Taxe sur la copie privée : l’UFC-Que choisir explique son refus

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Une taxe inadaptée aux usages. Telle est l’analyse que l’association des consommateurs UFC-Que choisir fait de l’extension aux « supports intégrés » de la taxe sur la copie privée et contre laquelle elle a voté. Si l’association rappelle son attachement à la défense des artistes, elle a décidé de déposer un dossier auprès du ministère de la Culture afin de revoir le calcul de la taxe et son application. Entre autres.

« La taxe sur la copie privée n’est plus en rapport avec les usages », considère Julien Dourgnon, représentant de l’UFC-Que choisir. L’association de défense des consommateurs a été le seul membre de la commission Brun-Buisson, désigné par Catherine Tasca, alors ministre de la Culture, il y a quatre mois, à avoir voté contre les nouvelles taxes sur les supports d’enregistrement audiovisuel. Celles-ci varient entre 8 et 20 euros selon les appareils et portent sur les « produits intégrés » que sont (ou seront bientôt) les magnétoscopes et décodeurs numériques, baladeurs MP3 et chaînes hifi numériques principalement (voir édition du 5 juillet 2002). On pourrait penser que c’est justement sa relative fraîcheur au sein de la commission qui exacerbe l’esprit de l’association de consommateurs au point voter seule contre dix-huit (les représentants des industriels ayant préféré ne pas participer du tout). Et aussi sa volonté de ne pas se laisser emporter par les influences – pour ne pas parler de pressions – de certains membres. Mais non, l’UFC-Que choisir a des arguments qui posent notamment des questions sur le rôle et le fonctionnement de la commission.

« Les représentants des ayants droit, majoritaires au sein de la commission, ne font pas de distinction entre copie et usage, ils estiment que tout enregistrement d’une oeuvre s’assimile à une copie et, à ce titre, a un droit de rémunération », explique Julien Dourgnon très remonté, « or il n’existe aucune étude pour savoir ce qui est réellement fait des enregistrements. » Le représentant de l’UFC-Que choisir rappelle notamment que les retransmissions sportives ne sont pas soumises au droit d’auteur et ne bénéficient donc pas de rémunération sur la copie privée. Pourtant, le particulier qui enregistre le match de football Guingamp-Gueugnon sur son décodeur numérique aura payé une taxe inadaptée à son usage. Comme il le fait d’ailleurs déjà quand il utilise son magnétoscope analogique… Et les exemples ne manquent pas (voir encadré).

La commission manque d’informations indépendantes « Les représentants des sociétés de gestion de droits se moquent de l’usage qui est fait. Ils imposent leur vision de la loi qui s’appuie sur un avis du Conseil d’Etat, lequel estime que la copie privée est la compensation d’une perte », détaille Julien Dourgnon, « mais cette perte ne fait référence à aucune donnée, aucune étude. » Le représentant de l’UFC-Que choisir regrette qu’aucun budget ne soit donné à la commission pour réaliser ces études. « Le ministère met une secrétaire à notre disposition, c’est tout, nous n’avons pas non plus les moyens de réaliser ces études et je n’aurai évidemment aucune confiance dans des études commandées par les sociétés de gestion des droits d’auteur. Les informations arrivent au sein de la commission par les membres eux-mêmes. » Et selon lui, certains ne se gênent pas pour donner de fausses informations. Ainsi, TPS aurait annoncé l’arrivée des nouveaux décodeurs numériques pour septembre alors qu’ils étaient disponibles pour la coupe du monde de football.

Très motivée, l’association de consommateurs va déposer, à la rentrée, un dossier auprès du ministère de la Culture. Devraient y être évoqués les points soulevés ici ainsi que des remarques sur le fonctionnement de la commission qui, contrairement à ce que nous écrivions précédemment, a un pouvoir décisionnel et, à ce titre, ne requiert pas l’aval du ministre pour faire appliquer ses décisions. L’UFC-Que choisir devrait également proposer un autre système de calcul de la taxe.

L’UFC-Que choisir doit encore affûter ses armes

Bien entendu, l’UFC-Que choisir souhaite aussi informer le consommateur. « Il serait intéressant de lui indiquer la part de copie privée qu’il paye sur un produit mais aussi le montant des droits », propose le représentant de l’association. « Il faut dépasser l’idée que la copie va tuer la création d’autant que la rémunération va essentiellement aux artistes les plus connus, donc ceux qui n’en ont pas le plus besoin. » Ce qui n’empêche pas l’association de rappeler son attachement au droit à la copie privée et à la défense des biens culturels. Et si les solutions proposées ne sont pas toujours claires, Julien Dourgnon rappelle que l’UFC-Que choisir « est en pleine réflexion » sur un sujet que l’association a pris en main il y seulement quatre mois.