème de solutions technologiques et de fournisseurs de données, y compris avec les Adservers de Google et Facebook.