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Comment La Poste, Orange et la SNCF se frottent à l’open innovation

« Trop gros pour innover ? » L’intitulé de la conférence qui s’est tenue jeudi 11 juin à Futur en Seine avait le mérite d’être explicite.

Est-ce que des institutions parfois centenaires comme la SNCF, Orange et La Poste sont en mesure de s’ouvrir au monde de l’innovation pour se transformer ?

Une table ronde qui n’aurait certainement pas eu lieu il y a encore deux ans mais qui sous les coups de boutoir des fameux GAFA prend aujourd’hui tout son sens.

Brainstorming géant pour les 260 000 postiers

Pour Muriel Barnéoud, P-DG de Docapost, filiale de services du traitement des documents du groupe La Poste, la question ne se pose même pas.

« Il n’existe pas d’abri antinumérique pour se réfugier. Quelle que soit l’organisation, le transformation numérique est irrésistible. Le digital est comme une nouvelle source d’énergie qu’il faut apprendre à maitriser. »

La Poste cultive l’innovation depuis très longtemps. « Derrière la simplicité apparente de la distribution du courrier par le facteur, on fait appel à la reconnaissance d’écriture et d’image mais aussi au big data. 70 millions d’objets sont transportés chaque nuit. »

Mais la R&D seule ne suffit pas. « Je ne suis pas sûre que les fabricants de bougies auraient trouvé l’ampoule même avec une équipe R&D pléthorique. »

Pour l’innovation de rupture, il faut s’ouvrir aux autres. Le Lab Postal, rendez-vous annuel de l’innovation numérique du groupe, a permis de dénicher, en six ans, plus de 90 entreprises innovantes et de construire avec elles autant de prototypes. Plus récemment, La Poste a lancé Start’inPost, son accélérateur de start-up.

La Poste se tourne en interne avec l’opération « 20 projets pour 2020″. Les quelque 260 000 postiers ont la possibilité de montrer leur capacité à innover en présentant leurs projets par équipes de 2 à 5 personnes sur la plateforme Web dédiée (clôture des candidatures le 19 juin pour le concours 2015).

Les postiers lauréats ont 6 à 18 mois pour démontrer la viabilité de leur projet en se consacrant à 100% à son développement. « La Poste a montré qu’elle sait prendre des risques comme avec la serrure connectée ou l’imprimante 3D en libre-service dans les bureaux de poste. »

En tant que tiers de confiance pour les échanges courriers ou numériques, La Poste a, selon Muriel Barnéoud, une superbe opportunité de se positionner sur le terrain de la « privacy » et de la confidentialité des données.

« Les consommateurs veulent reprendre possession de leurs données. Tout le monde l’a maintenant compris : quand c’est gratuit, c’est que vous êtes le produit. Cet enjeu ne peut qu’aller croissant, la maison ou la voiture étant appelées aussi à produire des données. Nous l’avons vu lorsque nous avons présenté notre hub numérique au dernier CES, ce sujet est aussi très fort de l’autre côté de l’Atlantique. »

« Si nous avions investi dans Skype… »

Orange a fait, lui, le chemin inverse. Avec ses 2000 chercheurs, son technocentre son réseau de Labs Orange (ex France Télécom R&D), l’opérateur a d’abord capitalisé sur sa force de frappe interne en matière d’innovation.

75 000 salariés français sont, par ailleurs, inscrits au réseau social maison qui compte de multiples communautés.

Mais depuis quelques années, l’accent est mis sur l’ouverture. Après avoir créé un fonds d’investissement de 300 millions d’euros avec Publicis et Iris Capital Management, le groupe a lancé son propre fonds en janvier dernier.

Avec Orange Digital Ventures, l’opérateur investira, via des participations minoritaires, dans les startups du numérique avec une enveloppe de 20 millions d’euros pour la première année.

« Nous avons reçu 300 dossiers en 3 mois, se réjouit Pierre Louette, Directeur général adjoint et secrétaire général d’Orange. Avec ce fonds, nous misons sur des sociétés en rupture complète avec nos métiers. Par exemple, nous pourrions investir dans un MVNO basé sur le partage avec, pour modèle économique, la monétisation des données et non l’abonnement. Si nous avions investi à ses débuts dans Skype qui capte aujourd’hui 40 % des appels internationaux…»

S’appuyer sur la dynamique de Voyages-SCNF.com.

Directeur du digital et de la communication de la SNCF depuis neuf mois, Yves Tyrode entend insuffler à l’ensemble du groupe la dynamique de la filiale Voyages-SCNF.com dont il était jusqu’alors directeur général.

L’organisation agile mise en place au sein du premier site commerçant français peut profiter aux métiers industriels du transporteur ferroviaire aux cycles plus longs. Infrastructure big data (Hadoop, NoSQL), méthodes agiles, DevOps… Avec son usine logicielle de Nantes, Voyages-SCNF.com s’est structurée industriellement pour faire face aux défis de la vente en ligne, notamment sur mobiles.

« On s’est posé un temps la question d’aller à l’offshore en Inde, se rappelle-t-il. Mais avec un cycle d’itérations de 2 ou 3 « releases » par mois, il est rapidement apparu qu’il fallait le faire en interne et d’adopter une approche agile. La gestion de projet en V, ça ne marche plus. »

Tout l’enjeu de la SNCF consiste désormais à s’ouvrir. « Nous n’avons pas d’autre choix de travailler avec les autres, que de fédérer des écosystèmes ».

Lors de la présentation de son plan de transformation numérique en février dernier, la SNCF a annoncé qu’elle ouvrirait aux développeurs et startups un magasin, Store SNCF, regroupant toutes les applications internes développées par les cheminots.

Dans le même esprit et comme promis, la SNCF a ouvert, ce 15 juin, ses API afin que des développeurs tiers aient à disposition des données toujours à jour.

Selon une tarification de type freemium, le ticket d’accès sera modulé en fonction de l’usage. Les géants du Web payant davantage que les start-up.

La grille des tarifs sera publiée cet été, a précisé Guillaume Pepy, PDG de la SNCF, également présent à Futur en Seine.

« L’ouverture des API est très bonne nouvelle », insiste, de son côté, Yves Tyrode. « Le passage à l’échelle est essentiel, les GAFA l’ont montré. Peut-être que le principal actif d’Apple, ce sont les 1,4 million d’applications mobiles sur son App Store. »

Enfin, l’entreprise entend investir dans les start-up les plus prometteuses avec la création du fonds Digital SNCF Ventures doté de 30 millions d’euros.

Des agences de com’ accueillent des start-up

Il n’est pas nécessaire d’être un grand compte pour fédérer un écosystème de jeunes pousses.

Présidente de l’Association des agences conseils en communication (AACC) et directrice générale d’Ogilvy France, Natalie Rastoin peut en témoigner.

Son syndicat a monté, avec le pôle de compétitivité Cap Digital, le programme Startup Project.

Chaque année, les jeunes pousses labellisées sont promues sur une place de marché. Elles sont aussi physiquement hébergées dans les agences où elles bénéficient d’un accompagnement ainsi que d’un accès aux clients. Les start-up éligibles doivent présenter une technologie « existante ou démontrable ». Les agences les aideront à travailler l’usage et de le faire correspondre à un besoin marché.

« Tout syndicat professionnel, comme le nôtre, peut faire le lien avec écosystème de start-up », invite Natalie Rastoin.

« Une fois que l’on a admis que le numérique est aussi important que l’électricité, il faut prendre en compte le changement sociétal de la transformation digitale. Je ne suis pas sûre que cela intéresse les top managers. Il fait qu’ils aient peur d’être ‘uberisés’ pour agir. »

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