Quand la ministre de l’Enseignement supérieur invite des blogueurs à dîner

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Plusieurs blogueurs, considérés comme influents, sont invités par Valérie Pécresse pour parler des TIC « de manière informelle ».

Après les marques, les personnalités politiques et leurs conseillers en communication ont apparement trouvé dans les blogs un relais idéal pour diffuser leurs idées et dévoiler quelques projets. On pourrait en tout cas le croire au regard de l’invitation originale reçue par une trentaine de blogueurs français.

Dans cette missive, il est indiqué que Valérie Pécresse, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, serait une fervente lectrice des blogs qui traitent « avec pertinence de la thématique des nouvelles technologies ». Elle propose à ces relais d’opinion un « diner informel » qui serait organisé début décembre.

Une occasion rêvée pour parler de l’état des technologies de l’information (TIC) mais les débats pourraient déborder sur des sujets d’actualité comme le brûlant rapport Olivennes sur la lutte anti-piratage. Et pourquoi pas engager des débats qui s’élargiraient aux réformes menées par son ministère.

Tous n’ont pas confirmé leur présence à ce rendez-vous « informel » avec la représentante du gouvernement. C’est le cas d’Olivier Ertzscheid, maître de conférence à l’université de Nantes, qui a décliné l’invitation. Il s’en est expliqué longuement sur son blog : « En demandant si j’étais invité au titre de ‘blogueur’ ou à celui de maître de conférence ‘spécialiste’ des NTIC, on m’a répondu que c’était au titre de blogueur », écrit Olivier Ertzscheid.

« une opération de communication »

Contacté par téléphone par Vnunet.fr, le maître de conférence considère « avoir rapidement pressenti que tout cela ressemblait fort à une opération de communication. » Il a publié sur son blog une partie de la liste des confrères blogueurs invités. On remarque que la plupart d’entre eux sont en bonne place au sein du Top des blogueurs High-Tech sur le moteur d’actualité Wikio.

Concernant le refus d’Olivier Ertzscheid, ce geste n’aurait rien de politique mais ce dîner poserait plusieurs questions éthiques. « L’invitation de Valérie Pécresse entretient une confusion de plus en plus nocive entre ‘autorité’ et ‘notoriété’, confusion que je m’efforce de combattre au quotidien auprès de mes étudiants, et confusion qui est chaque jour davantage au coeur de bien des ‘mauvais’ usages des NTIC », précise ce maître de conférence. « Je refuse de me prêter au jeu du blogueur relais d’opinion et chambre d’écho politique », conclut sans détour Olivier Ertzscheid.

En tout cas, cette invitation va raviver le débat entre l’influence des journalistes et celle des blogeurs. Contacté Jeudi 29 Novembre par Vnunet.fr, le service de presse du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche n’a pour l’heure pas donné suite à nos demandes de précisions sur cette initiative.

Olivier Ertzscheid n’y va pas, pourtant il a un message à faire passer…
Lors d’une interview téléphonique accordée à Vnunet.fr, le « maître de conférence – blogueur » a déclaré que le chantier des NTIC est « crucial pour l’accès de tous à la société de la connaissance ». Beaucoup de chantiers ont été entamés, beaucoup restent à ouvrir. « Les récentes déclarations de la ministre qui semble tout miser sur le ‘taux d’équipement’ des ménages et des différents organismes (les universités notamment) me semble réducteur, même s’il est nécessaire », déclare Olivier Ertzscheid. « Si je m’étais rendu à ce dîner j’aurais insisté sur l’impérieuse et urgente nécessité d’une politique de formation et d’accompagnement aux nouvelles technologies. A l’université puisque c’est là où j’enseigne, mais ailleurs également », poursuit-il. Un grand chantier resterait à ouvrir pour faire de la France un pays leader dans ce que l’on appelle « l’Open Access » c’est à dire l’accès ouvert aux résultats de la science. « Les grands classement internationaux des universités, tant vantés dans les cabinets ministériel, intégreront demain ce paramètre comme un facteur clé de succès », assure Olivier Ertzscheidet. Dommage pour le dîner, cette contribution auraît été très enrichissante…