Longue traîne : deux chercheurs français ont décortiqué le concept

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Pierre-Jean Benghozi (CNRS) et Françoise Benhamou (CEPN) ont re-visité de manière empirique le concept de « Longue traîne ». Mythe ou réalité ?

Enfin, l’effet « Longue traîne » doit être provoqué, en particulier grâce aux « mécanismes des sites en ligne affichant, pour un titre donné, les titres similaires choisis par les internautes ». Ce sont par exemple les fameuses recommandations d’Amazon : « Les clients ayant acheté cet article ont également acheté… « .

Apportons néanmoins un sérieux bémol à la validité des résultats de cette étude : elle n’a porté que sur la vente de biens matériels (« vrais » disques, « vrais » livres, « vrais » DVD… ) et non pas sur la vente de biens dématérialisés. Or, dans le livre de Chris Anderson, il est clair  que la longue traîne ne portera vraiment ses fruits que dans une économie entièrement numérique.

« Il est évident que cette étude est à la charnière entre deux mondes : le monde physique et le monde numérique », reconnaît Philippe Chantepie, chef du Deps. « Avec ce genre d’études, on est juste en train d’ouvrir la boîte noire de la longue traîne », résume Daniel Kaplan.

Jamendo témoigne : la queue de la comète, ce sont des petits revenus

Et les professionnels, qu’en pensent-ils ? « Faute de temps, je n’ai pas pu assister à la présentation des résultats de cette étude, mais la longue traîne est un concept que je suis depuis ses débuts, commente Pierre Gérard, co-fondateur de Jamendo.com.

Créé en 2005, ce site de musiques « libres, légales et illimitées » permet à des auteurs talentueux mais inconnus de disposer d’une vitrine. Il a bénéficié d’un premier tour de table avec Mangrove en juillet 2007.

« Il est clair que la numérisation et Internet permettent de monétiser des contenus qui ne pouvaient pas l’être auparavant. Mais, pour les auteurs et les créateurs qui sont dans la longue traîne, celle-ci ne fournira jamais que des revenus complémentaires : la queue de la comète, ce sont beaucoup de petits revenus…  » , déclare Pierre Gérard.

Comment Jamendo peut-il en vivre ? « Nous voulons essayer d’intégrer ces musiques dans des compilations qui seront vendues sous formes de flux professionnels : musiques pour salles d’attente, restaurants, cafés… « 

En cela, Jamendo rejoindrait une des autres conclusions de l’étude française sur la « long tail » : « Le concept marche mieux si on ne cherche pas à vendre des titres à l’unité mais dans la cadre une offre globale, sous forme d’abonnements ou de forfaits », acquiesce Pierre-Jean Benghozi. Au moins, sur ce point, praticiens et théoriciens de la « longue traîne » se rejoignent.