Les étapes de la professionnalisation du Mac

Mobilité

La firme à la Pomme, en adaptant peu à peu ses matériels, son système et ses logiciels aux marchés professionnels, se place dans une configuration résolument professionnelle. Les éditeurs de logiciels, de Lotus à Tenon en passant par Oracle semblent y croire, tandis que Sun et HP se rapprochent peu à peu d’une offre Mac OS. L’abandon d’une version de Final Cut Pro pour Mac OS 9 accentue l’impression d’une poussée vers Jaguar, le futur Mac OS X, version 10.2.

La firme à la Pomme semble tout à coup changer de visage : en dévoilant chaque semaine un nouveau produit ou une mise à jour, la Pomme entretient l’intérêt autour de ses solutions. Mais en sous-main, on voit surtout se dessiner la professionnalisation de son offre. Celle-ci n’est pas à proprement parler nouvelle, puisque le marché français d’Apple repose à 50 % sur les professionnels (ainsi que nous l’avait indiqué le patron d’Apple France dans une interview), mais le coup de rein que la firme donne en ce moment, sur un marché de l’informatique atone, peut surprendre. De fait, l’ensemble des matériels d’Apple est en train de subir un nettoyage de fond destiné à lui permettre de s’adresser à une niche du marché professionnel. En commençant par l’iBook qui vient tout juste de se voir lifter, et dont les nouvelles caractéristiques en font une machine parfaite pour certains professionnels indépendants. Et le PowerBook lui aussi a été doté de nouvelles fonctionnalités, tel le port DVI. Restent deux machines à modifier dans ce sens : le nouvel iMac, mais surtout le PowerMac, dont il se dit qu’il pourrait voir son design et sa puissance sérieusement mis à jour au prochain MacWorld. L’arrivée de serveurs en rack 1U Xserve, disponibles à partir de juin, et d’un système de stockage 3U (sans doute en RAID 5) d’ici la fin de l’année ne font qu’accentuer la validité de l’offre d’Apple. Mais c’est du côté du logiciel système que la firme est surtout attendue : la version actuelle de Mac OS1X, Puma, doit être remplacée par une version Jaguar dans le courant de l’été. Le point essentiel sur lequel cette version 10.2 du système d’exploitation Unix de la firme doit faire ses preuves, c’est sa capacité à remplacer la version 9 de Mac OS en fournissant un niveau de prestation au moins similaire. Il semble que le nouveau système dépasse de loin l’ancien. A l’appui de cette thèse, le lancement de la version 3.0.2 de Final Cut Pro, qui s’avère être la dernière pouvant tourner sous Mac OS 9. Même si l’émotion est vive parmi les utilisateurs, ce type d’annonce de la part d’Apple était attendu depuis l’enterrement fictif de l’ancien système devant les développeurs lors de la WWDC (voir édition du 7 mai 2002).

Les grands éditeurs intéressés par le Mac

Mais l’autre indice notoire d’un renouvellement d’intérêt pour le marché professionnel de la part d’Apple et ses partenaires demeure l’arrivée massive d’éditeurs qui n’avaient pas fourni de version Mac de leurs applications depuis des années voire jamais ! Outre les petits éditeurs sous Unix qui proposent des outils professionnels intéressants mais limités à une utilisation indépendante ou en PME/PMI, Oracle et son concurrent de toujours Sybase, ont chacun annoncé l’arrivée de leurs produits sur la plate-forme Mac OS X. Pour Sybase, il s’agit du portage d’Open Server et d’open Client, tandis que pour Oracle, il s’agit de l’arrivée de sa base de donnée relationnelle 9i, très attendue par les entreprises. « La technologie de cluster de bases de données leader d’Oracle, Oracle 9i Real application Clusters, en tournant sur Xserve fournira des solutions d’un niveau recherché par les entreprises à nos clients communs et créera de nouvelles opportunités de marché pour nos deux sociétés ». Et l’arrivée de ces poids lourds s’explique facilement : sur le marché des entreprises, 23 % des nouveaux utilisateurs de Mac OS X se disent intéressés par l’achat d’un système de gestion de base de données, selon Sybase. « Nous nous donnons comme objectif de devenir la base de donnée standard tournant sous Mac OS X », a indiqué Raj Nathan, son directeur général de la division serveurs, à l’occasion du lancement de l’Xserve.

Un monde Mac de plus en plus ouvert

Avec le renforcement de ses solutions, Apple ne fait finalement qu’accélérer une tendance, mais surtout crée une nouvelle opportunité, sur un marché informatique généralement considéré comme atone ! La confirmation ? Elle vient de Sun par exemple, qui a décidé de reprendre en main son projet OpenOffice pour Mac en le proposant dans une version disponible au travers de X Window, pour la somme de 76 dollars (84 euros). Et il n’est pas le seul à croire en une reprise d’intérêt pour Mac OS : Lotus, la filiale d’IBM éditrice de l’outil de groupe de travail et client de mail Notes vient tout juste de mettre à jour sa version bêta de l’application pour X ! Des exemples comme ceux-ci abondent : ainsi de Tenon, qui fait une offre sur son logiciel d’administration Web pour Xserve, ou encore HP, dont Apple a annoncé qu’il serait partie prenante de l’élargissement des solutions aux entreprises. « Nous sommes enchantés de continuer notre tradition de travail avec Apple en étendant HP OpenView, notre logiciel de gestion, au Mac. (…) HP soutient complètement une stratégie multi plates-formes, qui vient compléter l’effort d’Apple de s’approprier les standards de l’industrie et permettra à l’Xserve d’Apple d’être gérer sans contrainte depuis l’environnement OpenView ». Et d’annoncer que d’autres solutions devraient être portées. La prochaine étape risque de voir débarquer les logiciels industriels comme les ERP, dont certains sont déjà présents sur Mac. Fermée la plate-forme d’Apple ? Le jugement semble définitivement à réviser.