Quand la Net-économie se met à faire de la politique

Mobilité

Avec l’élection présidentielle, une vague de Net-entrepreneurs affiche
clairement leur soutien politique, toutes tendances confondues.

C’est la dernière ligne droite pour la course à l’Elysée. C’est le moment d’abattre ses dernières cartes et de rejoindre les camps de Nicolas Sarkozy ou de Ségolène Royal. Dans la sphère de la Net-économie, des ralliements sont apparus plus nettement au cours de la période de l’entre-deux tours.

Côté UMP, difficile de n’avoir pas remarqué l’activisme du blogueur Loïc Le Meur. C’est le premier Net-entrepreneur à s’être déclaré pro-Sarkozy dès septembre 2006. Dans sa contribution sous forme de déclaration de flamme, il expliquait que le candidat UMP était le mieux placé pour « construire une société de créateurs et d’entrepreneurs ». De plus, Nicolas Sarkozy promet une exonération des charges fiscales et sociales pour une activité Internet personnelle dans une limite à définir. Forcément, cela attire l’attention des acteurs de la Net-économie de l’Hexagone. Mais, évitons de tomber dans l’écueil des clichés et des raccourcis. Le choix de soutenir tel candidat dépend de plusieurs critères : vision, programme, charisme de l’homme politique. Le volet « avantage fiscal » peut finalement apparaître comme la cerise sur le gâteau.

Depuis sa prise de position fondatrice, Loïc Le Meur s’est fortement impliqué au sein du comité Internet de l’équipe de campagne de Nicolas Sarkozy. Le mois dernier, il a quitté le mois dernier ses fonctions de vice-président de Six Apart (éditeur de solutions de blogs) dans l’idée d’explorer une nouvelle activité? orientée blogging. Mais il n’oublie pas pour autant son candidat fétiche. Au cours de la semaine de l’entre-deux tours, il a établi sur son blog une liste de soutien d’entrepreneurs Internet ou télécoms accessible en faveur de Nicolas Sarkozy. Pêle-mêle parmi les ralliements les plus emblématiques, citons Marc Simonici (Meetic), Pierre Chappaz (Wikio), Orianne Garcia (Lentilles-moins-cheres.com), Jérémie Berrebi (Zlio), Catherine Barba (Cashtore), Bruno Massiet du Biest (118 218)?La liste est longue.

De la difficulté d’obtenir un soutien explicite

Côté PS, on ne reste pas non plus les bras croisés. Fort de leurs convictions politiques, des Net-entrepreneurs ont officiellement manifesté leur soutien à Ségolène Royal. C’est le cas de Rodriguo Sepulveda Schultz, PDG de Vpod, qui a joué carte sur table à travers une contribution sur son blog datant de novembre 2006. Il mettait en avant des thèmes portés par Ségolène Royal qui lui tient à coeur : l’éducation, la justice sociale, l’Europe?

Le 26 avril, l’Association des amis de Ségolène Royal a organisé une rencontre à Paris autour des entreprises et du Pacte Présidentiel. L’occasion de compter ses alliés dans la Net-économie. Citons par exemple Daniel Kaplan (Fondation Internet Nouvelle Génération), Bruno Laforestrie, fondateur de Hi-Media, Jacques Rosselin (souvenez-vous, la web télé pionnière Canal Web)?

« Il est très facile de demander de soutenir un candidat mais c’est très difficile de l’obtenir », explique Jean-Bernard Magescas, responsable de Fon France. Ce militant du PS – « hardcore » précise-t-il – fait partie du noyau de l’équipe de Désir d’Avenirs, qui a contribué à la présence d’une section PS dans le monde virtuel Second Life (à l’instar d’un Loïc Le Meur côté UMP).

Initiative apolitique ou soutien individuel

Mais, globalement, les manifestations d’engagements politiques forts de la part de Net-entrepreneurs en France restent timorées. Comme si le fait d’afficher clairement sa couleur politique pouvait déteindre sur le business. Encore récemment, un dirigeant comme Arnaud Dassier, PDG de la web agency L’Enchanteur des Nouveaux Médias, ne souhaitait pas que l’on cite le nom de sa société lorsqu’on l’interrogeait sur des sujets politiques. Maintenant, il joue la transparence : son identité accolée à sa société figure dans la liste de soutien à Nicolas Sarkozy établie par Loïc le Meur sur son blog.

Mais les mentalités évoluent. Parfois de manière collective à l’instar de l’initiative « apolitique » de Renaisssance Numérique : cette association, regroupant un collectif d’entrepreneurs Internet, a établi une liste de propositions pour favoriser l’usage des TIC en France destinées aux canditats engagés dans la course à l’Elysée. Parfois de manière individuelle. Illustration avec Gilles Babinet, à la fois créateurs de plusieurs start ups (Musiwave, Eyeka…) et business angel (dans le tout fraîs projet MXP4). En février dernier, il franchit un cap décisif en envoyant un mail à plus de 900 personnes pour afficher clairement son soutien à?François Bayrou. Une prise de position publique atypique dans la sphère Internet.

C’est le premier Net-entrepreneur (voire le seul ?) à avoir donné sa préférence au candidat UDF, qui était pourtant le plus technophile des principaux prétendants à la présidence de la République. « Il n’est pas dans mes habitudes d’exposer publiquement mes convictions, et c’est pourquoi, j’ai dû un peu forcer ma nature pour vous écrire ce mail? », pouvait-on lire en introduction dans le mail de Gilles Babinet. Celui-ci présente François Bayrou comme le candidat qui « s’oppose au populisme »,« qui choisit la cohérence économique » et « qui privilégie l’idéal républicain ».

Contacté par Vnunet.fr au cours de la période de l’entre-deux tours, Gilles Babinet assure qu’il ne compte pas en rester là alors que son candidat fétiche est arrivé en troisième position lors du premier tour du scrutin.  » Je vais prendre ma carte au sein du nouveau parti que François Bayrou va créer » , explique le Net-entrepreneur. Celui-ci ne désespère pas de rencontrer prochainement le candidat qu’il a soutenu au premier tour de l’élection présidentiel et ? pourquoi pas ? jouer un « rôle actif » auprès de lui. Les modèles politiques pourraient-ils susciter de nouvelles vocations parmi les défricheurs de modèles économiques?


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