M. Quéméner (cyber-criminalité) : « Poursuivre les cyber-délinquants, protéger les libertés individuelles, un dosage savant »

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Ce magistrat au service criminel de la Cour d’appel de Versailles dresse un panorama des dispositifs d’écoutes, de veille voire de traques sur les réseaux électroniques.

Vnunet.fr : Quelle est la différence de ses plates-formes avec Internet-signalement.gouv.fr ?
Myriam Quéméner : La vocation de cette plate-forme mise en place par le ministère de l’Intérieur est complètement différente : la centralisation des signalements des contenus illicites sur Internet (réception des signalements, traitements et envois aux services judiciaires compétents). Elle est également opérationnelle, même si elle a fait l’objet d’un changement de noms. A l’origine, l’initiative s’appelait Internet-mineurs.gouv.fr. En début d’année, elle a été rebaptisée Internet-signalement.gouv.fr qui a été élargi à toutes les infractions liées aux nouvelles technologies. Le ministère de l’Intérieur l’exploite par  l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication (OCLTIC) [qui va devenir l’Office central contre la cybercriminalité OCC ou O2C, ndlr]. Elle s’est retrouvée sous les phares des médias en début d’année avec la création d’un groupe dédié aux escroqueries en ligne dans le cadre du projet Pharos.

Vnunet.fr : En conséquence, il n’y aurait pas de risque de surveillance généralisée des écoutes électroniques en France ?
Myriam Quéméner : C’est strictement interdit. L’objectif est de trouver un savant équilibre : poursuivre les cyber-délinquants tout en protégeant les libertés individuelles. La Commission nationale Informatique et Libertés a toujours donné son avis sur ses projets d’interception. Actuellement, un projet de loi Lopsi II (loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure) est en cours de discussion. Il y a des dispositions de « captations de données numériques à distance » mais il faut affiner le dispositif de contrôle. Il s’agit d’autoriser des perquisitions à distance via des intrusions dans les systèmes d’information ou de recourir à des logiciels espions et des chevaux de Troie. Ce sont des mesures d’investigation attentatoires à la liberté. On va utiliser des outils de pirate mais ce sera extrêmement contrôlé par un juge. Mais je ne veux pas faire peur aux gens : ces mesures ne s’appliqueront pas dans le cadre de la loi Hadopi par exemple. Uniquement pour des affaires graves comme le terrorisme.

Cyber-criminalité – Défi mondial : la version réactualisée
Myriam Quéméner et Joël Ferry viennent d’éditer la deuxième édition de leur ouvrage Cyber-criminalité – Défi mondial (éditions Economica). Cet ouvrage, qui s’adresse aussi bien aux internautes qu’aux acteurs économiques et aux professionnels du droit, permet d’acquérir une meilleure connaissance de la cyber-criminalité et du dispositif légal de lutte. Son co-auteur Joël Ferry occupe le grade de Colonel de gendarmerie commandant la section de recherches de Versailles. Il a notamment servi à l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information (OCLCTIC) et de la communication et à la Direction des affaires criminelles et des grâces.


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